Le spécialiste du gazon l'assure
«La pelouse n'est pas belle, mais elle est jouable»

Pierre-Yves Bovigny, spécialiste de l'ASF, détaille l'état de la pelouse du Stade de Genève à quelques heures du coup d'envoi entre la Suisse et l'Espagne dimanche (20h45). Et si la situation n'est pas optimale, le gazon est jouable, assure-t-il.
Publié: 07.09.2024 à 18:04 heures
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Dernière mise à jour: 17.09.2024 à 14:47 heures
Pierre-Yves Bovigny l'assure: la pelouse du Stade de Genève sera praticable dimanche soir.
Photo: TOTO MARTI
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Tim GuilleminResponsable du pôle Sport

Pierre-Yves Bovigny, naitre d'enseignement à l'HEPIA et expert auprès de l'ASF, s'est exprimé à vingt-quatre heures de Suisse-Espagne, alors que le champignon sévissant dans toute l'Europe a également fait halte à Genève. L'une des mesures envisagées pour préserver le gazon au maximum était d'empêcher les deux équipes de s'entraîner à la Praille ce samedi, mais cela n'a finalement pas été jugé nécessaire. La formation de Murat Yakin et celle de Luis de la Fuente ont pu effectuer leur séance tout à fait normalement, mais il n'empêche que la situation du gazon n'est pas la meilleure possible. Le spectacle ne devrait toutefois pas être altéré, estime Pierre-Yves Bovigny.

Dans quel état se trouve la pelouse du Stade de Genève à un peu plus de vingt-quatre heures du coup d'envoi?
Elle n'est pas optimale. Elle n'est pas bonne. Le terrain a été attaqué par des champignons, comme dans plusieurs stades en Suisse et en Europe, que ce soit en Allemagne, en France, en Italie...

Que peut-on faire pour améliorer la situation?
La première action, c'est de combattre le champignon, le bloquer. La deuxième, c'est de régénérer le terrain, c'est à dire essayer d'avoir du beau gazon en semant de nouveau. Pour l'équipe de Suisse, il y a trois aspects importants.

Lesquels?
Tout d'abord, l'aspect esthétique, ce que l'on voit. Ensuite, l'aspect mécanique, à quel point la pelouse est résistante pour les joueurs. Et puis l'aspect biomécanique, à savoir l'interaction entre les joueurs et le terrain. C'est bien sûr très important que le terrain ne soit pas dangereux pour les joueurs, qu'il n'occasionne pas de blessure ou de fatigue supplémentaires. On a travaillé sur ces trois aspects.

En ce qui concerne l'aspect esthétique, en peignant la pelouse en vert...
Oui. C'est la dernière chose qui a été faite, mais elle était nécessaire pour l'aspect esthétique. Ca surprend souvent les gens, mais c'est une pratique très courante. Il y a beaucoup de pays où les pelouses sont peintes avant un match, comme par exemple en Italie. Il y a plusieurs techniques, on a choisi une peinture qui met un peu de couleur sur le gazon, et surtout sur la terre, parce qu'il y a des endroits où il n'y a pas de gazon.

Avez-vous déjà eu un feedback des joueurs et du staff?
Pas encore de la Nati, mais des joueurs de Servette, oui. On leur a demandé si la pelouse était dangereuse et la réponse a été non. La pelouse n'est pas belle de près, mais elle est parfaitement jouable et utilisable. Le ballon roule correctement, il rebondit bien.

Est-ce possible de bien jouer au ballon?
Oui, on l'a vu il y a dix jours entre Chelsea et Servette, dans les mêmes conditions. La pelouse ne s'est pas améliorée depuis et le jeu s'est très bien déroulé malgré l'aspect esthétique.

Pourquoi la situation ne s'est-elle pas améliorée en dix jours? Il y a eu du temps, non? Surtout qu'il n'y a pas eu de match depuis...
Il y a des questions agronomiques, on rentre dans des choses très précises. Des algues bleues, des cyanobactéries, se sont développées sur la pelouse. Ces algues empêchent les graines de nouveaux gazons de bien pousser. Le problème, c'est que pour enlever ces algues, il faut griffer la pelouse. Et si on griffe la pelouse, on va arracher le nouveau gazon. Ces travaux-là, très lourds, seront entrepris après le match de la Suisse, parce qu'il y a trois semaines sans match de Servette ici. Là, c'était très compliqué d'enlever les herbes mortes sans arracher le nouveau gazon. Donc les parties qui sont mortes à cause des maladies, il fallait les éliminer. Mais comme en même temps la pelouse a été semée pour la régénérer, on aurait tout arraché.

L'équipe de Suisse s'est entraînée normalement sur le gazon de la Praille.
Photo: keystone-sda.ch

Pourquoi ce champignon est-il aussi destructeur?
L'été est une saison très compliquée, puisqu'il fait chaud, on doit arroser. L'humidité et la chaleur sont propices à la prolifération des champignons. Mais le plus gros problème, c'est que les pelouses professionnelles n'ont pas de terre. Pas un gramme. Il n'y a que du sable. Et dans du sable, il n'y a pas de vie microbienne. Cela veut dire que quand un champignon arrive, il n'a aucune concurrence et peut se développer très très vite. Et des fois, en deux jours, une pelouse peut être complètement abimée par des maladies. Dans un terrain où il y a de la terre, il y a des milliards de micro-organismes qui vont entrer en concurrence, notamment avec les champignons, ce qui n'est pas le cas sur les pelouses professionnelles.

La pluie annoncée d'ici à demain soir pourrait-elle avoir une influence négative sur la qualité du gazon?
Oui. Le problème de la pluie, c'est qu'elle risque de ramollir le sol, donc diminuer la résistance du gazon à l'ancrage. Donc oui, on peut s'attendre à avoir des arrachages de gazon un peu plus importants s'il y a de la pluie.

La possibilité de changer de stade pour ce match a-t-elle été évoquée?
Oui, cela été évoqué. Mais il y avait des problèmes de disponibilité de stade et c'était compliqué de dire à 30'000 personnes que le match aurait lieu ailleurs... On a discuté de toutes les possibilités, y compris de changer de pelouse, mais cela aurait été un risque aussi. Toute l'Europe a ce problème de champignon, il y a peu de pelouses disponibles. Et en faire venir une de l'étranger, ce n'est pas aussi simple que de le dire.

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