Marco Schällibaum n'a pas été surpris lundi matin, lorsqu'il a appris qu'il était prié, terme choisi, de vider son casier. L'entraîneur d'Yverdon Sport est tout sauf naïf et il avait confié plusieurs fois, en privé, qu'il sentait que ses jours à la tête de la première équipe étaient comptés. «La question, c'est quand...», avait-il lâché à une personne de confiance voilà quelques jours. Le Mister connaît assez le «business», terme là aussi choisi, pour avoir senti qu'il avait perdu non pas son groupe... mais ses dirigeants.
Ceux-ci n'ont pas été conquis, c'est le moins que l'on puisse dire, par le mode de management de leur désormais ex-entraîneur. Ils ne pouvaient pas lui reprocher ses résultats, et ils ont eu l'élégance de le souligner dans le communiqué de départ, mais ils n'étaient pas en phase avec ses méthodes d'entraînement et, surtout, ses choix de joueurs. Ce n'est ainsi pas du tout un hasard, ni une folle coïncidence, qu'il ait été prié de faire ses valises deux jours après un match où il avait décidé d'aligner seulement trois joueurs recrutés par les Américains cet été.
Marco Schällibaum a vécu la même chose à Bellinzone
Le plus dur pour Marco Schällibaum? Il avait déjà été évincé pour les mêmes raisons à Bellinzone où Pablo Bentancur, le très peu diplomate président, tolère la composition d'équipe de ses entraîneurs uniquement lorsqu'elle est la même que celle que lui aurait faite...
Avec cette décision extrêmement impopulaire, celle de se séparer de Marco Schällibaum alors que sa cote est au plus haut dans l'opinion publique, Jamie Welch et Jeffrey Saunders, qui n'a pas souhaité s'exprimer pour le moment, prennent un gros risque. Plusieurs membres des clubs de soutien sont furieux et l'incompréhension règne autour du club yverdonnois, de la part des sponsors comme des suiveurs occasionnels, ce public qu'il faut reconquérir et qui revient gentiment au stade après dix ans d'exil.
Brian Beyer, héros du stade en mai, réserviste en octobre
Après avoir déjà évincé plusieurs joueurs aimés des fans cet été, voilà Marco Schällibaum qui s'en va, tandis que Brian Beyer, le héros du stade en mai, joue désormais avec la réserve. En clair, il reste quatre hommes auxquels le public peut s'identifier: Anthony Sauthier, Kevin Martin, William Le Pogam et Nehemie Lusuena, le gamin de la ville.
Cela ne veut pas dire qu'Yverdon Sport ne va pas faire de bons résultats avec son nouveau staff emmené par Alessandro Mangiarratti et dans lequel le directeur sportif Filippo Giovagnoli sera sans doute amené à jouer un rôle plus proche du terrain, mais cela veut dire ques les nouveaux propriétaires d'YS ont épuisé une grande partie de leur capital sympathie après quelques semaines et se sont, dès lors, mis une grosse pression.
Le business avant tout
Jeffrey Saunders, qui parlait le jour de son intronisation en tant que président, de «communauté», de «valeurs» et de «respect du travail effectué», a démontré par les actes, ce lundi, qu'il plaçait le business avant. Ce n'est peut-être pas faux, mais c'est sévère pour Marco Schällibaum et, surtout, cela condamne le président à réussir.
Si YS flambe, tant mieux, il aura eu raison et, le monde du football est ainsi fait, tout le monde oubliera ce lundi d'octobre. Si YS coule au classement, le président aura perdu son pari, ses fameuses valeurs, la communauté, et l'aspect sportif. Les propriétaires parlent de «nouvelle philosophie», mais pour l'heure, leur décision fait un seul gagnant: Marco Schällibaum.
Celui-ci s'en va en ce début de semaine la tête haute, avec un bilan sportif impeccable tant en Challenge League qu'en Super League et avec la réputation impeccable de celui qui est resté fidèle à ses idées jusqu'au bout. Il se trouvait de toute façon dans une impasse: la seule manière pour lui de rester aurait été de renier ses principes au moment d'effectuer sa composition d'équipe. Il est parti avant de se mettre en porte à faux et, quelque part, Jeffrey Saunders lui a rendu service en lui montrant la sortie.