La Suisse est une terre de consensus. Pas étonnant qu’elle joue depuis dix-huit mois sur une ligne de crête en matière de lutte contre le Covid, ménageant avec un certain talent les visions et les intérêts divergents, privilégiant la carotte au bâton. Seulement voilà, il faut croire que les Suissesses et les Suisses ne sont pas fans du légume orange, puisque notre pays si respectueux des libertés individuelles est à la traîne en matière de couverture vaccinale. Or la quatrième vague redoutée nous frappe de plein fouet et les non vaccinés que l’on retrouve majoritairement dans les soins intensifs menacent de saturer nos structures hospitalières. Il fallait donc sortir le bâton pour «convaincre».
La situation en Suisse est chaotique. Le relâchement quasi total. Le port du masque n’est pas toujours respecté sur certaines lignes CFF, de nombreux restaurateurs font preuve d’un «je m’en foutisme» absolu avec les applications de traçage, la majorité des cantons font comme si le rôle des enfants dans la propagation du virus était nul ou non avéré pour se simplifier la vie et, jusqu’ici, nos autorités semblaient plongées dans une torpeur estivale.
Fidèle à sa ligne «raisonnable», le gouvernement envisage aujourd’hui de rendre le certificat Covid obligatoire pour aller au restaurant et dans des lieux publics clos si le système hospitalier devait arriver à saturation. Il a par ailleurs décidé de faire payer le dépistage en vue d’obtenir le certificat (un coup au porte-monnaie des jeunes voulant se rendre en boîte de nuit sans être vaccinés). C’est bien, mais ça n’est pas assez vigoureux. Alors qu’elles auraient dû brandir un gourdin, nos autorités ont dégainé leur petit cure-dents.
Lier la décision d’exiger le certificat Covid dans les lieux clos à la surcharge des structures de santé, c’est mettre de côté un autre problème. Tant que la couverture vaccinale ne sera pas suffisamment élevée, le virus va continuer à muter, menaçant de devoir inlassablement repasser par la case départ, comme ce pigeon de Sisyphe au pied de sa montagne. Or, chers non vaccinés, j’ai un scoop pour vous: les personnes qui ont décidé de jouer la carte de la solidarité ne se font pas piquer le bras par plaisir et souhaiteraient que tout cela cesse un jour sans devoir faire des rappels pour le restant de leurs jours.
Exiger le certificat dans les restaurants et tous les lieux publics fermés créera bien sûr des remous, mais il faut appliquer cette mesure sans condition pour secouer les indécis et faire en sorte que la liberté des uns n’entrave pas celle des autres.