Le parquet de Paris a confirmé à l’AFP avoir reçu lundi une plainte pour tentative de viol visant Damien Abad, révélée par Mediapart, précisant que celle-ci était «actuellement en cours d’analyse».
Selon le site d’investigation, elle a été déposée par une «élue centriste», qui accuse le ministre d’avoir tenté de la violer lors d’une fête organisée chez lui, à Paris, au premier semestre 2010.
«Une nouvelle fois, je conteste avec la plus grande fermeté toute accusation de tentative de viol ou d’agression sexuelle», a de son côté affirmé le ministre dans une déclaration écrite transmise à la presse.
«Je ne laisserai pas ces accusations mensongères et scandaleuses sans réponse. Dès ce jour, j’ai demandé à mes avocats de déposer une plainte en dénonciation calomnieuse», a-t-il ajouté.
«C’est une tentative d’intimidation des autres victimes», a réagi auprès de l’AFP Me Raphaële Bialkiewicz, avocate de la plaignante, assurant que cette dernière était «sereine».
«Ma cliente a parlé pour que ça ne se reproduise plus, elle répond à l’appel d’Elisabeth Borne» qui avait invité mi-juin les femmes victimes de violences sexuelles à déposer plainte, a déclaré Me Raphaële Bialkiewicz.
«J'avais peur, j'étais sidérée»
Mi-juin, Mediapart avait publié le témoignage de cette femme sous le prénom d’emprunt de «Laëtitia». Elle était, lors des faits qu’elle dénonce, présidente d’une fédération du mouvement de jeunesse du Nouveau centre, dont Damien Abad, alors député européen, était le président national.
Le soir des faits, selon son récit, Damien Abad lui a «offert un verre» au fond duquel elle a vu «quelque chose»: méfiante, elle est allée recracher sa gorgée aux toilettes. Toujours selon ses dires, Damien Abad l’attendait derrière la porte et tout est allé «très vite»: l’eurodéputé l’aurait «poussée dans une pièce en face» puis aurait tenté de la contraindre à une fellation.
«J’avais peur, j’étais sidérée. Je me suis débattue, je l’ai frappé dans le ventre», raconte-t-elle. «Laëtitia» dit avoir finalement pu «se défaire» de son agresseur présumé et sortir de la pièce grâce à l’irruption d’un convive.
Pas la première accusation de violences sexuelles
Il s’agit de la troisième femme à accuser le ministre de violences sexuelles, mais à ce jour, aucune enquête n’a été ouverte à la suite de ces accusations.
L’une d’elles, Margaux (prénom modifié) – qui a confirmé son récit à l’AFP – a déposé plainte à deux reprises, mais ces deux plaintes ont été classées sans suite en 2012, puis en 2017, d’abord pour «carence de la plaignante», puis «faute d’infraction suffisamment caractérisée».
Pour l’autre, Chloé, qui a dénoncé des faits qui se seraient déroulés lors d’une soirée à l’automne 2010, un signalement avait été effectué par l’Observatoire des violences sexistes et sexuelles, mais le parquet de Paris avait indiqué fin mai ne pas ouvrir d’enquête «en l’état», faute «d’élément permettant d’identifier la victime des faits dénoncés».
Son témoignage avait en effet été transmis à la justice sous une forme anonymisée. Le dépôt d’une plainte pourrait dès lors changer la donne.
Nombreux appels à la démission
Depuis la parution des témoignages dans Mediapart relayant les accusations de viol, plusieurs témoignages anonymes de membres du parti Républicain (LR) ont fait en outre état d’un comportement «lourdingue», voire «déplacé», du ministre, supposément bien connu de son entourage politique.
Ces derniers temps, les appels à la démission de Damien Abad, ex-président du groupe LR à l’Assemblée nommé ministre par Elisabeth Borne et confortablement réélu le 19 juin pour un troisième mandat de député de l’Ain, se sont multipliés dans les rangs de l’opposition et des associations féministes.
Le 20 juin, ce sont ainsi 200 femmes, élues, journalistes, féministes, artistes, qui ont fait une demande en ce sens dans une tribune publiée par le Monde.
La veille, l’écologiste Sandrine Rousseau avait assuré que les députés de la Nupes feraient «le chahut nécessaire» pour couvrir sa voix à l’Assemblée nationale.
(ATS)