Liberté de la presse aux Philippines
La journaliste prix Nobel Maria Ressa condamnée en appel

La journaliste philippine Maria Ressa, co-lauréate avec le Russe Dmitri Mouratov du prix Nobel de la Paix 2021, a perdu son procès en appel contre une condamnation pour diffamation en ligne.
Publié: 08.07.2022 à 22:28 heures
Son travail lui a valu ce que les défenseurs de la liberté de la presse considèrent comme une série d'accusations criminelles, d'enquêtes et d'attaques en ligne contre elle et son média. Elle fait face à huit affaires judiciaires dont celle de diffamation en ligne, pour laquelle elle a été libérée sous caution mais risque jusqu'à six ans de prison.
Photo: DUKAS

Maria Ressa et son ancien collègue Rey Santos Jr risquent de longues peines de prison, mais ils «utiliseront toutes les voies de recours légales à leur disposition», a déclaré vendredi son site d'information Rappler. L'affaire pourrait être portée devant la Cour suprême.

Rappler a regretté une décision «malheureuse», qui «affaiblit la capacité des journalistes à demander des comptes au pouvoir». «Ce qui est en jeu, en fin de compte, c'est notre démocratie, dont la force repose sur des médias qui ne sont ni menacés par l'Etat ni intimidés par des forces qui cherchent à faire taire les voix critiques», a-t-il ajouté.

Dans un communiqué vendredi, la présidente norvégienne du Comité Nobel, Berit Reiss-Andersen, s'est dite «profondément préoccupée que Maria Ressa soit poursuivie pour l'exercice de sa liberté d'expression».

Huit «affaires»

«Les critiques exprimées par l'intermédiaire de Rappler sont bien en deça de la liberté d'expression dans une société démocratique», a-t-elle souligné. Mme Ressa est depuis longtemps une critique virulente de l'ancien président Rodrigo Duterte et de sa guerre meurtrière contre la drogue, lancée en 2016.

Son travail lui a valu ce que les défenseurs de la liberté de la presse considèrent comme une série d'accusations criminelles, d'enquêtes et d'attaques en ligne contre elle et son média. Elle fait face à huit affaires judiciaires dont celle de diffamation en ligne, pour laquelle elle a été libérée sous caution mais risque jusqu'à six ans de prison.

Il y a moins de deux semaines, les autorités philippines ont ordonné la fermeture de Rappler pour avoir violé «les restrictions constitutionnelles et légales sur la propriété étrangère dans les médias de masse», quelques jours avant que l'ancien président Rodrigo Duterte ne quitte ses fonctions.

Mme Ressa a promis que Rappler continuerait à fonctionner en suivant la procédure légale, et espéré que la situation s'améliorerait avec le nouveau président élu Ferdinand Marcos Jr, qui a succédé à Rodrigo Duterte le 30 juin.

Médaille vendue pour les enfants ukrainiens

Ce dernier a donné peu d'indices sur son point de vue concernant le site web et la question plus large de la liberté d'expression. Des militants craignent qu'il n'aggrave la situation des droits humains et de la liberté d'expression dans le pays. Maria Ressa et le journaliste russe Dmitri Mouratov ont reçu le prix Nobel de la Paix en octobre pour leurs efforts en faveur de «la liberté d'expression».

Le journal Novaïa Gazeta dirigé par Dmitri Mouratov a annoncé fin mars qu'il était contraint de suspendre ses publications papier et en ligne en Russie au moins jusqu'à la fin de la guerre lancée par Moscou en Ukraine, en plein durcissement du Kremlin contre les voix dissonantes.

M. Mouratov a vendu en juin aux enchères à New York sa médaille de prix Nobel de la paix, récoltant 103,5 millions de dollars au profit des enfants victimes du conflit en Ukraine.

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