Les arguments des coûts pour les ménages et des interdictions concernant notamment les chauffages à mazout et au gaz ont à l'évidence pesé dans la balance, constate avec regret Cristina Gaggini, directrice romande d'economiesuisse, engagée pour le oui.
Pour l'UDC, qui avait lancé le référendum avec la Grève du climat, les arguments selon lesquels un «oui» entraînerait une hausse des prix pour les automobilistes, le chauffage et les vacances ont été décisifs. «Ce qui est déjà prévu suffira pour que la Suisse respecte ses engagements internationaux», a assuré le conseiller national Pierre-André Page (FR).
«Cette loi allait dans la mauvaise direction: elle ciblait les individus et laissait de côté les grands pollueurs», a estimé pour sa part Franziska Meinherz, du comité référendaire pour une écologie sociale.
Du côté des partisans du oui, economiesuisse demande désormais que soient incluses dans le prochain texte discuté au Parlement les réserves émises par la population, et donc qu'on mise davantage sur les incitations positives au lieu d'augmenter la taxe sur le CO2.
Elle insiste sur le fait que doit être gardée la possibilité pour certaines entreprises d'être exemptées de la taxe en question et qu'il faut élargir la possibilité de réduire les émissions de gaz à effet de serre à l'étranger.
Le WWF, dans le comité pour le oui, entend de son côté s'engager pour des mesures dans différents secteurs, comme la place financière, le trafic aérien ou l'agriculture. Elle évoque aussi l'élaboration d'un «plan d'urgence pour lutter contre la crise climatique».
La large alliance qui soutenait la loi «constitue une base solide pour former une coalition volontaire associant une grande partie de la population», pense l'ONG. Sa mission sera de «faire avancer la cause d'un abandon rapide du pétrole et du gaz».
Les Verts, pour qui les compagnies pétrolières et gazières et leur lobby au sein de l'UDC et du PLR ont empêché un oui, et le PS ont aussi dans le viseur la place financière suisse. Selon la coprésidente du PS, Mattea Meyer, qui s'exprimait sur Blick TV, ce secteur est «la principale cause de la crise climatique».
Le PS et les Verts espèrent que le PLR et le Centre offriront leur soutien pour rendre cette place plus verte. Les Verts et l'Alliance climatique comptent lancer une initiative commune en ce sens.
La place financière suisse est aussi dans le viseur de la Grève du climat, pour qui une politique écologiste doit impérativement aller de pair avec une politique sociale.
En attendant, le résultat de dimanche ralentit massivement la protection du climat, déplorent les Verts, comme l'Union syndicale suisse (USS). Le Centre, pour qui le vote le même jour sur les deux initiatives anti-pesticides a peut-être été fatal à la loi sur le CO2, reconnaît aussi la nécessité d'agir.
Un parti, le PLR, qui avait annoncé un tournant vers plus d'écologie et défendait le oui, est montré du doigt. Pour sa présidente Petra Gössi, le projet de compromis élaboré avec les partis bourgeois est probablement allé trop loin pour la population. Aux yeux du PLR, c'est aux Verts de «prendre leurs responsabilités et proposer des solutions qui puissent convaincre une majorité.»
Pour la conseillère nationale verte Delphine Klopfenstein Broggini (GE), qui s'exprimait sur la RTS, le résultat de dimanche montre au contraire clairement que «le PLR n'a pas réussi à convaincre son propre électorat». Pour le politologue Claude Longchamp, la question va se poser pour le PLR de savoir quelle direction il devra prendre à l'avenir, a-t-il déclaré sur Blick TV.
«Très déçue», l'ATE fustige le lobby du pétrole et ses «acolytes de l'UDC», qui sont «parvenus à discréditer une loi pourtant très équilibrée par une campagne honteuse, fondée sur la peur».
Elle regrette particulièrement que des mesures en matière de politique des transports ne puissent être appliquées immédiatement, notamment la taxe sur les billets d'avion ou le financement du développement des trains de nuit.
L'USS souligne que les conséquences du réchauffement frapperont avant tout les personnes à bas et moyens revenus. Elle relève le «rôle central de la question sociale». Pour elle, la transition vers une économie plus respectueuse de l'environnement devra mieux tenir compte du pouvoir d'achat. «Toute taxe incitative doit ainsi être autant que possible redistribuée», estime-t-elle.
(ATS)