Votations fédérales du 13 juin sur les initiatives anti-pesticides
Pour une agriculture suisse championne du monde

La campagne autour des initiatives «phyto» dérape. Certains de leurs partisans ont été menacés de mort. Rédacteur en chef romand de Blick, Michel Jeanneret dit pourquoi un double oui serait toutefois profitable à l'ensemble du pays.
Publié: 30.05.2021 à 16:54 heures
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Dernière mise à jour: 01.06.2021 à 08:05 heures
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Michel JeanneretRédacteur en chef

Actes de vandalisme, insultes et menaces de mort; il est très rare que des votations fédérales génèrent de tels dérapages. Le 13 juin prochain, les citoyennes et les citoyens voteront dans un climat de tension extrême pour ou contre l’objet de la zizanie: les deux initiatives populaires dites «phytos».

Pour une partie du monde agricole, l’initiative «eau propre» exigeant que seuls les exploitants qui renoncent aux pesticides puissent bénéficier de subventions (les fameux paiements directs) et l’initiative visant l’interdiction des pesticides dans notre pays sont le coup de massue de trop.

On peut bien sûr comprendre cet écœurement, car les paysans font face depuis des décennies à des contraintes toujours plus drastiques. Il y a d’abord et surtout la pression constante et décourageante sur les prix. Mais il y a aussi les directives fédérales, les exigences écologiques, les tâches administratives, les modes de consommation qui évoluent. Le nombre de paysans a diminué de moitié ces 40 dernières années, en partie par découragement.

Il faut pourtant aussi et surtout admettre que le modèle de production intensive et de subventionnement de l’après-guerre est moribond, en dépit de ses révisions successives. Et l’agrochimie a, tout comme l’industrie, bel et bien altéré les sols et les nappes phréatiques, contribué à faire chuter la biodiversité de manière dramatique.

Sauver l’indispensable agriculture suisse demande d’avoir le courage de regarder résolument vers l’avenir, de produire (et de consommer!) autrement pour sortir d’une impasse agrologique, économique et écologique. Au-delà de la virulence des disputes, des rancœurs et des craintes, c’est la question fondamentale d’une agriculture moderne et exemplaire qui nous est posée ce 13 juin.

Nous devons opter pour une politique agricole visionnaire. De nombreux paysans ont déjà tourné le dos à la chimie et s’en sortent souvent très bien, avec l’aide des paiements directs. Une ferme suisse sur six pratique officiellement l’agriculture biologique. Les consommateurs ne sont pas en reste: en 2020, ils ont acheté 20% de plus de produits bio. Avec désormais 455 francs d’achats de denrées alimentaires labellisées par habitant, la Suisse détient le record mondial de consommation de nourriture exempte de molécules de synthèse.

Et il est faux d’annoncer un envol des prix du bio si les Suisses acceptent une des deux, ou les deux initiatives. La loi du marché suit en effet la taille de leur porte-monnaie et ce qu’on appelle le «consentement à payer». Cela réduira au contraire le problème actuel de l’alimentation à deux vitesses, qui sépare les consommateurs pouvant se payer du bio des autres. Enfin, le Parlement a déjà démontré qu’il sait interpréter les rares initiatives populaires victorieuses par des lois d’application prudentes et judicieuses.

La Suisse a devant elle une opportunité historique de faire un choix clair, courageux et innovant. Ses citoyennes et ses citoyens doivent la saisir en votant deux fois oui aux initiatives écologiques, la seule option porteuse d’avenir et d’optimisme.

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