À Monaco, un contrôle était par ailleurs en cours jeudi à bord du yacht Quantum Blue, propriété du milliardaire russe Sergueï Galitski, a appris l’AFP auprès d’une source portuaire, tandis que les autorités françaises multiplient les vérifications dans les ports et chantiers navals spécialisés dans la maintenance de bateaux de luxe sur la côte méditerranéenne.
Un yacht de 120 millions de dollars saisi
À La Ciotat, près de Marseille, c’est l’Amore Vero, un yacht blanc de 86 m de long, qui a été «saisi» par la douane dans un chantier naval, a indiqué le ministère français de l’Economie et des Finances.
«Détenu par une société dont Igor Setchine, dirigeant de la société Rosneft, a été identifié comme le principal actionnaire», il «entrait dans le champ des mesures de gel décidées à l’encontre de son propriétaire» par l’Union européenne, a ajouté le ministère.
Considéré comme l’un des chefs de file du clan de «siloviki» – un mot qui désigne les hauts responsables issus des services de sécurité – Igor Setchine est un fidèle du maître du Kremlin depuis les années 1990.
Le bateau a été bloqué dans la nuit de mercredi à jeudi, alors qu’il «prenait des dispositions pour appareiller dans l’urgence, sans avoir achevé les travaux prévus», a précisé le Ministre français des Comptes publics Olivier Dussopt, qui a la responsabilité des Douanes.
Ce yacht dispose sur son pont principal d’une piscine qui peut se transformer en héliport et son intérieur a été conçu par le renommé architecte d’intérieur Alberto Pinto, selon le site internet de son constructeur. Sa valeur s’élèverait à 120 millions de dollars, selon une source souhaitant rester anonyme.
Il était un client régulier des chantiers navals MB92, a confirmé la société à l’AFP.
Société offshore et pavillon étranger
Symboles de l’enrichissement massif des hauts responsables politiques et économiques russes, les yachts font partie des biens qu’ils détiennent à l’étranger ciblés par les sanctions occidentales.
Les sanctions européennes visent plus de 500 personnalités ou entités russes, dont les avoirs et les ressources économiques doivent être progressivement gelés à mesure que les Etats européens parviennent à les localiser et les relier à leurs propriétaires.
À La Ciotat, l’opération de contrôle française a pris du temps, les douanes devant d’abord vérifier l’identité du propriétaire se cachant derrière la société qui détenait en propre le navire, explique une source officielle française.
«La difficulté, c’est qu’ils ne sont pas sous pavillon russe mais sous autre pavillon, avec derrière des montages compliqués via des sociétés écrans, donc le travail des douanes consiste à voir qui se cache derrière», a confirmé à l’AFP une source connaissant bien le secteur de la grande plaisance.
Le Quantum Blue contrôlé à Monaco navigue par exemple sous pavillon des îles Caïman, selon le site Marine Traffic.
De la Côte d'Azur aux Maldives
Les propriétaires de ces yachts tentent désormais d’échapper aux sanctions et les Maldives semblent représenter un point de chute pour leurs navires ces derniers jours, n’ayant pas de traité d’extradition vers les Etats-Unis.
Plusieurs yachts ont ainsi été repérés sur place: l’un appartenant à Oleg Deripaska, le fondateur du groupe d’aluminium Rusal, ou encore le Titan, propriété du magnat de l’acier Alexander Abramov.
«Il y a beaucoup d’échos dans le milieu sur des yachts russes s’apprêtant à quitter la Côte d'Azur», par peur des sanctions, a indiqué à l’AFP une source connaissant bien ce secteur, évoquant également Dubaï comme une des destinations potentielles.
La France a jusqu’ici bloqué cinq bateaux – quatre cargos et un yacht – dans le cadre des mesures de rétorsion prises après l’invasion de l’Ukraine par la Russie.
Les autorités allemandes ont démenti jeudi avoir saisi le mega- yacht de l’oligarque russe Alicher Ousmanov, proche de Vladimir Poutine visé par les sanctions occidentales.
Plusieurs médias avaient fait état de la saisie de ce bateau en maintenance dans le port de Hambourg. Mais une porte-parole du département chargé des questions économiques dans la cité-Etat a démenti auprès de l’AFP.
Le yacht de 156 mètres devrait cependant rester immobilisé du fait de l’interdiction de transférer des biens vers la Russie sans autorisation spéciale.
(ATS)