«Je me vois en patriarche»
La grande interview de Noël de Christian Constantin

Christian Constantin se confie à Blick en cette fin d'année. Il parle de la douceur qu'il perçoit dans le fait de vieillir. De la période de Noël, très conviviale en Valais. Du décès de son père. Et explique pourquoi sa petite amie et son ex-compagne s'entendent bien.
Publié: 11:47 heures
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Dernière mise à jour: 12:00 heures
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CC, le penseur. A sa table de travail dans son bureau de la Porte d'Octodure à Martigny.
Photo: Alain Kunz
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Alain Kunz

Voici les confidences du président du FC Sion, en exclusivité pour Blick.

Christian Constantin, le sport d'abord! Quelle est votre analyse du premier tour du FC Sion, en tant que néo-promu en Super League?
Nous sommes un promu qui veut rester dans la classe. Malgré les trois victoires pour finir, j'estime c'est un premier tour inachevé. Nous aurions dû obtenir de meilleurs résultats avec le travail fourni. En Coupe, nous avons fait jeu égal avec Bâle, mais nous avons été éliminé. Trois jours plus tard, nous avons battu YB. Nous avons donc trouvé notre place dans cette ligue. Au printemps, nous voulons nous affirmer comme un club sérieux de Super League.

A quel point l'élimination à Bâle dans la compétition préférée des Valaisans, la Coupe, a-t-elle fait mal?
Très mal! Si nous marquons le troisième but, nous gagnons. Aux tirs au but, nous avons été mauvais. Mais les garçons ont pu quitter le terrain la tête haute.

Ce qui étonne le plus chez Sion, c'est que c'est pratiquement l'équipe de Challenge League de la saison dernière qui joue. Et cela chez le «champion du monde des transferts» Christian Constantin. Qu'est-ce que cela vous évoque?
Que l'on regarde souvent loin quand on cherche quelque chose - et que l'on se trompe souvent. Il serait bon que notre ligue se soucie davantage des joueurs du pays. D'autant plus que tout le modèle de trading et de business a complètement changé.

Dans quelle mesure?
Il y a des années, lorsque l'argent de la télévision a commencé à exploser, les salaires n'étaient pas encore aussi élevés et les grands clubs ont alors commencé à acheter énormément de joueurs. Au début, il y avait beaucoup moins de clubs qui essayaient de se financer par des transferts. Aujourd'hui, tout le monde le fait. Désormais, nous avons un marché sur lequel, à l'exception des très grands, tout le monde fait la même chose. Nous devons donc chercher des alternatives. Intensifier notre promotion des talents et la compléter par une formation individuelle et personnelle. Il faut apprendre aux joueurs à garder les pieds sur terre. Ils peuvent tout à fait croire qu'ils peuvent réussir dans le football, tant qu'ils restent sur terre. Et nous devons faire des stades des lieux de fête où l'on peut célébrer le football et passer du bon temps.

Comme par exemple dans votre nouveau stade. Où en est-on?
Nous attendons la décision du conseil communal de Sion, qui sera prise en janvier. 

Il paraît qu'il y a de l'opposition.
Nous devons faire un travail de lobbying et de persuasion, bien sûr. Car sans ces accords, il n'y a pas de stade. En ce qui concerne le financement, il y a deux variantes. Le conseil doit décider si la commune veut mettre elle-même sur pied l'académie et la fondation, ou si je veux m'en charger. Cela coûte 30 millions. Je prendrai de toute façon en charge les 400 millions restants. Le conseil peut donc décider s'il veut un cadeau de 400 ou de 430 millions.

Et s'ils ne veulent pas de ce cadeau?
Il n'y aura plus de football professionnel en Valais.

Revenons au marché des transferts. Les clubs suisses doivent donc désormais faire comme le géant orange: De la région pour la région.
Oui, absolument! Autrefois, il y avait des Brésiliens qui voulaient aller en Europe et on leur disait: «Tu connais le FC Sion? Grâce à ce club, tu as un bon accès à l'Europe». Avec Ronaldinho ou Roberto Assis comme modèles. Aujourd'hui, il n'y a plus besoin de portes d'accès. On peut aller partout. Il n'est donc plus nécessaire d'aller chercher ces champignons au Brésil, si l'on peut trouver cette variété chez soi.

Seulement, peu de clubs de Super League le font.
Malheureusement. Même si on ne trouve pratiquement plus de Cunha, tout le monde espère avoir le sien. Alors, travaillons au niveau local. Avec mon équipe de Challenge League, comme vous dites, par exemple, qui a battu YB à deux reprises.

Mais vous avez quand même trouvé un joueur de haut niveau avec le Russe Anton Miranchuk. Mais il n'a plus joué ces derniers temps. Que s'est-il passé?
Il a joué dès son arrivée, même s'il n'était pas encore à 100%. Ensuite, il a attrapé une blessure aux muscles abdominaux. Nous n'avons pas voulu prendre de risque et l'avons retiré du jeu. Il se remet, on prend soin de lui, et il devrait être en forme en janvier.

Il a tout de même montré de belles choses.
C'est un grand joueur, très talentueux. Et c'est une super-personnalité.

Mais il faut mettre de côté les préoccupations éthiques liées à l'engagement d'un joueur issu d'un pays en guerre.
Ni toi ni moi ne pouvons mettre fin à la guerre en Ukraine. Tout comme la plupart des Russes et des Ukrainiens. On ne peut tout de même pas tirer des conclusions sur tous les hommes à partir des responsables de la guerre. Tous les Allemands n'étaient pas non plus comme Hitler. En Suisse, nous sommes nés dans la neutralité et ne devrions donc pas juger les gens de cette manière. Moi aussi, je veux que cette guerre cesse, que ce meurtre insensé de la jeunesse ukrainienne et russe stoppe.

Allez-vous frapper une nouvelle fois sur le marché des transferts pendant la pause?
Je vais peut-être aller chercher un ou deux joueurs. Mais avec l'arrière-pensée qu'ils ne seront vraiment opérationnels que pour la saison prochaine.

Au premier tour, il y a eu une série de neuf matches sans victoire - et Christian Constantin est resté calme. Etes-vous vraiment devenu plus doux avec l'âge, comme l'a confirmé votre fils Barthélémy?
Il a peut-être raison. Je ne reste pas calme quand je vois qu'on ne travaille pas. Mais quand tout le monde travaille, il n'y a pas de raison d'intervenir. Je sais, oui, qu'on ne peut pas toujours gagner. Didier Tholot travaille sans cesse. Et il ne se met jamais en avant, il reste toujours le même. Il sera bientôt le plus ancien coach, et je devrai alors envisager de le remplacer...

Pas de plaisanteries stupides. Sinon, ça va finir par arriver...
Non. Nous avons de toute façon un plan, Didier et moi.

Et c'est quoi?
Il fait encore cette saison et la suivante, tant que son contrat court encore. Ensuite, il pourra faire autre chose dans le club s'il le souhaite. Peut-être prendre en charge les M21 comme Michel Decastel à l'époque. Cela s'est très bien passé et il a fait sortir des joueurs comme Edimilson Fernandes, Vincent Sierro, Chadrac Akolo ou Grégory Karlen. Mais le cycle convenu de trois ans est intouchable de mon côté.

Vous êtes un grand fan de nos sélections nationales. Qu'est-ce qui ne va pas? La Nati a été reléguée sans victoire du groupe A de la Ligue des Nations. Et tant les M21 que les M19 ont manqué la qualification pour l'Euro dans des groupes faibles. Ce sont des signaux d'alarme.
L'Association suisse de football est très malade. Elle s'est écartée de la voie du professionnalisme et s'est amateurisée au cours des dernières années. Tout le travail accompli pour marquer un tournant en 1994 avec la première qualification pour un tour final depuis 1966 a été détruit, car on s'est finalement reposé sur ses lauriers. La qualité du travail avec les jeunes a baissé, mais les dépenses ont crevé le plafond. L'ASF est ainsi devenue déficitaire et nous serons bientôt derrière le Monténégro au classement FIFA...

Que faire?
Le nouveau président doit avoir une idée et une vision claires d'un programme pour le football suisse. Au niveau des talents, au niveau des formateurs, au niveau économique. Il n'est pas possible, par exemple, que la Coupe de Suisse n'ait toujours pas de sponsor principal. Et puis, il faut des bases économiques solides dans toutes les régions pour éviter que davantage de clubs ne passent entre des mains étrangères. C'est un désastre de dépendre de gens qui sont à 5000 ou 6000 kilomètres. Et s'ils disent: ok, c'était sympathique, mais c'est tout. Alors tout s'écroule comme un château de cartes. Pas étonnant qu'une seule ligue fonctionne vraiment : la Bundesliga. A cause de la règle des 50+1. C'est pourquoi chaque club est enraciné dans sa région. En France et en Italie, les droits TV sont partis pour la première fois depuis des années à un prix beaucoup plus bas. Ceux de la Bundesliga sont restés au même niveau élevé.

La ligue propose Peter Knäbel comme président. Un bon candidat ?
Dernièrement, Peter Gilliéron et Dominique Blanc, deux présidents, issus du monde amateur, n'ont pas respecté le tournus convenu. Cela s'est ressenti au sein de la Nati et des sélections nationales. Tout s'est dégradé. Il faut donc un vrai professionnel. Peter en est un. Il peut insuffler une nouvelle dynamique au football suisse.

Comment voyez-vous la situation en équipe nationale A?
J'aime bien Murat Yakin. Sinon, je ne l'aurais pas engagé. Mais il faut en faire plus dans tous les domaines. De nouvelles idées, des directives, des ambitions, une image. Il s'agit maintenant de remplacer la génération des champions du monde des moins de 17 ans, sur laquelle la Nati a vécu pendant plus d'une décennie. Manquer la phase finale de la Coupe du monde serait catastrophique.

Que représente Noël pour vous?
Un événement familial! C'est maintenant la deuxième fois que mon père n'est plus là. On sent alors le temps qui passe, car on voit quelles places à la table de Noël resteront vides à jamais. En revanche, d'autres seront occupées. Noël est donc toujours un mélange de tristesse et d'espoir.

Ces jours ont-ils aussi pour vous quelque chose de contemplatif, où l'on a plus de temps pour soi?
En Valais, ce sont plutôt des moments où l'on rencontre des gens. On profite de prendre un verre avec les gens qui viennent en montagne à cette période de l'année. Je ne passe pas ces journées seul.

Comment se passe votre relation avec Emma Collombin?
Tout va bien! Nous sommes ensemble depuis dix ans.

Mais vous vous entendez aussi très bien avec votre femme Carole, dont vous êtes séparé depuis des années.
Absolument. Pendant les fêtes, je deviens un peu patriarche et je mets tout le monde à table. Carole, Emma, Barthélémy, mes filles Charline et Armelle - et tout le monde s'amuse.

Mais vous n'allez pas vous remarier?
Non, nous n'en avons jamais parlé.

Êtes-vous au moins divorcé de Carole?
Non.

Ok, alors oublions cette question du mariage .. d'autant plus que Roland, le père d'Emma, s'est opposé au début à la relation de sa fille avec un homme beaucoup plus âgé. A-t-il abandonné cette opposition?
Il a d'autres priorité depuis. Il doit se battre contre un cancer. C'est beaucoup plus important.

Dirige-t-il toujours son bistrot La Streif à Martigny?
Oui, il va plutôt bien. Mais quand on doit se battre contre une telle maladie, cela dépasse les relations humaines. Et je n'aime pas le cancer. Parce qu'on ne sait jamais comment cela va se terminer. Dans le cas de Heinz Lindner, par exemple, je suis infiniment heureux que tout se soit bien passé.

Allez-vous faire revivre le gala et votre mythique choucroute?
Je ne pense pas. C'était le plus grand dîner-spectacle du monde. A Las Vegas, le maximum est de 5500 invités, nous étions à 8000... Mais les règles de plus en plus tâtillonnes nous ont rendu la vie difficile. Donc si je refais quelque chose dans ce sens, je veux que ce soit frais. Peut-être dans le nouveau stade.

Mais son ouverture est encore loin, dans le meilleur des cas en 2029.
Peut-être que je mettrai quelque chose sur pied avant. Mais alors, il faut que ce soit vraiment grand! Par exemple Andrea Bocelli avec Paul McCartney. Ou Andrea Bocelli avec Céline Dion. Cette dimension-là. Mais au plus tôt en 2026.

Credit Suisse Super League 24/25
Équipe
J.
DB.
PT.
1
FC Lugano
FC Lugano
18
6
31
2
FC Bâle
FC Bâle
18
21
30
3
FC Lausanne-Sport
FC Lausanne-Sport
18
9
30
4
FC Lucerne
FC Lucerne
18
3
29
5
Servette FC
Servette FC
18
2
29
6
FC Zurich
FC Zurich
18
-1
27
7
FC Sion
FC Sion
18
4
26
8
FC St-Gall
FC St-Gall
18
6
25
9
Young Boys
Young Boys
18
-4
23
10
Yverdon Sport FC
Yverdon Sport FC
18
-12
17
11
Grasshopper Club Zurich
Grasshopper Club Zurich
18
-10
15
12
FC Winterthour
FC Winterthour
18
-24
13
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