«C'est vrai qu'il flotte pas mal!», lâche Benoît Jeanmonod, chef de presse du Lausanne-Sport, en regardant par la grande baie vitrée de la Tuilière, jeudi peu après midi. L'interview de Noë Dussenne avec Blick vient de se terminer et, juste avant de prendre l'ascenseur, le grand défenseur belge se retourne. «Il quoi?» «Ben, il flotte!». Et tout le monde d'éclater de rire.
«Je crois que j'ai entendu cette expression une fois dans ma vie. Chez nous, on dit il drache, mais seulement quand ça tombe fort!», explique l'ancien capitaine du Standard de Liège, qui apprend de nouvelles expressions régulièrement, lui qui est arrivé de Belgique alors que le LS retrouvait la Super League voilà une année et demi. Depuis, il s'est logiquement installé comme chef de la défense du LS et a connu une excellente fin de premier tour, à l'image de l'équipe.
Alors que le Lausanne-Sport jouera deux matches amicaux à la suite samedi (11h contre Breitenrain, 15h contre Nyon) à la Tuilière, et reprendra le championnat dimanche prochain déjà contre Lucerne, le capitaine s'est confié à Blick.
Au tout début de la trêve, Stéphane Henchoz nous disait que deux choses pouvaient briser la belle dynamique du LS: le mercato, qui est jusqu'ici très calme, et la pause hivernale. En tant que capitaine, comment pouvez-vous influer sur ce deuxième point lors de cette préparation?
Tout simplement en remettant les mêmes ingrédients que l'on a mis ces trois derniers mois. Et je peux vous dire que le coach en est conscient vu la façon dont on travaille! La musculation, l'intensité qu'on met dans les entraînements... Je pense que tout est réuni. On souffre beaucoup pour le moment, je vous promets.
A ce point-là?
Oui, ces dix derniers jours ont été éprouvants, mais c'est comme ça qu'on aura les résultats. Je suis le premier, parfois, à aller voir le staff pour dire qu'aujourd'hui, c'est dur, que c'est trop dur même. Mais au fond de moi, je sais que c'est important de le faire et que c'est comme ça, justement, qu'on pourra continuer sur notre lancée. Ce qu'on a fait de bien les trois derniers mois, on doit le refaire en ce début d'année.
C'est vrai, vous allez voir le staff pour le dire que les entraînements sont trop durs? Je n'ai pas cette image de vous, je dois dire.
Si, si, parfois, quand c'est trop, je vais voir le coach et je lui demande de calmer un peu. Il m'a déjà dit qu'à mon âge je peux louper un entraînement pour aller aux soins, mais dès que j'ai mal quelque part, il me dit: «Non, ça va, tu peux continuer» (rires). Bien sûr que je suis quelqu'un qui bosse, mais c'est vrai que parfois je tire la langue et que je rouspète un peu, ça fait partie du job (sourire).
On pourrait faire cette interview quelque part en Espagne ou au Portugal, mais on est là, sous la pluie de Lausanne. Ca vous embête de ne pas être parti en camp d'entraînement?
J'aime bien les stages d'hiver, c'est sûr. Ça fait du bien, ça soude un groupe. Le club a pris la décision de ne pas partir et il faut l'accepter. Ici, à Lausanne, on a toutes les infrastructures nécessaires pour bien bosser et on a nos habitudes. Cette trêve n'était pas très longue et le coach voulait éviter de perdre du temps pour les voyages. Donc on est là, on bosse. Après, le point positif, c'est qu'on est près de nos familles. Personnellement, j'ai des enfants, donc je suis content d'être là pour cet aspect.
C'est vrai que le championnat recommence le 19 janvier, déjà. Vous avez même débuté l'entraînement le 30 décembre! C'est une première pour vous?
Non, parce qu'en Belgique, on avait des matches le 26 décembre et même parfois le 27. Donc c'est encore pire, tu n'a pas de coupure à Noël. Ici, on a eu dix vrais jours de congé, c'est correct. On est très loin d'être à plaindre.
Dans dix jours, il y a trois points en jeu contre Lucerne. Que dites-vous à l'équipe aujourd'hui?
L'équipe a grandi, elle sait où elle veut aller. On s'était fixés l'objectif du top 6, on est dedans et on sait ce qu'on doit faire pour y rester. Si tout le monde performe ensemble et tire dans la même direction, on peut battre tout le monde, il ne faut pas avoir peur de le dire. On a battu Lugano chez lui. Donc si on est à fond, à 100%, on peut le faire.
Il y a une thématique récurrente à Lausanne, parce que votre coach et votre directeur sportif en parlent régulièrement, c'est d'acquérir la mentalité alémanique. En tant que nouvel arrivé dans le championnat suisse, ça vous parle? Vous l'interprétez comment?
Je le vois comme ça: quand on monte sur le terrain, il faut se dire à chaque fois que c'est peut-être notre dernier match. Donc il faut tout donner. C'est ce que je dis régulièrement aux mecs: jouez ce match comme si c'était le dernier. Je pense qu'il ne faut pas se donner de limites et jouer chaque rencontre à 100%, en ayant conscience qu'on a un banc de qualité et que la concurrence est réelle. C'est pour ça que le coach insiste sur la discipline de travail, chaque jour, avec des courses, des duels à gagner, pas juste à disputer, et être focus à 100%. Voilà comment je le comprends.
La différence de mentalité, elle existe aussi en Belgique entre Wallons et Flamands?
Oui. Les Flamands ont une discipline vraiment très stricte. Nous, les Wallons, on est un peu plus cool, tranquilles.
Donc c'est la même chose qu'en Suisse?
Oui, je pense qu'on peut faire le parallèle. Parfois, en Wallonnie, il y a un peu plus de passe-droits, tranquille, on y va doucement... Le côté flamand, c'est plus strict, plus structuré. Et il y a le parallèle avec la langue, aussi. Oui, il y a des similitudes. Mais justement, ici à Lausanne, on est très structurés, on progresse du point de vue de la mentalité.
Vous avez été élu par quasiment tous les médias dans leur équipe-type du premier tour. Vous l'avez vu? Ca vous intéresse?
Oui et j'en suis très content. Je suis venu à Lausanne pour performer et ce type de distinctions le prouve. Il faut que je continue comme ça, surtout dans l'aspect défensif. J'ai marqué quelques buts, mais je ne pense pas que ce soit déterminant. Ce qui l'est, c'est la défense, le côté leader, les duels gagnés, ne rien lâcher. Ce qui est important, ce sont les clean-sheets, même si les penalties que j'ai marqué, il faut les mettre aussi.
Il y a une image symbolique de ce premier tour. Vous voyez de quoi je veux parler bien sûr?
Oui, le tacle contre Sion. C'est un moment clé, c'est clair, parce que si on encaisse le goal, Sion passe devant. Le coach dit souvent qu'en début de saison je ne l'aurais pas fait et que c'est grâce à lui, à la manière dont il me fait travailler, que j'ai réussi cette action. Il a un peu raison, ça vient aussi de l'entraînement, quand tu fais des 1 contre 1 ou des 2 contre 2 avec Teddy Okou en face qui va à 200 à l'heure, tu dois tout le temps être à 100% dans les duels, ne rien lâcher, ne pas lui donner une frappe. Et contre Sion, c'est vrai, il y a cette action qui semble perdue, mais il pousse le ballon un peu trop loin et j'arrive à revenir. Et c'est vrai, peut-être qu'avant je me serais arrêté. Le coach a peut-être raison pour une fois (rires).
C'est ça précisément, la différence avec les quatre premiers matches? Il y a eu une progression collective, c'est sûr, mais individuellement aussi? C'est votre sentiment?
Oui, tout le monde a haussé son niveau de jeu. On a envie de proposer du beau jeu, d'être propres, mais on a aussi envie d'être solides. Tous les joueurs sont montés d'un cran cette saison.
Concrètement, vous le vérifiez comment?
Après cinq ou six matches, on a eu une analyse vidéo, très précise, avec des datas incontestables. Elle nous montrait qu'on était en dessous de tout, presque dans tous les domaines. Et puis, on a eu la même analyse après le dixième match, après le quinzième aussi. On a vu qu'on a énormément progressé, factuellement. On était dans le vert. Et on avait les résultats sur le terrain, avec les victoires. Cela montre une chose: quand tu bosses bien, tu récupères les fruits de ton travail.
Cette équipe de Lausanne, elle peut encore progresser?
Oui, il y a encore une marge. J'aimerais bien avoir des attaquants, je parle de toute la ligne offensive, qui soient à 10 ou 15 buts par saison. Pour l'équipe et pour eux, pour le club, qu'ils puissent ensuite partir en France, en Allemagne... On voit Cameron Puertas, parti en Belgique, qui a explosé. Pourquoi ne pas nous aussi vendre un ou deux joueurs en fin de saison? Mais ce sera le cas seulement si le Lausanne-Sport a réussi une super saison sur le plan collectif. C'est comme ça que des joueurs se détachent et franchissent un palier qui profite à tout le monde.
Vous le dites vous-même: les transferts, c'est pour l'été prochain. L'idée du club, c'est de garder tout le monde cet hiver.
Oui. Et le point principal, tout le monde le sait, ça va être Vini (Alvyn Sanches). Pendant deux saisons, il était très bon, mais avec des hauts et des bas. Là, il arrive à être constant. Et s'il arrive à être constant, l'équipe grandit, tellement il est important pour nous. Je pense que le club a envie qu'il reste encore six mois, parce qu'on a besoin de lui pour atteindre nos objectifs. Après, il faut savoir ce qu'il veut, lui aussi. C'est un mec d'ici, s'il se dit qu'il peut faire une saison historique avec le Lausanne-Sport, pourquoi ne pas rester encore six mois? Il n'a que 21 ans, il a encore le temps de faire les bons choix. Et s'il arrive à mettre encore sept ou huit buts, il aura encore des clubs différents l'été prochain que cet hiver.
Et vous, qui avez quitté la Belgique pour la Suisse voilà dix-huit mois, vous vous sentez toujours bien ici?
Oui, super! J'ai tout de suite aimé la vie ici, je l'ai dit dès le début et ça continue. Franchement, je suis épanoui à Lausanne, à 100%. Je m'investis de plus en plus dans la vie locale, en dehors du foot aussi, avec mes enfants, avec ma femme. On se plaît vraiment bien ici, c'est chouette de vivre à Lausanne, c'est agréable. On a de la chance d'être bien ici, indépendamment du football.
Vous passez vos diplômes d'entraîneur, au fait, à 32 ans?
Non, pas encore. C'est vrai que mon père insiste beaucoup là-dessus, mais je ne sais pas encore si j'en ai vraiment envie. C'est un métier qui demande aussi beaucoup de sacrifices, beaucoup de temps en dehors de sa famille. Ce n'est pas toujours facile quand tu as des enfants... Quand je vois le coach, il habite ici et sa famille est à Zurich. Ce sont de grands sacrifices à faire, c'est un choix de vie. Pour le moment, je ne me pose pas la question, je suis encore pleinement joueur, je me sens en pleine forme. Je vis le moment présent.
Équipe | J. | DB. | PT. | ||
---|---|---|---|---|---|
1 | FC Lugano | 18 | 6 | 31 | |
2 | FC Bâle | 18 | 21 | 30 | |
3 | FC Lausanne-Sport | 18 | 9 | 30 | |
4 | FC Lucerne | 18 | 3 | 29 | |
5 | Servette FC | 18 | 2 | 29 | |
6 | FC Zurich | 18 | -1 | 27 | |
7 | FC Sion | 18 | 4 | 26 | |
8 | FC St-Gall | 18 | 6 | 25 | |
9 | Young Boys | 18 | -4 | 23 | |
10 | Yverdon Sport FC | 18 | -12 | 17 | |
11 | Grasshopper Club Zurich | 18 | -10 | 15 | |
12 | FC Winterthour | 18 | -24 | 13 |