L'espoir du cyclisme suisse
Noemi Rüegg pédale pour le salaire minimum

À 21 ans, Noemi Rüegg vient d'une famille folle de vélo. En tant que cycliste professionnelle, elle gagne 3400 francs par mois. «C'est mon plus grand rêve.»
Publié: 19.06.2022 à 20:55 heures
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Bienvenue à la maison! Noemi Rüegg dans sa chambre. Elle habite à Oberweningen, dans l'Unterland zurichois.
Photo: Sven Thomann
Mathias Germann

Le cyclisme féminin est en plein essor. Par rapport aux dernières années, il y a un engouement certain: des courses, des sponsors, des retransmissions télévisées et davantage de coureuses. Le Tour de Suisse suit également le mouvement: cette année, le Tour de Suisse Women compte quatre étapes. Et l’année prochaine, la course sera promue dans la catégorie supérieure, le World Tour.

Malgré cela, le cyclisme féminin est encore à l’état embryonnaire par rapport à la discipline chez les hommes. Noemi Rüegg en est le meilleur exemple. Cette femme de 21 ans originaire d’Oberweningen (ZH) est la jeune cycliste la plus talentueuse de Suisse. Elle a récemment signé un contrat avec la puissante équipe Jumbo-Visma des Pays-Bas. Cela signifie-t-il que la Zurichoise vit de sa passion? Elle est loin de faire fortune. «Je perçois le salaire minimum prescrit par l’UCI», dit-elle. C’est-à-dire 27’000 euros (27,500 francs environ, ndlr). «C'est difficile d’en vivre en Suisse», poursuit-elle. Toujours est-il que comme Noemi Rüegg est encore soutenue par l’Aide sportive, elle arrive à peu près au salaire minimum d’un homme (40’000 euros). Cela représente en fin de compte 3400 francs par mois.

Compte tenu des grandes privations auxquelles sont confrontés les cyclistes professionnels, ce n’est pas beaucoup. Noemi Rüegg est loin de chez elle environ 200 jours par an. Rencontrer des amis? Manger ce qu’elle a envie de manger? Une fête d’anniversaire en famille? Pour Noemi Rüegg, tous ces événements restent assez rares. En revanche, elle s’entraîne pendant des heures. Elle est constamment en déplacement et subit la pression de la performance sportive.

«C’est mon grand rêve»

Pas question de se plaindre pour la jeune cycliste. «Quand on m’a annoncé que j’allais décrocher un contrat chez Jumbo-Visma, j’avais les larmes aux yeux. C’est mon grand rêve», sourit-elle. Et l’aspect financier? «Je n’ai pratiquement pas de dépenses pour les voyages et le matériel. L’équipe prend tout en charge. Et comme j’habite encore chez mon père, cela se passe bien», explique-t-elle.

Qui sait: peut-être gagnera-t-elle bientôt davantage: «Je suis convaincue que je me lance dans le cyclisme féminin au bon moment.» Le potentiel de développement est certes encore important, même si les premières pierres ont été posées il y a longtemps. «Mais nous sommes encore loin de l’égalité», avance-t-elle.

Usain Bolt comme modèle

Noemi Rüegg se sent bien dans sa nouvelle équipe. «Je suis un peu surprise, car je pensais que tout serait beaucoup plus strict, apprécie-t-elle. Mais c’est très familial et je parle même déjà un peu le néerlandais.» Au Tour de Suisse, Noemi Rüegg espère monter sur le podium d’une étape. Ou une place dans le top 20 au classement général.

Comment la Zurichoise est-elle venue au cyclisme? Noemi Rüegg vient d’une famille férue de cyclisme. Son père, Peter, était entraîneur dans le club local, le VC Steinmaur. Ses frères aussi aiment le vélo, Timon, 26 ans, est un cycliste professionnel et Silas, 24 ans, un excellent freestyler. Noemi a toutefois eu des difficultés à démarrer. «Quand j’étais enfant, mon père dirigeait un entraînement au club. J’y allais pour lui, mais comme j’étais la seule fille, ça me gonflait», se souvient-elle. Elle s’est ensuite tournée vers l’athlétisme («Mon idole était Usain Bolt»). Mais c’est vers 13 ans, à force d’aller à l’école à vélo, qu’elle a de plus en plus pris goût à ce sport. Le cyclisme est donc une sorte de coup de foudre? «Oui, on peut dire ça», dit-elle en souriant.

«Je me fais aussi engueuler»

Aujourd’hui, elle n’est pas encore une coureuse complète. Elle a encore du mal dans les longues montées et elle a aussi des déficits dans le contre-la-montre. Mais c’est normal pour son âge. Ce poids plume de 54 kilos est d’autant plus fort dans les courses avec des montées courtes et difficiles, comme Marc Hirschi, 23 ans, chez les hommes. Noemi Rüegg doit alors parfois jouer des coudes même si l’harmonie entre les gens est très importante pour elle.

Cela se reflète également dans son parcours. Adolescente, la jeune femme a fait un apprentissage d’assistante socio-éducative et s’est surtout occupée de personnes handicapées. «Quand je peux faire plaisir à quelqu’un, cela me fait également plaisir. D’un côté, l’apprentissage était contraignant, mais d’un autre côté, il m’a beaucoup apporté. Je pourrais très bien m’imaginer travailler à nouveau avec des personnes handicapées après ma carrière de cycliste.»

Pour l'instant, Noemi Rüegg se concentre d’abord sur le Tour de Suisse, puis éventuellement sur le Tour de France. «Lors des courses importantes, j’enfile généralement de nouvelles chaussettes blanches.» C’est son petit rituel avant le départ. Si sa carrière se poursuit à un rythme aussi effréné, elle aura sans doute besoin de nombreuses paires de chaussettes neuves à l’avenir.

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