L'influence des hormones
«Les jeunes générations ont plus de risques d'avoir un cancer du sein»

Si on sait que le cancer du sein touche de nombreuses femmes et qu'il existe désormais des traitements de plus en plus efficaces et ciblés pour guérir, difficile de comprendre comment la maladie se manifeste et se propage. Décryptage avec une scientifique.
Publié: 18.10.2022 à 12:04 heures
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Dernière mise à jour: 20.10.2022 à 18:24 heures
Les recherches de Cathrin Brisken portent sur les mécanismes de contrôle hormonal dans le développement du cancer du sein.
Photo: Shutterstock/DR
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Valentina San MartinJournaliste Blick

Le cancer, ça implique quoi? Pourquoi est-ce qu’on l’attrape, d’ailleurs? Y a-t-il des éléments qui favorisent la propagation de la maladie et peut-on limiter les risques? Voici un panel de questions tout à fait légitimes que l'on peut se poser pour mieux comprendre la maladie. C'est un paradoxe: même si le cancer du sein est largement discuté dans la sphère publique, peu de gens savent de quoi il en retourne vraiment.

Mission octobre rose de Blick

À l'occasion de la campagne de sensibilisation du cancer du sein qui a lieu chaque année durant le mois d'octobre, Blick a prévu toute une série d'articles sur le sujet.
Voici les épisodes à lire au plus vite!

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Le cancer du sein et les hormones

Pour commencer, osons la question «bête»: c’est quoi, le cancer du sein? Il s’agit d’une tumeur maligne de la glande mammaire. À noter que les cellules cancéreuses peuvent parfois progresser hors du sein, créant ainsi des métastases. Mais pour un traitement optimal, il convient de savoir de quel type de cancer on est atteint. Car oui, il existe différents types, voire des sous-types de crabes.

Parmi eux, on retrouve le HER2-positif qui représente entre 15% et 30% des cancers. Cette tumeur survient lorsque les cellules cancéreuses présentent une quantité élevée de protéines appelées HER2. Dans ce cas, on privilégie un traitement ciblé. Il y a également le cancer du sein triple négatif, qui touche 15% des femmes atteintes de la maladie. Cette variante se traite notamment avec la chimiothérapie.

Mais la version la plus courante reste la tumeur hormonodépendante, ou hormonosensible, qui représente 70% des cancers. Nous avons sollicité l'éclairage de Cathrin Brisken, chercheuse à l’École polytechnique fédérale de Lausanne (EPFL). «En fait, les seins disposent de récepteurs aux hormones dites féminines appelées œstrogènes (ER) et progestérone (PR). Si ces récepteurs sont en hyperactivation, il y a un risque de cancer. On appellera donc ce genre de tumeur ER-positive ou PR-positive. Quant au traitement, on opte pour une antihormonothérapie».

Le quotidien des femmes impacte leur santé

En étudiant l’influence des hormones sur le développement du sein et du cancer, l’experte s'est intéressée au travail de plusieurs épidémiologues. Ces derniers ont réussi à démontrer qu’il y avait une corrélation entre le risque de contracter la maladie et le nombre de cycles dans la vie d’une femme. «Il faut se dire que l’existence de la gent féminine a beaucoup changé avec le temps. Les générations de nos grands-mères, voir arrière-grands-mères étaient moins bien nourries, elles étaient plus petites et leur premier cycle arrivait vers les 16 ans. À 20 ans, elles tombaient déjà enceintes. Résultat: elles avaient moins de cycles que les femmes d’aujourd’hui et, par la force des choses, moins de chance d’être atteintes d’un cancer du sein».

A contrario, les femmes d’aujourd’hui ont leurs règles plus tôt et attendent plus longtemps avant d’avoir des enfants. «Le nombre de cycles plus élevé des jeunes femmes contribue ainsi à expliquer pourquoi elles ont davantage de risques d’avoir un cancer. Cependant, cette raison ne justifie pas tout», note Cathrin Brisken.

Bien choisir sa pilule

Autre explication possible: la prise de pilules contraceptives. Dans une étude de l’EPFL publiée l’année dernière, Cathrin Brisken et son équipe ont réussi à démontrer que certains contraceptifs hormonaux pouvaient augmenter le risque de cancer du sein. «Toutes les pilules contiennent des progestatifs de synthèse dont le but est de copier les effets la progestérone. Mais il y a des différences entre les progestatifs. En effet, les progestatifs dits androgéniques stimulent la prolifération cellulaire dans le sein. Par conséquent, l’organe n’est jamais vraiment tranquille et sur le long terme, cela peut représenter un risque», explique la scientifique.

Autrement dit, on pourrait prévenir le cancer du sein associé à la contraception en faisant attention à quelle pilule on prend. «Mais cela implique de connaître un peu la chimie», signale l’experte avant d’ajouter que les pilules combinées de 2e génération, contenant des progestatifs comme le lévonorgestrel, font partie des contraceptions hormonales auxquels il faudrait faire attention.

Gare aux perturbateurs endocriniens

Les progestatifs androgéniques ne sont pas les seules substances chimiques qui peuvent augmenter les risques d’avoir un cancer. «Il existe également des éléments dans notre environnement qui peuvent interagir avec les récepteurs hormonaux. Il s’agit de substances qui s'accumulent dans l'environnement et auxquels nous sommes déjà exposés dans l’utérus», explique Cathrin Brisken.

C’est le cas du perturbateur endocrinien appelé bisphénol A (BPA). D’abord, conçue comme œstrogène de synthèse, la substance a finalement été utilisée pour la fabrication de plastiques et de résines. «On retrouve donc le composé dans le polycarbonate, utilisé pour produire les bouteilles ou les grands barils à eau des salles d’attente, par exemple. Ainsi, lorsqu’on consomme des aliments ou des liquides qui étaient contenus dans un récipient en plastique, on finit par ingérer des particules de BPA. À noter que nos grands-parents ne connaissaient pas le plastique, ce qui peut aussi expliquer pourquoi le risque d’avoir un cancer était moins haut chez eux».

Mais alors, comment le bisphénol A nous met-il alors en péril? «En fait, le corps confond le BPA avec de l’œstrogène. Résultat: les récepteurs hormonaux finissent par être en suractivation», nous apprend la chercheuse.

Toujours plus de cancers liés aux hormones

Les cancers liés aux hormones sont les plus fréquents: le cancer du sein est le plus répandu chez la femme, tandis que les hommes sont avant tout touchés au niveau de la prostate et des testicules. Et la tendance ne va pas vers une amélioration, puisqu'il y a toujours plus de cas.

«Mais la science a réussi à démontrer comment certaines hormones pouvaient augmenter les risques de tumeurs, tempère la spécialiste. Cela laisse entendre qu’on peut limiter les risques en faisant attention à ce que l'on ingère et comment on consomme. Du côté de la médecine, les traitements déjà existants sont plus efficaces, mais ils peuvent toujours être améliorés.»

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