Si certains se reconnaîtront sans doute dans le quotidien des «employés de bureau qui se lèvent tous les jours à 8h du matin», la situation est toute autre pour de nombreuses personnes, ouvriers du bâtiment ou caissières de la Migros. À neuf heures, beaucoup ont déjà une bonne partie de leur journée de travail derrière eux.
C'est ce qui rend cette phrase de Cédric Wermuth aussi amusante. En parlant de ceux qui font réellement tourner le pays selon lui et ceux que le PS se propose de défendre, Cédric Wermuth parle «des personnes qui se lèvent tous les jours à huit heures du matin pour faire le ménage, pour élever les enfants, pour faire toutes les choses qui sont résumées sous le terme de 'care'».
Se lever à 8 heures ? Le co-président du PS prête ainsi le flanc à ceux qui voient dans le PS un parti hors-sol, détaché de la vie des vraies gens. Un parti élitiste, en somme. Et les critiques sur les réseaux sociaux ne se sont pas faites attendre. Pour de nombreux internautes, cette déclaration aurait montré que le leader du PS n'a aucune idée de la notion de travail.
Cédric Wermuth se défend: «Je remarque simplement que la garde des enfants est encore considérée comme un travail non approprié et non viril pour beaucoup dans les étages de Gucci». Lui-même réveille habituellement ses deux enfants à 7 heures du matin, et à 8 heures, ils partent ensemble à la crèche et à l'école. Il considère que l'affirmation selon laquelle les travailleurs quittent le PS est une «pure fake news».
Le PS est-il en train de perdre les travailleurs?
La relation entre la social-démocratie et la classe ouvrière a été étudiée à plusieurs reprises. De nombreuses études réalisées pour la Suisse montrent que les travailleurs se sont détournés du PS dans les années 1980. Au milieu des années 1990, c'est l'UDC, avec ses slogans anti-étrangers et anti-UE, qui est devenu le parti le plus fort dans le milieu ouvrier.
Cependant, les études du professeur de politique suisse Silja Häusermann soutiennent la position de Cédric Wermuth sur le passé récent. C'est un «mythe» que de dire que la gauche perd des travailleurs au profit de la droite radicale, écrit-elle avec d'autres chercheurs. Depuis le début du millénaire, les partis sociaux-démocrates d'Europe occidentale ont perdu beaucoup plus d'électeurs au profit des partis verts, de gauche ou de centre-droit qu'au profit des partis populistes de droite comme l'UDC.
En outre, ce sont surtout les électeurs de la classe moyenne qui tourneraient le dos aux sociaux-démocrates. Un fort exode des couches sociales inférieures, auxquelles appartiennent les travailleurs classiques, n'a cependant pas pu être observé.