La Hongrie a adopté le 15 juin dernier un texte interdisant la «promotion» de l'homosexualité auprès des mineurs. Cette loi prévoit que «la pornographie et les contenus qui représentent la sexualité ou promeuvent la déviation de l'identité de genre, le changement de sexe et l'homosexualité ne doivent pas être accessibles aux moins de 18 ans».
La législation controversée, qui a occupé les dirigeants européens en début de soirée au sommet de l'UE, a conduit 17 pays membres, dont la France, l'Allemagne, les Pays-Bas, l'Espagne et l'Italie, à interpeller dans une lettre les chefs d'Etat et de gouvernement de l'UE et le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres (invité au sommet) sur la nécessité de «faire respecter les valeurs européennes».
Le Premier ministre luxembourgeois Xavier Bettel a reproché au dirigeant souverainiste d'avoir franchi une «ligne rouge». «Etre homosexuel n'est pas un choix. Etre homophobe l'est», a renchéri le Belge Alexander De Croo, selon une source européenne.
Selon cette même source, le Suédois Stefan Löfven aurait averti que ses citoyens n'avaient pas envie «d'envoyer de l'argent à un pays» agissant de la sorte. Les fonds de l'UE représentent une manne importante pour la Hongrie, soit 4,48% du produit national brut en 2019.
Orban accuse ses critiques de ne pas avoir lu le texte
Le Premier ministre néerlandais Mark Rutte a carrément affirmé que la Hongrie, avec sa loi, n'avait «plus rien à faire dans l'Union européenne». Lors de la discussion, il a lancé à Viktor Orban que si les valeurs de l'UE ne lui convenaient pas, il n'avait qu'à activer l'article 50 du traité «qui a été créé pour cela» et quitter l'Union, comme l'ont fait les Britanniques, selon la même source.
Cette loi «ne me paraît pas conforme à nos valeurs», avait plus tôt jugé le président français Emmanuel Macron, espérant pouvoir convaincre le dirigeant hongrois d'un «changement de ce texte».
«La loi ne concerne pas les homosexuels mais la façon dont les parents veulent faire l'éducation sexuelle de leurs enfants», s'est défendu Viktor Orban dès son arrivée, accusant ses homologues européens de ne pas l'avoir lue. «La Hongrie ne veut pas quitter l'UE. Au contraire, nous voulons la sauver des hypocrites», a tweeté la ministre hongroise de la Justice, Judit Varga.
Le texte controversé a valu à Budapest une lettre de remontrances de la Commission, qui lui a donné jusqu'au 30 juin pour répondre. L'exécutif européen, gardien des traités, a le pouvoir d'entamer des procédures pour violation du droit européen pouvant mener à une saisine de la Cour de justice de l'UE et à des sanctions.
«Contact direct» avec Moscou pour l'UE
Après ces échanges orageux, les Européens doivent aborder l'épineuse question des relations avec la Russie, qui n'ont cessé de se détériorer depuis l'annexion de la Crimée et le début du conflit en Ukraine en 2014, et sont «au plus bas», selon le chef de la diplomatie de l'UE Josep Borrell.
Angela Merkel et Emmanuel Macron jugent nécessaire d'organiser des rencontres avec le président russe Vladimir Poutine pour traiter des sujets d'intérêt majeur pour l'UE, malgré les différends et les tensions. La chancelière allemande a estimé que l'Union européenne devait nouer un «contact direct» avec Moscou, une semaine après le premier sommet Biden-Poutine. «Il ne suffit pas que le président américain parle au président russe», a-t-elle lancé.
Cette initiative est soutenue par Vladimir Poutine. Mais elle suscite le rejet de plusieurs pays de l'UE, dont la Pologne et les pays baltes.
3,5 millards pour les réfugiés en Turquie
Lors du dîner, les dirigeants ont invité le président turc Recep Tayyip Erdogan à lever les derniers obstacles pour renouer les relations après une année de fortes tensions, insistant sur le respect des droits fondamentaux dans ce pays et sur le «règlement global du problème chypriote».
La Commission européenne a proposé d'allouer 5,7 milliards d'euros pour financer l'aide aux Syriens réfugiés en Turquie, au Liban et en Jordanie jusqu'en 2024. Une enveloppe de 3,5 milliards d'euros est destinée aux actions en faveur des 3,7 millions de Syriens installés en Turquie. Les modalités de ce financement doivent encore être décidées, a indiqué un diplomate.
L'UE a déjà alloué plus de 6 milliards d'euros dans le cadre d'un accord sur la migration conclu avec la Turquie en 2016, dont 4,1 milliards ont été décaissés.
(ATS)