L'amateur devenu footballeur international
«J'ai cru que c'était un canular»

Joueur amateur, Frédéric Gigon a représenté le pays de sa grand-mère. Une carrière internationale aussi savoureuse qu'inattendue avec la nation que la Suisse affronte ce jeudi (18h) en préparation pour l'Euro.
Publié: 03.06.2021 à 13:39 heures
|
Dernière mise à jour: 03.06.2021 à 14:50 heures
1/5
Aujourd'hui, Frédéric Gigon a conservé un maillot du Liechtenstein.
Photo: Gabrielle Savoy
10 - Ugo Curty - Journaliste Blick.jpeg
Ugo CurtyJournaliste Blick

Porter le maillot de l’équipe nationale du Liechtenstein ne fait pas forcément partie du cursus habituel d’un étudiant en Erasmus à Berlin. C’est pourtant ce qui est arrivé à Frédéric Gigon il y a une vingtaine d’années.

Ce Vaudois avait obtenu le passeport de la Principauté, grâce à sa grand-mère, pour éviter de payer des frais administratifs en Allemagne. Son cousin à Vaduz a sauté sur l’occasion pour le recommander auprès du sélectionneur de ce pays de 35’000 habitants.

«J’ai reçu un téléphone du coach, Ralf Loose, sur le fixe de ma colocation berlinoise, se souvient «Fredo» avec un amusement intact. Au début, j’ai cru que c’était des potes qui me faisaient un canular depuis Lausanne. Au bout d’un moment, j’ai compris que le mec parlait trop bien allemand pour que ce soit eux.»

Joueur de quartier

Frédéric Gigon jouait alors dans un club amateur de quartier, le SV Empor Berlin. Un régime exprès («fini les Currywursts») et une remise en forme plus tard, il débarque en train à Vaduz. «Le voyage a duré 12 heures. Le sélectionneur est venu me chercher à la gare pour m’amener au terrain d’entraînement. C’était surréaliste.»

L'enseignant-joueur a gardé quelques reliques de sa carrière internationale.
Photo: Gabrielle Savoy

Entre 1999 et 2003, le Romand va porter à 23 reprises le maillot bleu à la couronne. Un parcours inespéré pour ce joueur amateur qui est resté cantonné aux ligues mineures en Suisse, avec des passages à Stade-Lausanne-Ouchy, Echallens et Baulmes.

Des élèves taquins

Le Lausannois, aujourd’hui âgé de 48 ans, menait une double vie puisqu’il est aussi enseignant au civil. «Cela faisait bien rire mes élèves. Ils ressortaient des photos de moi où j’étais en mauvaise posture en match. Certains jouaient avec le Liechtenstein à la Playstation 1 sur FIFA 2001 pour me prendre dans leur équipe. Ils essayaient de marquer des buts contre leur camp avec moi...»

Les anecdotes savoureuses s’enchaînent. «J’ai eu la chance de sortir des grands matches contre les bonnes équipes.» Après un match à Freiburg contre la grande Mannschaft, il entre dans le tram avec ses affaires de football. «Toute la rame s’est mise à chanter ‹Gigon, Gigon Fussballgott!›. Le lendemain à 8 heures, j'étais au boulot devant ma classe.»

Une génération dorée

Le Liechtenstein avait fait bonne figure sur la scène internationale au début des années 2000 avec des défaites honorables (2-0 contre l’Espagne et l’Angleterre) et des exploits (des matches nuls contre l’Irlande du Nord ou la Hongrie). La rencontre face aux sujets de Sa Majesté lui rappelle un moment très particulier. «Comme l'hymne du Liechtenstein partage la même mélodie que le 'God Save The Queen', le speaker a dit aux fans anglais de ne pas chanter. Mais bon... Le ‹Oben am Jungen Rhein› c'est quand même pas la même chose. Les supporters anglais hurlaient tellement fort que je n'arrivais pas à chanter.»

Cette équipe du début des années 2000 regorgeait de joueurs d'un bon niveau «Nous avions une génération dorée avec Martin Stocklasa, qui est aujourd’hui sélectionneur, Mario Frick, qui a mené Vaduz en Super League, et le gardien de Grasshopper Peter Jehle qui est devenu le président de la Fédération. Bon, il y avait aussi un blaireau romand là au milieu.»

La sélection de la Principauté connaît des heures plus difficiles. Le pays est classé 186e au classement FIFA, derrière des nations comme le Népal ou l’île des Antilles Montserrat. Le petit Poucet servira ce jeudi de dernier galop d’essai pour l’équipe de Suisse (18h à Saint-Gall) avant son départ pour l’Euro. Dans son salon, Frédéric Gigon va devoir choisir son camp.

Vous avez trouvé une erreur? Signalez-la