Le défenseur qui monte
Christian Marques, l'ambitieux et costaud roc d'Yverdon Sport

A 21 ans, Christian Marques est en train de s'affirmer avec Yverdon comme l'un des meilleurs défenseurs centraux de Super League, lui qui est même devenu international portugais M21 cet automne. Entretien avec le costaud et ambitieux patron de la défense d'YS.
Publié: 13.12.2024 à 19:44 heures
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Dernière mise à jour: 13.12.2024 à 19:45 heures
Le puissant défenseur yverdonnois réalise une excellente saison avec Yverdon Sport.
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Tim GuilleminResponsable du pôle Sport

Il est l'une des grandes satisfactions, et même la plus grande, de la saison d'Yverdon Sport. A 21 ans, le défenseur central Christian Marques impressionne par sa lecture du jeu et sa présence dans les duels, lui qui est ce que l'on peut appeler un joueur complet, sans véritable point faible à l'exception d'une pointe de vitesse encore à travailler.

Alors qu'il n'a manqué que six minutes (!) cette saison en Super League, le Zurichois, parti à 16 ans à Wolverhampton, sera cependant suspendu pour la réception du FC Sion ce week-end, tout comme Dimitrije Kamenovic et Mauro Rodrigues.

Pas de quoi gâcher son très bel automne, lui qui est désormais titulaire avec le Portugal M21 et a pour objectif de disputer le prochain Euro espoirs avec l'une des meilleures sélections du continent. Ce jeudi, juste avant l'entraînement, le costaud défenseur s'est confié à Blick. Entretien dans les grandes largeurs.

Christian, comment ça se fait que tu ne sois pas à Dubaï ce jeudi, mais à Yverdon par deux degrés au dessus de zéro, en étant gentil?
Pourquoi ça? Parce que je suis suspendu samedi?

Bien sûr! Mario Balotelli il serait déjà loin, je te promets!
Ce n'est pas aussi simple que ça (rires)! Bien sûr que je suis là avec l'équipe, c'est évident. J'essaie d'aider du mieux que je peux à l'entraînement, je fais maintenant ce que les autres ont fait durant les autres semaines: me préparer comme si je jouais. 

Tu ne lève pas un peu le pied quand même?
Non, non, pas du tout.

Etais-tu énervé de sortir contre Lucerne à la 84e? Ce sont les seules six minutes que tu n'as pas jouées cette saison...
Oui, bien sûr, un peu! Chaque joueur veut jouer chaque minute! Mais je ne peux pas trop râler tout de même, l'entraîneur me fait confiance en ce moment, il me fait beaucoup jouer, ce serait malvenu de dire quelque chose (rires). Il voulait apporter quelque chose dans les dernières minutes, c'est logique.

Sais-tu quels joueurs de champ ont disputé plus de minutes que toi cette saison en Super League?
Il n'y a que des gardiens, je crois, et Numa Lavanchy.

Et Baltazar Costa aussi! Tout va très bien pour toi: tu joues tout le temps en Super League et te voilà désormais international, et titulaire, avec le Portugal M21, une équipe avec qui tu viens de disputer les trois derniers matches à l'automne. Le niveau doit être fou, non?
Je ne vais pas te mentir, lorsque j'ai reçu la première convocation, j'ai été un peu surpris. Plusieurs joueurs de cette équipe jouent déjà en Champions League ou dans des top championnats. Et là au milieu, il y a un joueur d'Yverdon! 

Comment ça se fait?
Ils ont vu ce que je faisais ici, que je jouais tous les matches, que je faisais mon job. Visiblement assez bien pour eux! Mais je peux te dire que je vois une différence, notamment technique. Ce sont des joueurs d'une qualité incroyable. Mais j'ai fait mon premier match contre Andorre, ça s'est bien passé, et j'ai reçu directement ma deuxième convocation. J'ai joué les deux matches suivants en en entier et j'en suis très fier. C'est une excellente expérience et je peux te dire que maintenant que j'y suis, j'ai un objectif très clair.

Lequel?
L'Euro M21 l'été prochain! C'est là, devant moi, et je ne veux pas le laisser filer.

L'ASF, elle est au courant que tu joues avec le Portugal M21? Ils t'ont appelé?
En M15, M16 et M17, j'ai joué pour la Suisse, je suis international. Là, le Portugal est arrivé, mais j'ai dit que je voulais finir l'aventure avec les M17. L'Euro arrivait, mais il y a eu le Covid. Le Portugal a insisté et m'a convaincu, tout simplement. J'avais 16 ou 17 ans et je suis passé direct en M20. Le Portugal, c'est aussi mon pays. Et les discussions étaient tout simplement meilleures avec eux qu'avec la Suisse à l'époque.

C'est une décision définitive? Il ne t'a pas échappé que la Suisse a un petit souci en défense centrale... Si tu continues à progresser et que Murat Yakin t'appelle pour les A, tu ne décroches pas?
Il ne faut jamais dire jamais. Je ne réponds pas «Non» à ta question. Mais en ce moment, je suis à 100% concentré sur le Portugal avec l'Euro à venir. 

Attention, question très bête, je préfère prévenir: tu as une préférence de coeur entre les deux pays?
Tu sais, j'ai joué pour la Suisse et j'étais très fier de le faire. Puis le Portugal est arrivé et ils m'ont convaincu, sur le moment, plus que la Suisse. J'ai pris cette décision et je suis très fier de jouer aussi pour le Portugal.

Chaque Portugais supporte une équipe au pays, c'est obligatoire! Toi, c'est qui?
Benfica!

Est-ce que c'est ton rêve d'y jouer? Ton objectif?
C'est clair et net qu'un jour dans ma vie, je jouerais volontiers pour Benfica. Le niveau est incroyablement élevé, ils gagnent le championnat, ils jouent la Champions League. Oui, jouer à Benfica est l'un de mes rêves.

Comment ça s'est passé quand tu avais 15 ou 16 ans, à GC? Tu étais tellement au dessus que Wolverhampton t'a repéré, c'est ça?
En fait, c'est assez drôle par rapport à ta question précédente parce qu'en fait je devais aller à... Benfica!

Mais non?
Si, si! Je voulais absolument quitter GC, je n'y étais plus bien. Ca c'était clair dans ma tête. Et j'étais vraiment sur le chemin pour aller à Benfica quand Wolverhampton m'a présenté son projet et j'ai foncé.

Pourquoi?
C'était un choix purement sportif et je dois dire que Wolverhampton a tenu toutes ses promesses envers moi. J'ai commencé avec les M16. Après deux matches, j'ai rejoint les M18, j'y ai joué peut-être dix rencontres et je suis allé directement en M21. J'avais 16 ans et j'étais capitaine des M21! Wolverhampton m'a présenté un projet qui était le bon. J'y ai appris énormément. Cela n'a pas suffi pour le dernier palier, la Premier League, mais l'expérience était énorme. J'ai participé à beaucoup d'entraînements avec la première équipe, j'étais dans le groupe pour de nombreux matches. Mes quatre ans en Angleterre ont été très précieux, très utiles. J'ai pu apprendre de très grands joueurs, de très grands entraîneurs aussi.

Lesquels en particulier?
Le premier nom qui me vient en tête, celui qui m'a le plus impressionné, c'est Conor Coady. Avec lui, tu vois tout de suite comment un capitaine doit se comporter, ce qu'il fait dans le vestiaire. Il aide chaque joueur. Quand tu as un problème, tu peux aller vers lui, il te soutient. Et puis les entraîneurs, bien sûr, Nuno Espirito Santo en premier lieu. Il était top, vraiment. Il m'a appelé à 16 ans en première équipe et m'a toujours encouragé, poussé vers l'avant. Son staff était exceptionnel aussi. Bruno Lage, qui est aujourd'hui à Benfica, m'a aussi beaucoup aidé à me développer. Julen Lopetegui, je ne l'ai malheureusement pas beaucoup eu, j'étais prêté cette année-là. Globalement, ces quatre ans ont été une expérience formidable.

Il t'a manqué quoi pour mettre le pied sur un terrain de Premier League en match officiel?
Ca, c'est la grande et bonne question... La Premier League, c'est à part, l'intensité est tellement folle! Si je compare avec la Super League, que je connais maintenant bien, en Angleterre tu cours beaucoup, beaucoup plus! Mais attention, la technique suit! Déjà en M21 en Angleterre, tu vois que chaque joueur est doué techniquement. Ensuite, tu rajoutes l'intensité et les courses permanentes, et tu as la différence avec le reste.

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Tu as signé pour deux ans avec Yverdon, ce qui veut dire que ton contrat se termine en juin 2025. Dès le 1er janvier, tu seras libre de signer où tu veux, c'est juste?
Non, pas tout à fait. Yverdon a une option pour me prolonger, mais au jour où on se parle, il n'y a pas encore de discussion. Je suis très détendu avec cette question pour le moment, je n'ai aucune pression. Peut-être qu'on va en parler en janvier, ou même pendant les vacances, je ne sais pas. Mon agent va s'en occuper très bien, comme toujours. Il faudra déjà voir si Yverdon souhaite activer l'option de prolongation ou non.

Ton agent c'est toujours Jorge Mendes? Tu le connais personnellement? Il représente quoi pour toi?
Oui, oui, c'est lui. Pour moi c'est clair: c'est le meilleur agent du monde, tout simplement. Quand on parle de contrat, de toutes ces choses, je n'ai pas à me préoccuper parce que je sais que c'est lui qui gère. Avec lui, je suis tranquille!

Tu as le contact direct avec lui?
Oui, avec lui, mais aussi avec son bras droit. Quand j'étais en Angleterre, c'était surtout avec Jorge et encore maintenant on se parle de temps en temps, mais j'ai aussi un contact régulier avec son collaborateur proche.

Voilà déjà une année et demie que tu es à Yverdon. A quel point as-tu progressé individuellement?
Au début, ce n'était pas simple, attention! Je ne jouais pas beaucoup, ce n'était pas simple mentalement. J'attendais une chance qui ne venait pas vraiment. J'ai eu des discussions le premier hiver et j'ai dit que je ne voulais pas partir, que je voulais m'imposer ici. Le club l'a accepté et en janvier, février, j'ai reçu ma chance et dès ce moment là, je ne suis plus sorti de l'équipe. Au début, quand tu n'as pas joué depuis six mois, tu ne peux pas être au top, mais l'entraîneur m'a accordé et renouvelé sa confiance. Il m'a donné ma chance. Aujourd'hui, je suis très fier de la façon dont ça s'est passé, j'ai gagné ma place au mérite et j'espère que les choses vont continuer aussi bien dès le mois de janvier.

Titulaire indiscutable, toujours sur le terrain, international portugais M21... Ta valeur a augmenté depuis dix-huit mois, non?
Oui, je pense. Et c'était bien l'objectif en revenant en Suisse: regagner du temps de jeu, m'établir comme titulaire indiscutable. Bien sûr, j'aurais aimé que ce soit le cas tout de suite, mais c'est ainsi en football. J'ai fait preuve de patience pendant six mois et c'était parti. Donc oui, je suis très content de la situation actuelle, qui va m'aider pour réaliser le prochain pas.

Qui est?
De repartir à l'étranger et de continuer ma carrière en progressant le plus vite possible, sans limites. 

L'étranger, vraiment? YB, Zurich, Servette ou Bâle ne pourraient pas te convaincre?
Non, non, ce n'est pas ce que je dis. Bien sûr que ces équipes seraient un pas en avant. Que ce soit en Suisse ou à l'étranger, j'aimerais trouver une équipe qui joue pour des trophées, qui soit ambitieuse. Mais attention, là tu me parles de l'avenir. Le présent, je l'ai bien en tête: je suis à 100% concentré sur Yverdon et c'est ce que j'ai dit à mon agent aussi. Le but, je te l'ai dit, c'est de faire un gros deuxième tour avec Yverdon, individuellement et collectivement, et ensuite de participer à l'Euro M21. Je ne veux pas faire 15 matches et partir. Le but, c'est vraiment de faire une grosse saison du début à la fin. En ce moment, je suis très content de la manière dont les choses se passent. Si je change en janvier et que je joue deux matches dans mon nouveau club, ce serait une erreur. Donc oui, j'ai le prochain pas en tête, mais aujourd'hui, j'ai les deux pieds bien à Yverdon.

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Vous allez vous maintenir, tu penses? GC et Winterthour derrière vous sont deux bonnes équipes...
On est dans une situation similaire à la saison dernière. Je crois qu'on avait 21 points à Noël. Là, on en a 17, on peut arriver à 20 samedi soir. Ce qui est sûr, c'est qu'on va devoir se battre jusqu'au bout, mais je suis convaincu qu'on va y arriver. L'effectif est de grande qualité, nous avons un bon mélange entre des joueurs expérimentés et des plus jeunes, très talentueux, qui veulent se montrer. 

Parmi ceux-là, il y a Mitchy Ntelo, qui marque peu pour l'instant. Alors oui, Kevin Carlos aussi, la saison dernière, a connu un premier tour peu prolifique avant d'exploser. Comment l'aidez-vous à garder confiance?
C'est normal d'avoir un peu de pression quand tu es venu contre une certaine somme d'argent et qu'au début ça ne fonctionne peut-être pas comme tu voudrais. Mais je le vois tous les jours à l'entraînement, il fait son travail, il bosse même très dur, je peux te le garantir. On le soutient, on l'aide, on le pousse vers l'avant quand on voit qu'il est un peu affecté. Et puis, contre GC, il a mis ce but très important, qui va lui apporter beaucoup de confiance. Je pens que ce but va lui faire du bien et qu'il va le prouver samedi contre Sion avec un nouveau but qui nous rapportera trois points cette fois!

Tu joues comme un leader. Mais te sens-tu comme tel? Tu te vois comme le chef de la défense d'Yverdon Sport?
Je dirais que je sens de plus en plus la confiance de mes coéquipiers. J'ai été capitaine à Wolverhampton, je sais ce qu'être un leader veut dire, je n'ai pas peur des responsabilités. Ici, bien sûr, il y a des gens plus établis que moi, avec bien plus d'expérience, comme notre gardien Paul Bernardoni, comme notre capitaine William Le Pogam ou Boris Cespedes. Et Anthony Sauthier aussi, bien sûr, même s'il ne joue pas autant qu'il le voudrait ces derniers temps, il reste un leader dans le vestiaire. En ce qui me concerne, je me concentre surtout sur le terrain, j'aide mes coéquipiers en communiquant. Après, si l'un d'entre eux a quelque chose à me dire, ils savent que je suis toujours ouvert pour parler et pour aider si je peux.

Justement, c'est comment dans le vestiaire? Cet effectif d'YS me fascine avec ces joueurs venus d'Amérique du Sud, d'Afrique, de Scandinavie, de Pologne...
On est une troupe sympa (rires)! La saison dernière, on avait un peu plus de Portugais et de Brésiliens et là j'ai l'impression qu'on s'est encore un peu plus internationalisés, tu as raison! On s'entend bien, on communique bien, et hier encore, tu vois, on a passé du temps tous ensemble.

Vous avez fait quoi?
On a mangé ensemble, toute l'équipe, puis on a regardé la Champions League. C'est tout simple, mais on est tous ensemble, sans pression.

En parlant de Champions League, c'était qui ton modèle quand tu étais gamin?
Sergio Ramos!

Comme lui tu es fort physiquement, c'est génétique? Tes parents sont grands?
Non, même pas. J'ai beaucoup travaillé cet aspect et je continue. 

Ces épaules carrées, là, c'est du boulot?
Oui, oui (rires). Cette saison particulièrement, j'ai essayé de prendre des kilos de muscle. Je bosse pas mal au fitness, j'y vais dès que je peux. Les semaines où on a un seul match, j'essaie d'aller deux ou trois fois au fitness en plus de l'entraînement collectif, et je travaille aussi ma vitesse en dehors des séances. C'est important, car je ne suis pas le plus rapide aujourd'hui. Et en parallèle, j'ai décidé de m'épaissir un peu, pour avoir plus de force, de mieux tenir sur mes jambes dans les duels. Je suis assez satisfait pour le moment!

Credit Suisse Super League 24/25
Équipe
J.
DB.
PT.
1
FC Lugano
FC Lugano
17
9
31
2
FC Bâle
FC Bâle
17
22
30
3
Servette FC
Servette FC
17
3
29
4
FC Lausanne-Sport
FC Lausanne-Sport
17
6
27
5
FC Zurich
FC Zurich
17
1
27
6
FC Sion
FC Sion
18
4
26
7
FC Lucerne
FC Lucerne
18
1
26
8
FC St-Gall
FC St-Gall
17
4
22
9
Young Boys
Young Boys
17
-5
20
10
Yverdon Sport FC
Yverdon Sport FC
18
-12
17
11
FC Winterthour
FC Winterthour
18
-22
16
12
Grasshopper Club Zurich
Grasshopper Club Zurich
17
-11
12
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