«Par chance, on sait où on est, on ne s'est pas perdu en allant en travail», s'amuse Carole Müller à Cortébert, dans la vallée de Saint-Imier. Dans le Jura bernois, où une trentaine de panneaux d'entrée de localités ont disparu en l'espace de deux week-ends, on préfère rire de cette situation.
Au cœur du petit village de Tramelan se trouve le Houli's Beer Shop. Un bar à bière où beaucoup de locaux aiment se retrouver. Jean-Pierre Monbaron vit ici depuis de nombreuses années, mais il n'avait pas remarqué la disparition des panneaux. «Je n’ai même pas fait attention. Ça n’a aucun sens, c’est plus pour emmerder le monde, s'exclame-t-il. On a déjà tous volé un cône en rentrant de soirée, mais s'organiser pour en voler dans toute la région, c'est bizarre.» Alors qui a pu faire cela? «Sûrement des farceurs, mais c'est vraiment nul», répond-il. Après quelques secondes de réflexion en recoiffant sa moustache qui le rend atypique, il s'interroge à voix haute: «Ils vont en faire quoi?».
Cela ne fait pas les gros titres
Alors les ragots de village permettent-ils d'en savoir plus? «Franchement, je dois dire que ce n'est pas un sujet sur lequel les clients s'attardent. Dimanche dernier, il y avait les votations et tout le monde ne parlait que de ça, mais les panneaux pas trop», explique Daniela Donzé qui s'occupe d'un petit café sur la route principale de Tramelan.
À la boulangerie de Corgémont, Monica Ledermann ne s'est pas inquiétée outre mesure. «J'ai appris ce matin cette histoire de disparition de panneaux. Je passe devant tous les jours et je n'avais même pas remarqué.» Et comme à Tramelan, ce n'est pas quelque chose qui inquiète: «personne n'est venu me poser de questions pour l'instant.»
Après les avoir retournés?
Lorsqu'elle l'a appris, elle a pensé à une action des agriculteurs. «On s'est dit qu'ils continuaient leur combat, mais cela parait bizarre qu'ils ne le reconnaissent pas. C'est incompréhensible franchement», déclare la vendeuse en boulangerie.
Interrogée par Blick, Daniella Hallemann, secrétaire générale de la chambre d'agriculture du Jura bernois ne pense pas qu'il y ait un rapport entre les mystérieuses disparitions et la révolte des paysans. «Lorsque les panneaux ont été retournés, ils voulaient passer un message clair. Mais là, il n'y en a aucun et cela aurait été revendiqué.» Même si cette piste semble difficile à écarter complétement, les habitants des villages concernés n'y croient pas vraiment. «Peut-être que des gens profitent de la révolution paysanne pour les voler et ne pas se faire accuser», ajoute-elle.
«Mais à quoi bon?»
À Corgémont se tient l'une des plus grandes brocantes du pays. Son propriétaire aurait-il vu passer quelque chose? «Les brocanteurs font très attention à ne pas acheter des objets volés. Si les voleurs prévoyaient de les revendre, ils n'auraient aucune chance», explique Henri-René Meier. Il ajoute: «Cela peut être des collectionneurs privés, mais si c'est le cas, cela va se savoir et ils vont se faire attraper. C'est totalement débile. La seule façon de les cacher, ce serait au fond d'une cave. Mais alors à quoi bon?» Et l'hypothèse d'une revendication? «Je n'y crois pas, je ne vois pas ce que cela apporterait. C'est juste bête.»
Sur le palier de sa porte, Carole Müller, émet une nouvelle hypothèse: «Peut-être que certains ont appris que les panneaux se dévissaient facilement, alors ils y ont vu une opportunité.» Mais de nouveau, à quoi bon? «Alors ça, c'est une très bonne question, ils doivent aimer cela», s'amuse-t-elle.
La police cantonale le sait
Alors farceurs, agriculteurs, opportunistes ou autres? Chacun est libre de se faire sa propre opinion. La réponse tombera sûrement un jour. Reste que les malfaiteurs devaient être bien organisés pour en voler une trentaine en deux soirées. Les nuits de ce week-end seront-elles encore agitées ces prochains week-ends dans le Jura bernois?
Dans l'intervalle, la police cantonale bernoise a pris connaissance du phénomène, mais n'a pour l'instant pas reçu de dénonciations. C'est à l'Office des ponts et des chaussées, responsable des panneaux, de porter plainte s'il le souhaite.