La secrétaire du Père Noël

«L'année passée, une mère m'a écrit pour se confier sur le décès de son fils»

Valentina San MartinJournaliste Blick

Aussi étonnant que cela puisse paraître, l’assistante du Père Noël ne se trouve pas en Finlande mais à Farvagny, dans le canton de Fribourg. Son nom: Kela Jdahim. Son job: mère au foyer. Tous les matins, sa boîte aux lettres déborde de dessins ou de listes de cadeaux envoyées par des enfants de toute la Suisse romande.

Comment cette mère de deux enfants en est-elle venue à se substituer au Monsieur à barbe blanche? «Je suis une grande fan de Noël et des feuilletons diffusés à ce moment de l’année. C'est l'un de ces téléfilms qui m’a inspirée: une jeune femme se donnait pour mission de répondre à tous les enfants qui lui envoient des lettres adressées au Père Noël. On la voit assise sur son bureau en train de rédiger des réponses avec une longue plume d’oiseau blanche. J’ai adoré!»

Nous sommes en 2020 et la trentenaire publie une annonce sur Facebook, sur son profil et dans des groupes. L'effet est immédiat: les parents se passent le mot et de nombreux enfants se mettent à lui écrire. La presse locale s'empare de l'histoire — un article de La Liberté contribue à doper la visibilité de l'opération. «Cette année-là, j’ai reçu 390 lettres, dont deux venues de France», nous explique Kela Jdahim.

Cette année, la Fribourgeoise a déjà reçu entre 270 et 300 lettres. Elles viennent d'un peu partout en Suisse romande. «Je m’attends à en recevoir encore une centaine d’ici au 22, date à laquelle mon travail s’arrête puisque mes réponses risquent d’arriver après le 25». De quoi donner du travail plein les bras à Kela Jdahim. «Lors de grosses journées, je peux passer jusqu’à cinq heures à écrire», précise l’assistante du Père Noël.

La Poste a aussi son secrétariat de Noël

Répondre aux lettres expédiées par les enfants au Père Noël, l’idée ne date pas d’hier. La Poste se charge de cette noble mission depuis 1950. «L’année dernière, le nombre d’enfants ayant écrit au Père Noël a atteint un nouveau record», relève le géant jaune sur son site. Plus de 34’000 lettres ont été envoyées de toute la Suisse.

Pour qu’une lettre arrive à bon port, il suffit de l’affranchir et d’écrire «Au père Noël» sur l’enveloppe. Si la missive est envoyée assez tôt, les lutins proposent une réponse accompagnée d’un petit cadeau. Toutefois, pour Kela Jdahim, les courriers sont trop peu personnalisées: «C’est normal, ils réceptionnent tellement de lettres!»

La Fribourgeoise essaie, elle, d'être toujours originale dans ses réponses. «J’écris que les lutins m’ont apporté la lettre alors que je coupais du bois dans la forêt ou alors que j’ai lu la liste de cadeaux pendant que Mère Noël me préparait un goûter», sourit-elle.

Des lettres parfois déchirantes

En plus des dessins ou des listes de cadeaux interminables à l’écriture phonétique typique des enfants, Kela Jdahim reçoit aussi des courriers de la part d’adultes. Parfois très tristes. «L’année passée, une maman m’a écrit un texte dans lequel elle m’expliquait que son enfant était décédé juste avant les Fêtes après accident de voiture. C’était son premier Noël sans lui», raconte la jeune femme.

Même lorsqu'elle reçoit des lettres de parents, l'assistante signe toujours «Papa Noël»: l’idée est d’apporter un peu de magie dans toutes les situations, même les plus difficiles.

Jeter les courriers? Pas question!

Que fait-elle donc de toutes ces lettres qu’elle reçoit par centaines depuis l'an dernier? Finissent-elles à la poubelle? «Pas du tout! Je les garde toutes et j’aimerais en faire un bouquin dont les bénéfices iraient à une association. Je pense à Saint Bernard du cœur, qui vient en aide à ceux qui ont faim», conclut la faiseuse de magie.