Il était attendu avec impatience, il est désormais là: le plan en douze points présenté par Pékin pour atteindre la paix en Ukraine. Les Etats-Unis et Kiev saluent l'initiative, une rencontre avec la Chine a même été proposée par le président ukrainien Volodymyr Zelensky.
Vendredi, le responsable russe des affaires étrangères Leonid Sloutski a qualifié le plan d'«équilibré», car il prend en compte les intérêts de sécurité de toutes les parties concernées. «Nous sommes orientés vers la paix, mais pas au détriment de la sécurité et de la souveraineté de la Russie», a écrit le président de la Commission des affaires étrangères du Parlement russe sur son blog via le réseau Telegram. Pendant ce temps, le chancelier allemand Olaf Scholz et le secrétaire général de l'OTAN Jens Stoltenberg, entre autres, doutent des intentions de la Chine.
Simona Grano, spécialiste de la Chine à l'Université de Zurich, est également sceptique. «Le plan de Pékin n'apporte pas de changements ou de solutions concrètes, il ne fait que répéter ce que les deux parties demandent», dit-elle à Blick. Et cela rend les recommandations peu viables. Pour gagner en crédibilité, la Chine devrait prendre clairement position vis-à-vis de la Russie et condamner la guerre et les atrocités.
La Chine a compris qu'elle devait changer de tactique
Le timing de la Chine concernant le plan de paix amène aussi des doutes sur ses intentions. Un jour plus tôt, le pays s'était abstenu sur une résolution des Nations unies, alors que 141 pays demandaient le retrait des troupes russes d'Ukraine. «Par conséquent, la Chine n'est ni crédible ni impartiale en tant que médiateur», poursuit l'experte.
Quel est donc l'objectif du gouvernement chinois avec ce plan, s'il ne s'agit pas d'une véritable solution en Ukraine? Simona Grano explique à Blick: «La seule raison pour laquelle nous assistons aujourd'hui à un revirement complet est que la Chine a compris, après trois ans de mauvaise planification économique et diplomatique de la part du Parti, qu'il fallait changer de tactique et être moins belliqueux.» Les antennes sont à nouveau tendues vers l'Occident.
La Chine va-t-elle livrer des drones kamikazes à la Russie?
Cependant, tout cela semble se résumer pour l'heure à de beaux discours sans action. Car selon des informations du «Spiegel», la Chine serait en train de négocier avec la Russie une livraison de drones kamikazes. En effet, 100 drones du prototype ZT-180, fabriqués par l'entreprise chinoise Bingo, devraient être livrés en avril.
Et ce n'est pas tout: Bingo devrait également aider la Russie à rendre possible la production de drones sur son propre territoire. Avec un objectif de 100 drones par mois. Il s'agirait du premier contrat officiel de livraison d'armement conclu entre la Russie et la Chine depuis la guerre. Le ministère chinois des Affaires étrangères dément, mais un éventuel apport de drones égratigne d'autant plus la crédibilité des intentions de paix de la Chine.
«C'est un exercice d'équilibre difficile»
Même si le contrat a été conclu par le gouvernement, «la Chine peut toujours prétendre que c'est la décision d'une seule entreprise et que le Parti empêchera le deal», explique Simona Grano.
«Néanmoins, étant donné que la Chine tente depuis longtemps de poursuivre son exercice d'équilibriste, ces positions contradictoires ne devraient pas nous surprendre.» Car selon elle, si l'on veut s'entendre avec tout le monde, il faut parfois faire le grand écart.
«C'est une délicate balance que la Chine a réalisé ces douze derniers mois, en essayant de ne pas compromettre davantage ses intérêts économiques sans prendre ses distances avec son allié idéologique, la Russie.» Simona Grano met en garde: «Les Etats européens devraient plus prêter attention à Pékin.»