Les arnaques par téléphone en Suisse sont trois fois plus nombreuses cette année qu'en 2022, alertent les polices et les spécialistes de la prévention. Une campagne nationale de sensibilisation est lancée.
Les principales cibles des escrocs sont les citoyens d'un certain âge, souvent seuls, relèvent jeudi la Prévention suisse de la criminalité (PSC) et les Corps de police cantonaux et municipaux, à l'origine de la campagne. Les arnaqueurs, cette année, ont réussi à ce jour à soutirer 8 millions de francs aux victimes.
Parmi les techniques figurent le coup du (faux) neveu, les appelants se faisant passer pour des membres de la famille en situation de détresse dans le but de se faire verser de l'argent.
Quelque 2800 «appels choc» – technique du «neveu» ou divers dérivés – ont été enregistrés cette année. Le principe est toujours le même: plonger l'appelé dans un état de stress, via une fausse nouvelle, et le pousser ainsi à payer.
Stress émotionnel
L'appel choc est une forme particulièrement agressive de manipulation. L'interlocuteur prétend qu'un membre de la famille de l'appelé est en danger et a urgemment besoin d'aide. On peut tomber sur un prétendu «médecin-chef» qui doit opérer le fils de la victime et qui, pour ce faire, a besoin d’une avance; ou sur un «avocat» qui réclame une certaine somme d’argent pour payer la caution de la fille de la victime placée en garde à vue après avoir renversé un enfant, parmi les exemples donnés
«Les arnaqueurs (ou arnaqueuses) savent pertinemment qu’il est difficile d’agir rationnellement sous le coup de l’émotion et face à une telle situation» expliquent les auteurs de la campagne. Ils misent sur la «pression émotionnelle et temporelle», en faisant valoir une urgence.
Outre la perte financière, ce genre de pratiques entraîne souvent de grandes souffrances personnelles, précisent les spécialistes.
Vieux prénoms ciblés
Pour cibler les personnes âgées, les escrocs ciblent dans le répertoire téléphonique des prénoms qui n'apparaissent pratiquement plus chez les jeunes générations. Ces derniers temps toutefois, des plus jeunes reçoivent également des appels choc, concernant soi-disant leurs parents: les arnaqueurs adaptent leurs histoires.
Souvent, les clans de manipulateurs sont organisés de manière hiérarchique, les principaux responsables agissant en général depuis l'étranger, en s'appuyant sur des centres d'appels bien équipés. Les appels peuvent être masqués ou pas. Les auteurs changent fréquemment de numéro.
La téléphonie par internet est aussi utilisée. Elle permet de dissimuler l'origine de l'appel («spoofing»). Les réseaux de criminels sont souvent difficiles et coûteux à démanteler car cela nécessite une coopération avec l'étranger. Mais des coopérations fructueuses ont par exemple pu être menées entre les enquêteurs à Zurich et en Allemagne.
Il ne faut en aucun cas répondre aux demandes d'argent ou autres requêtes, conseille la PSC. Il vaut mieux couper court à l'appel et contacter le membre de la famille prétendument concerné.
La PSC recommande en outre de toujours informer la police, même si l'escroquerie n'a pas abouti, pour empêcher que d'autres personnes soient ciblées. Quant aux victimes qui ont versé de l'argent, elles "doivent absolument porter plainte" et se départir de la honte qu'elles pourraient ressentir à avoir été grugées.
La campagne de prévention est soutenue par Pro Senectute et s'étend jusqu'à mi-novembre. Elle s'intitule «Pas de panique! N'hésitez pas, raccrochez» et prévoit un spot télé mettant en scène un appel choc, des affiches, des dépliants, une page d’accueil, des informations dans les médias sociaux et une carte dépliante à placer à côté du téléphone.
(ATS)