Se déhancher jusqu’au bout de la nuit ou aller bronzer sur une plage de sable fin espagnole? C’est possible, à condition d’être vacciné… ou d’avoir été testé.
Comme la majorité des Suisses n’a pas encore reçu ses deux doses de vaccin, les tests PCR et antigéniques, notamment ceux effectués en pharmacie, sont pris d’assaut par les fêtards et les vacanciers, d’autant plus en cette période de départ.
Conséquence logique: les pharmacies tiennent difficilement le rythme, prévient Martine Ruggli, présidente de la Société suisse des pharmaciens PharmaSuisse. Blick l’a rencontrée.
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De nombreuses pharmacies se disent assaillies par la demande de tests rapides et parlent même d’un possible point de rupture. Qu’en pensez-vous?
Martine Ruggli: Malheureusement, c’est bien le cas. Les pharmacies travaillent en ce moment de manière extrêmement intense et réalisent autant de tests qu’elles peuvent. Mais la demande est si forte que beaucoup d’entre elles ne peuvent pas suivre. Le problème fondamental est que les tests antigéniques ne sont valables que pour deux jours. La plupart des personnes qui se font actuellement dépister le font pour partir directement en vacances ensuite — pour certains, dès qu’ils quittent le seuil de la pharmacie. Et puisque beaucoup voyagent le samedi, le volume des tests pendant et avant le week-end est extrêmement important.
Les rendez-vous du jeudi au samedi sont souvent pris des semaines à l’avance. Comment réagissent les clients qui sont laissés sur le carreau?
Les gens sont frustrés. Les pharmaciens me disent que le ton est de plus en plus agressif. Les gens appellent parfois à 6h30 le samedi matin et bataillent dans l’espoir d’être testé dans la journée. Je comprends le désespoir. Mais je demande aussi aux gens de reconnaître que nous faisons de notre mieux.
Les pharmacies ne pourraient-elles pas proposer davantage de rendez-vous à court terme?
Beaucoup ont déjà étendu leurs heures d’ouverture. Elles commencent dès 6 heures du matin et se prolongent jusqu’après l’heure habituelle de fermeture. Certaines effectuent même des tests le dimanche. Mais nous sommes en train d’atteindre les limites en termes de ressources humaines et de locaux disponibles. Un pharmacien n’a que deux mains et ne peut pas tester plusieurs personnes à la fois. Le personnel des pharmacies a aussi le droit partir en vacances, c’est normal. Cela devient alors compliqué de satisfaire tout le monde.
La Confédération a baissé les tarifs à partir de juillet, mais les pharmacies reçoivent encore 47 francs par test antigénique effectué. Certaines ne proposent pourtant plus de test car cela n’est pas rentable financièrement. Est-ce qu’on peut dire qu’elles fuient leurs responsabilités?
Il s’agit de cas exceptionnels. Mais je dois dire que cette réduction des prix est incompréhensible. Personne ne veut faire de perte sur son chiffre d’affaires, et surtout pas sous cette énorme pression! Les pharmacies ne se contentent pas de tester, elles vaccinent aussi et reçoivent chaque jour des dizaines d’appels de clients incertains. Les gens posent beaucoup de questions sur les conditions de leur voyage: «De quoi ai-je besoin pour voyager en Italie? Et l’Espagne?»
Souhaitez-vous que les gens voyagent moins et aillent moins en discothèque pour que les besoins en termes de tests diminuent?
Absolument pas! Nous devons être capables de vivre. Les gens ont attendu longtemps leurs vacances. Et regardez la météo… Il est compréhensible que beaucoup souhaitent voyager à l’étranger!
Comment sortir de cette situation?
La seule solution serait de se faire vacciner. Nous ne sortirons pas de la pandémie tant que le taux de vaccination ne sera pas suffisamment élevé.
Mais en Suisse, le nombre de vaccins administrés chaque jour est en constante diminution…
C’est un problème. La population doit faire preuve de solidarité et se faire vacciner. Mais en même temps, le recul du nombre d'injections crée de l’espace dans les centres de vaccination. En d’autres termes, il serait possible de transformer ces centres de vaccination en centres de tests. Surtout le week-end, lorsque ceux-ci ne sont pas occupés mais que la demande de tests est particulièrement importante. Cette transformation pourrait se faire facilement puisque le personnel de santé est déjà sur place dans les centres de vaccination.
Dans certains cantons, les vacances ont déjà débuté, tandis que dans d’autres, elles ne font que commencer. Le rythme des rendez-vous pour des tests au sein des pharmacies va-t-il s’aggraver?
Nous avons déjà atteint le pic. J’estime que le goulot d’étranglement durera les six prochaines semaines. Après les vacances scolaires, les choses vont probablement se calmer à nouveau. Ce serait un soulagement si davantage de centres de test cantonaux pouvaient effectuer des tests le week-end. Pour l’instant en tout cas, on n'arrive pas à répondre à la demande actuelle.