Plainte pour «harcèlement psychologique et sexuel»
Face à 15 plaignants, ce professeur de l'EPFL reste en poste après une enquête jugée trouble

Agressivité, alcool et harcèlement sexuel. En 2020, quinze chercheurs s'étaient plaints à la direction d'une gestion désastreuse et de comportements déplacés. L'éminent professeur est blanchi, mais l'enquête est critiquée par les plaignants, affirme «Le Temps».
Publié: 15.09.2023 à 14:03 heures
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Dernière mise à jour: 15.09.2023 à 14:25 heures
Des cas de harcèlement à l'EPFL sont régulièrement dénoncés sur le compte Instagram @payetonepfl.
Photo: Keystone/Jean-Christophe Bott
Léo Michoud

Il avait déjà fait l'objet de trois signalements depuis 2009, divulgue «Le Temps». Mais la direction de l'EPFL n'aurait pris aucune mesure à l'encontre de ce professeur mis en cause dans une plainte déposée en novembre 2020 par quinze doctorants.

L'enquête du quotidien révèle que l'institution scientifique a pourtant traité cette affaire en même temps qu'elle assurait avoir fait son virage #MeToo. L'EPFL réagissait alors à plusieurs dizaines de témoignages de harcèlements en tous genres, relayés par l'association Polyquity ou parus sur le compte Instagram @payetonepfl.

«Harcèlement psychologique et sexuel»

Cette plainte collective portait sur la gestion de ce supérieur hiérarchique, professeur influent dans son domaine de spécialisation, et sur du «harcèlement psychologique et sexuel». Dans les colonnes du journal, le groupe de scientifiques l'accuse entre autres de «favoriser certains chercheurs tout en humiliant les autres en public», d'être «d'humeur volatile, parfois agressif» ou encore de «faire planer le risque de discrédit» sur ses subalternes au sein de la communauté académique.

Toujours selon «Le Temps», le professeur en question serait fréquemment absent, consommerait de l'alcool au bureau, ferait des remarques et des blagues déplacées et utiliserait «les rendez-vous scientifiques avec ses doctorants pour leur montrer des images, parfois sexuelles, figurant sur des sites de rencontres».

L'enquête ne satisfait pas les plaignants

Un avocat vaudois, Christian Bettex, a été mandaté par l'EPFL pour enquêter sur cette affaire. Verdict: des accusations «infondées». Avec ces résultats en mains en juillet 2021, le président de l’EPFL Martin Vetterli classe l’affaire sans suite.

Mais alors, quel est le problème? Dans «Le Temps», le déroulement de cette investigation est fortement critiqué par les doctorants, par leurs deux avocates les défendant gratuitement ainsi que par le secrétaire syndical en charge des Hautes Écoles au SSP Vaud.

Déposition d'un recours impossible

L'homme de loi mandaté par l'institution a interrogé les plaignants en français, alors même que tous ne sont pas entièrement francophones. Il n'en a questionné que cinq sur quinze. Enfin, puisque l'école polytechnique a «régulièrement cherché à engager cet avocat en particulier», il serait selon les plaignants celui qui «établit de facto la norme de ce qui signifie la tolérance zéro en matière de harcèlement à l'EPFL». Il a en effet été engagé à six reprises par l'établissement en quinze ans, a creusé le quotidien.

La brochette de scientifiques a tout de même reçu du soutien de la part de leur employeur, qui leur a permis de terminer leurs travaux académiques en cours dans de meilleures conditions. Mais ils souhaitent poser un recours contre la décision de l'EPFL. Impossible, selon «Le Temps», car ils sont considérés seulement comme des «témoins», et non comme des «parties» dans l'affaire, ce qui «les prive de l'accès au dossier».

Contacté, le professeur accusé n'a pas répondu aux sollicitations de nos confrères.

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