Encore aujourd'hui, des filles ne peuvent pas jouer au football dans le canton de Vaud. Ou, quand elles le peuvent, ce n'est pas toujours dans des conditions adéquates, sans même parler de confort.
Le constat n'est pas nouveau, mais l'Association cantonale vaudoise de football a décidé de prendre les choses en main l'an dernier, en lançant un plan de trois ans nommé «Honeyball», en référence à Nettie Honeyball, pionnière du football féminin et fondatrice à la fin du 19e siècle de l'un des premiers clubs de football féminin de l’histoire. Le but: augmenter la proportion de joueuses dans le football de base vaudois. Mais surtout, être capable d'absorber l'afflux espéré de nouvelles joueuses, de tous âges. Le budget de ce projet est de 750'000 francs, financé à moitié par l'Etat de Vaud.
«On devait, et on doit toujours, rattraper la moyenne nationale», explique Beatriz Perez, présidente de la commission football féminin à l'ACVF. Ce projet ayant été lancé en mars 2024, il est déjà l'heure de faire un premier bilan d'étape, une année après le début. Et c'est peu dire que les chiffres sont réjouissants et encourageants.
Un plan en trois étapes
«Quand nous avons commencé, nous avons développé un plan en trois étapes. La première mesure, la plus simple, était de remercier les clubs ayant fait du football féminin une priorité jusqu'à présent», explique Beatriz Perez. Ces clubs, que l'on peut qualifier de «pionniers vaudois», ont été facilement identifiés et ont reçu une gratification financière. Il aurait en effet été injuste, maintenant qu'un peu d'argent est injecté, que l'encouragement en espèces ne concerne que ceux qui viendraient se greffer maintenant au projet. L'ACVF a ainsi voulu montrer sa reconnaissance envers les clubs «du premier jour», un geste particulièrement bien pensé et d'ailleurs très bien accueilli.
Plus d'équipes pour moins de kilomètres
La deuxième mesure a été d'identifier les problèmes (manque de vestiaires, manque de terrains, manque d'entraîneures et d'entraîneurs, manque de joueuses). Le fait qu'il y ait peu d'équipes de base pose des problèmes logistiques, un championnat se jouant sur une très longue distance kilométrique, que ce soit dans le canton ou même hors de ses frontières. Aller de Coppet à Aigle et vice versa pour jouer un match de football dit «de base», voilà une mesure à améliorer, mais, pour y parvenir, pas de miracle: il faut plus d'équipes pour pouvoir créer des groupes plus régionaux.
8,3% du total des licenciées et licenciés sont des filles
La troisième mesure est donc celle dite des «solutions», au travers d'une «boîte à outils» à disposition de tous depuis juin 2024. Et es premiers effets positifs, et mesurables, sont déjà visibles. Le canton de Vaud a en effet gagné 825 joueuses supplémentaires, soit une hausse de... 160%! Au total, 3255 filles jouent désormais au football dans le canton de Vaud, et la progression du ratio joueuses/total des licenciés progresse au rythme d'1,5%, contre une croissance de 0,9% au niveau suisse. La tendance est donc au rattrapage du retard, même si la route est encore longue. Ces 3255 footballeuses forment en effet 8,3% de l'ensemble des licenciés du canton. L'objectif consiste à atteindre les 11%, c'est à dire la moyenne nationale, fin 2026.
«Ah c'est des filles qui jouent»
Le nombre total d'équipes féminines est lui passé de 46 à 74, soit une augmentation de 28 équipes, dont une immense majorité chez les juniores. Une catégorie de jeu pour les seniors a également été lancée. «C'est l'idéal pour les personnes comme moi, qui ne peuvent consacrer qu'une soirée par semaine à la pratique du football sur le terrain», souligne Beatriz Perez, également très satisfaite de ce succès, mais désireuse de changer encore un peu les mentalités. «Ça m'énerve encore d'entendre: 'Ah c'est des filles qui jouent' à proximité d'un terrain où il y a un match. Et croyez-moi, ça arrive encore! Ce que j'aimerais entendre, c'est 'Ah, il y a un match de foot'. Ce jour-là, je serai heureuse», témoigne-t-elle.