Du Capitole au Bundestag
Les putschistes allemands avaient-ils des liens avec QAnon?

Les experts voient dans le projet de putsch contre le gouvernement allemand des parallèles avec la prise du Capitole américain en janvier 2021. Au centre des deux événements, le mouvement complotiste QAnon, particulièrement en vue pendant la pandémie.
Publié: 11.12.2022 à 16:25 heures
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Plus de 3000 policiers et unités spéciales ont perquisitionné mercredi des appartements, des bureaux et des entrepôts.
Photo: keystone-sda.ch
Tanja von Arx

C'est l'une des plus grandes descentes de police de l'histoire allemande. Au petit matin du 7 décembre, près de 3000 membres de la police et des forces spéciales ont perquisitionné plus de 130 appartements, bureaux et entrepôts dans toute l'Allemagne. Objectif de l'opération: démanteler une organisation terroriste issue du mouvement néonazi Citoyens du Reich. Ce dernier aurait planifié le renversement du gouvernement par la force.

Selon les informations fournies par les forces de l'ordre, 25 personnes ont été arrêtées dans les Länder de Bade-Wurtemberg, Bavière, Berlin, Hesse, Basse-Saxe, Saxe et Thuringe. Deux arrestations ont également eu lieu en Autriche et en Italie.

Liste d'ennemis et tentative de putsch

Les accusés auraient planifié, depuis novembre 2021, une attaque armée contre le Bundestag. Ils visaient l'arrestation de politiciens et envisageaient qu'une partie des forces de sécurité se rallie à eux. Le journal berlinois «Tageszeitung» rapporte qu'une «liste d'ennemis» a été établie par les conspirationnistes. Celle-ci comportait les noms de 18 journalistes et de politiciens de premier plan, dont la ministre des Affaires étrangères Annalena Baerbock. Dans le «Welt», le chancelier allemand Olaf Scholz a qualifié l'événement de «très grave incident».

La ministre allemande des Affaires étrangères Annalena Baerbock figurait sur cette liste.
Photo: IMAGO/NurPhoto

Selon l'Office fédéral de la police criminelle, 54 hommes et femmes sont concernés par la procédure. Dans plus de 50 lieux différents, les services de sécurité ont trouvé des fusils et des munitions, plus de 130'000 euros en liquide ainsi qu'une quantité considérable d'or et d'argent.

Un prince comme nouveau chef d'Etat

Âgé de 71 ans, celui qui se fait appeler Henri XIII, le prince Reuss, a été arrêté. Il est considéré comme le meneur du putsch. Selon le Ministère public de la Confédération, il était prévu qu'il devienne chef d'Etat. Le prince Reuss est issu d'une famille noble qui a régné jusqu'en 1920 sur l'est de l'actuel Land de Thuringe. Tous les descendants masculins de la maison portent le prénom Heinrich.

La juge et ancienne députée AfD au Bundestag Birgit Malsack-Winkemann figurent aussi parmi les personnes appréhendées. Comme l'a fait savoir la justice berlinoise, la femme de 58 ans n'est plus membre de la chambre civile dans laquelle elle exerçait jusqu'à présent. Elle s'est également vue retirer son badge d'accès qui lui permettait de pénétrer dans le Bundestag. Birgit Malsack-Winkemann avait été désignée par les putschistes comme ministre de la Justice.

Du cuisinier gastronome au chanteur ténor

Selon le «Spiegel», la cellule terroriste présumée est hétéroclite. Outre le prince et la juge, elle comprendrait un cuisinier gastronome, un maître couvreur, un pilote, un avocat titulaire d'un doctorat et un chanteur ténor. Une femme médecin aurait été responsable des «questions spirituelles» et deux médiums auraient dû vérifier la fiabilité des concurrents potentiels.

Le «New York Times» évoque quant à lui des liens directs avec le mouvement QAnon aux Etats-Unis. Les putschistes allemands se seraient inspirés de la prise du Capitole de janvier 2021. A l'aide de théories du complot, les Citoyens du Reich auraient augmenté leur nombre de fidèles de 2000 à 21'000 pendant la pandémie.

Les adeptes allemands de QAnon estiment que le gouvernement de Berlin a utilisé une «fausse pandémie» pour faire échouer un plan de libération du pays, avec notamment la participation de l'ancien président américain Donald Trump. Selon eux, l'Allemagne n'est pas une nation souveraine, mais une entreprise au service des Alliés depuis la Seconde Guerre mondiale.

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