Dans un entretien téléphonique avec Blick, la présidente de la fédération norvégienne, Lise Klaveness, confirme ce qui n’est plus un secret depuis la Coupe du monde au Qatar: «Nous ne voterons pas pour Gianni Infantino.» Il est certes clair que ce dernier sera réélu, mais elle ne le soutiendra pas.
«Nous attendons plus de leadership, une meilleure collaboration avec les parties prenantes et de la transparence.» Il y a des valeurs universelles qui sont inscrites dans les statuts de la FIFA. Elles font partie de l’ADN des dirigeants de haut niveau. «Le président a manqué plusieurs occasions de faire preuve de leadership.»
Jeune et intrépide, elle a du succès. Cette mère de trois enfants est l’antithèse d’un monde dominé par les hommes. À bientôt 42 ans, Lise Klaveness a été footballeuse de haut niveau, a travaillé comme avocate, juge et conseillère bancaire. Dans son pays, elle a été la première femme à commenter un match de football masculin à la télévision, la première directrice technique de la fédération et en est la première présidente depuis une année. Début avril, elle aspire à une place au comité exécutif de l’UEFA – mais pas celle décernée par quota aux femmes, bien que cette dernière lui permettrait d’atteindre son but plus facilement.
Un modèle pour beaucoup
Il y a un an, Lise Klaveness a fait sensation lors du congrès de la FIFA à Doha en critiquant sévèrement aussi bien la FIFA pour l’attribution de la Coupe du monde que le Qatar, pays hôte, pour son non-respect des droits de l’homme. «Nous avons longuement discuté avec nos membres pour savoir si nous voulions boycotter la Coupe du monde, mais nous avons décidé de ne pas le faire. En revanche, la présidente devait s’exprimer de manière critique lors du congrès, ce que j’ai fait», a expliqué Lise Klaveness à Blick. «C’était un travail difficile, mais je le referais.»
Son allocution a provoqué un tollé. Le Qatar, offensé, a réagi. Mais, dans le monde entier, la Norvégienne a été applaudie pour son courage et ses paroles engagées et claires. Une personne homosexuelle d’Afrique, une journaliste sportive d’Amérique du Sud ou des ouvriers népalais se seraient sentis entendus dans ses paroles. «Il y a eu beaucoup de discussions et de rencontres inspirantes», raconte-t-elle. En se rendant au Qatar, Lise Klaveness, mariée à l’ancienne joueuse de l’équipe nationale Ingrid Fosse Saethre, a également pris un risque. L’homosexualité est interdite au Qatar.
Lutte contre la discrimination
L’intervention de la fédération norvégienne à Kigali vise aussi la Coupe du monde au Qatar. Elle demande que la FIFA remplisse ses obligations et tienne sa promesse d’indemniser les travailleurs qui ont été victimes des chantiers de la Coupe du monde au Qatar. La motion vise par ailleurs à éviter que des catastrophes humaines de ce genre ne se reproduisent lors de l’attribution de futurs tournois.
Pour Lise Klaveness, il s’agit de mettre en œuvre les valeurs inscrites dans les statuts, dans lesquels la discrimination fondée sur le sexe, l’origine ou l’orientation sexuelle n’a pas sa place. «Il est difficile d’attribuer de grands événements à des pays où l’homosexualité, par exemple, est interdite, car de nombreux joueurs et supporters le sont.» Selon elle, le fait que la Coupe du monde ait été un succès sur le plan sportif et qu’elle se soit finalement déroulée dans un environnement sûr ne change rien au fait que son attribution ait été inacceptable.
La présidente de la fédération norvégienne ne nie pas que des progrès ont été réalisés sous la direction de Gianni Infantino, comme la nouvelle procédure d’attribution, une meilleure transparence financière ou l’introduction d’une politique des droits de l’homme. Mais c’était le mandat clair donné à la nouvelle direction: «Après les arrestations et les suspensions, c’était absolument nécessaire, car la FIFA était accusée, sous pression.» L’organisation sportive internationale devrait continuer à porter son attention sur ces points à l’avenir. «Ce n’est pas sa mission de créer toujours plus de compétitions. En faisant cela, elle met en danger les associations continentales.»
Promotrice des femmes dans le football
Outre le calendrier des matches internationaux, que Lise Klaveness qualifie de «très vulnérable», l’internationale aux 73 sélections a également à cœur le développement du football féminin. «Pour les femmes aussi, ce sport est le plus grand du monde.» Mais elle estime que la communauté mondiale du football est encore loin d’une égalité de traitement. «Il faut que les femmes aient la même facilité d’accès au jeu que les hommes. Nous devons consacrer autant de temps au football féminin qu’au football masculin.»
À peine une poignée des 211 associations membres de la FIFA est présidée par des femmes. Lise Klaveness met tout le monde devant ses responsabilités: la FIFA, les associations nationales, les clubs, les sponsors, mais aussi les journalistes, qui n’écrivent qu’une fraction de leurs articles sur les femmes. Selon elle, ils sont tous confrontés au même dilemme, parce que les hommes rapportent actuellement beaucoup d’argent, alors que les femmes coûtent. «Mais si on continue ce que l’on a toujours fait, rien ne changera et cette tendance ne fera que se renforcer.»