Des gens qui se cognent, qui trébuchent ou qui titubent, voilà comment j’imagine une expérience en réalité virtuelle. Il va sans dire que lorsque je découvre le mail qui m’invite à aller voir «Le Bal de Paris», un spectacle immersif de 35 minutes réalisé par la chorégraphe espagnole Blanca Li, je suis quelque peu intriguée!
Alors, est-ce vraiment si bluffant qu’on le dit? Apparemment oui, puisque le spectacle a nécessité quatre années de travail et 1,6 million d'euros de budget. Sans oublier que l’œuvre a été récompensée par le Lion de la Meilleure expérience de réalité virtuelle au 78e Festival International de Venise en 2021. Depuis, ce sont quelque 50'000 personnes qui ont déjà participé à l'expérience. Bon, c’est décidé, j’y vais. Direction le Cinéma Plaza à Genève!
Les participants (12 au maximum) sont invités à suivre Adèle et Pierre, deux anciens amants qui pensaient être tous les deux passés à autre chose. Les deux personnages sont incarnés par trois danseurs professionnels.
Alors qu’Adèle célèbre son retour à Paris lors d’un bal organisé par son père, elle croise son ex-amoureux. Les deux protagonistes nous emmènent alors avec eux dans leurs folles aventures qui se déroulent en trois parties.
Pour imaginer son œuvre, Blanca Li explique s’être inspirée de «La Veuve joyeuse», une opérette autrichienne en trois actes de Franz Lehár. La réalisatrice explique aussi avoir placé l’intrigue à Paris, une ville qu’elle affectionne tout particulièrement pour sa réputation glamour et sophistiquée.
Les participants (12 au maximum) sont invités à suivre Adèle et Pierre, deux anciens amants qui pensaient être tous les deux passés à autre chose. Les deux personnages sont incarnés par trois danseurs professionnels.
Alors qu’Adèle célèbre son retour à Paris lors d’un bal organisé par son père, elle croise son ex-amoureux. Les deux protagonistes nous emmènent alors avec eux dans leurs folles aventures qui se déroulent en trois parties.
Pour imaginer son œuvre, Blanca Li explique s’être inspirée de «La Veuve joyeuse», une opérette autrichienne en trois actes de Franz Lehár. La réalisatrice explique aussi avoir placé l’intrigue à Paris, une ville qu’elle affectionne tout particulièrement pour sa réputation glamour et sophistiquée.
C’est lundi et il est presque 10h. Lorsque j’entre dans le mythique cinéma genevois en pleine rénovation, une petite poignée de journalistes et des communicants sont déjà là pour tester l’expérience. Nous sommes une dizaine. Face à nous, une sorte d’estrade de 10 mètres sur dix. C’est là que la magie s’apprête à opérer et où je me casserais potentiellement la gueule.
Heureusement, une rambarde se trouve sur le pourtour de la plateforme parfaitement carrée. J’aurais donc de quoi m’accrocher, au cas où. Parce qu’entre nous, si je me réjouis de tenter l’expérience, j’ai peur. Peur de perdre l’équilibre ou de m’encoubler sur un truc que je n’aurais pas vu...
Nous voilà tous invités à monter sur l’estrade. On m’escorte jusqu’à un numéro qui m’a été attribué, le 5. Là, on m’équipe du matériel nécessaire pour entrer dans cet autre monde: un sac de 8 kg qui contient un ordinateur mais aussi deux batteries, un casque (avec des lunettes et des écouteurs intégrés) de 2,5 kg et quatre capteurs sur les bras et les jambes.
Comme pour nous rappeler que nous nous apprêtons à entrer dans un monde irréel, l’un des organisateurs lance: «Tous les objets que vous verrez n’existent pas. Ne vous asseyez donc pas sur les chaises ou les banquettes que vous serez amenés à voir!» Voilà qui est clair.
L’heure est venue de mettre mes lunettes. Au moment fatidique, la demoiselle qui m’a enfilé le sac sur le dos et le casque sur la tête me dit d’une voix pétillante: «À tout à l’heure dans l’autre réalité!» Ce à quoi je réponds d'un ton un peu bête: «Ah euh, bah oui, à tout à l'heure.»
Tous habillés en Chanel
Me voilà transportée dans un vestiaire ultra glamour. Il y a une table en verre au milieu de la pièce et les autres participants sont là aussi. Ils ont tous des masques d’animaux argentés. Je vois des chiens, des chats, des lapins… Mais… est-ce qu’eux aussi me voient? Dans le doute, je demande: «Vous me voyez?!» On me répond par l’affirmative. Ouf!
Ici, chaque personne peut choisir une tenue parmi les quinze qui se trouvent dans une sorte de vitrine. Il y a des costards et des robes virtuels. Grosse surprise: tout est signé Chanel.
Eh oui, il paraît que la réalisatrice a approché la griffe pour imaginer des tenues de haute couture à intégrer dans son spectacle. Je jette ainsi mon dévolu sur une robe aubergine super bouffante, ornée d’une jolie ceinture blanche qui rappelle les boutons qui se trouvent sur mon buste. Me voilà donc tout de Chanel vêtue. J’ai soudain une petite pensée pour mon chef qui se moquait (gentiment) de mon T-shirt couleur «marshmallow» au briefing de ce matin. Alors, c’est qui la plus stylée maintenant?! C’est bibi!
Une fois que tout le monde est prêt, il est l’heure d’entrer dans la danse. Car nous aussi nous ferons partie intégrante du spectacle et ce, du début à la fin. Nous faisons notre entrée dans une salle de bal gigantesque en plein Paris.
Apparement, la reine de la fête n’est autre qu’une certaine Adèle qui célèbre son retour dans la capitale française. Là voilà qui entame une valse avec Pierre, son grand amour d’antan. Les deux personnages incarnés par des danseurs professionnels nous prennent par la main et nous font danser à notre tour.
Je me retrouve ainsi aux bras d’un avatar à tête de chat. La personne porte une robe noire brillante. C’est drôle de faire une valse avec une autre femme. Ah non mais… ce n’est peut-être pas une femme «en vrai». Et si je tâtais ses mains pour en avoir le cœur net? Si elles sont fines, c'est une femme. Sinon, c'est un mec. Mais je n'ai déjà plus le temps pour ça. La tête de chat s'en va. Le bal est déjà terminé et nous nous retrouvons soudain sur une belle grande terrasse qui donne sur un lac.
L’ouïe, la vue, l’odorat et le toucher mis à contribution
Là, une petite embarcation vient nous chercher pour nous emmener dans ce qu'Adèle a appelé sa «villa de campagne»… Après être tous montés à bord, le bateau démarre et je manque presque de finir les fesses au sol. Pourtant «en vrai», rien n’a bougé… Mon cerveau s’est fait avoir, un peu comme lorsqu’on manque de perdre l’équilibre sur des escalators qui ne sont pas en marche… la honte.
Pendant le voyage, je sens que quelque chose s'agrippe à mon sac. En temps normal, je me retournerais prête à balancer une droite au visage du potentiel pickpocket. Mais là, c'est différent. Il ne s'agit pas d'un voleur, mais de l'une des personnes qui s'occupe de la logistique. Sa mission: checker les batteries de mon ordinateur. Il faut savoir que ce genre de représentation est très friand en énergie, surtout quand ça dure plus de 30 minutes. Vérifier que tout soit en ordre fait donc partie du spectacle.
Je fais mine de ne rien sentir et admire notre avancée à travers les nénuphars. Je perçois alors une légère musique tzigane au loin. L’air se fait d’ailleurs de plus en plus présent. Nous arrivons dans un joli jardin aux arbustes fraîchement taillés. Il y a même des papillons bleus qui volent autour de moi. Sans oublier ces fleurs qui sentent divinement bon. Hein?! Suis-je devenu complètement gaga? Des fleurs virtuelles qui ont une odeur?! Mon cerveau me joue des tours, d’accord, mais là… Et puis d’ailleurs, je la connais cette senteur qui vient tout juste de s’imposer à moi grâce une légère bise. Bingo! C’est Chanel numéro 5! J’en mettrais ma main (virtuelle) à couper!
La nuit commence à tomber et j’aurais presque oublié nos deux tourtereaux, Adèle et Pierre. Bon apparemment, ce n’est pas encore gagné entre eux, puisqu’ils se disputent et refusent de s’avouer leurs sentiments. C’est dommage, il me paraît pourtant si charmant ce Pierre. Son masque de cerf lui donne un air noble et presque un peu innocent, d’ailleurs. Oui enfin, c’est ce que je croyais puisque ce cher Monsieur nous invite à monter dans un train direction: le cabaret!
Du French cancan comme si on y était
Ce troisième et dernier acte se déroule donc dans un cabaret appelé Chez Mimi. L'ambiance y est jazzy, voire sulfureuse. Les danseuses de cancan lancent leurs gambettes en l'air laissant presque apercevoir ce qu'il y a sous leur mini jupon noir. Blanca Li nous expliquera, plus tard, qu'elle a enregistré les mouvements de vraies danseuses du Moulin Rouge à Paris.
L'aventure arrive à sa fin et nous nous mettons alors tous en rond pour admirer Adèle et Pierre se réconcilier en musique. Une fois le spectacle terminé, un rideau rouge se lève. Face à nous, un public émerveillé nous applaudit. Difficile de se résoudre à enlever ses lunettes... Une fois de retour dans la réalité, je peine à comprendre où je suis. Il me faut rejoindre l'étagère avec le numéro 5.
Après quelques secondes d'observation, je la vois qui est à l'opposé de moi. Si j'ai réussi le pari de ne pas manger le sol durant toute l'expérience, c'est bien en revenant à la réalité après 35 minutes d'emballement que je perds l'équilibre. Qui l'eût cru?