Etude de l'EPFZ
Le taux de reproduction se lit dans les eaux usées

Il est possible d’estimer rapidement et à moindre coût le taux de reproduction du coronavirus à partir des eaux usées, selon une étude de l'EPFZ. La méthode pourrait également être utilisée pour d'autres pathogènes sur lesquels on ne dispose pas de données cliniques.
Publié: 15.12.2021 à 13:19 heures
|
Dernière mise à jour: 15.12.2021 à 13:38 heures
Testée à Zurich et aux Etats-Unis, la méthode a prouvé son efficacité, à condition d’analyser les eaux usées au moins trois fois par semaine (archives).
Photo: GAETAN BALLY

Depuis l’apparition du virus Sars-Cov-2 du coronavirus, nombre de mesures sanitaires ont été prises en fonction de l’évolution de la pandémie, plus précisément en fonction du taux de reproduction du virus, le fameux «R». Cette valeur indique combien de personnes, en moyenne, sont infectées par une personne contaminée. Elle traduit la dynamique de transmission de la maladie.

Actuellement, le taux de reproduction du virus est estimé à partir des informations disponibles dans la population, les données cliniques, nombre de cas positifs recensés, nombre d’hospitalisations ou encore de décès, a indiqué mercredi le Fonds national suisse (FNS) dans un communiqué.

L'équipe de Jana Huisman, post-doctorante à l’Ecole polytechnique fédérale de Zurich (EPFZ), montre dans une étude en phase de prépublication qu’il est aussi possible d’estimer de manière fiable le taux de reproduction du virus en surveillant sa présence dans les eaux usées.

Charge virale des eaux usées

Les personnes infectées excrètent le virus dans les égouts, par exemple en se brossant les dents ou en allant aux toilettes. Selon le nombre de personnes malades à un moment donné, les eaux usées contiennent plus ou moins de traces du virus.

«Nous déterminons la charge virale des eaux usées en réalisant un test semblable aux tests PCR que l’on fait sur les personnes. En fait, nous vérifions la présence de matériel génétique du virus dans les eaux usées», explique Jana Huisman, citée dans le communiqué.

Il faut ensuite passer de la charge virale au taux de reproduction du virus. C’est là qu’entre en jeu le modèle mathématique mis au point par l’équipe de scientifiques.

«A partir des mesures de la charge virale dans les eaux usées, il permet d’estimer combien de personnes sont infectées par le virus et de suivre la dynamique dans le temps», ajoute Jana Huisman. Ce qui permet d’estimer le taux de reproduction du virus.

Technique rapide, moins coûteuse et indépendante des données cliniques

Testée à Zurich ainsi qu’aux Etats-Unis, la méthode a prouvé son efficacité – les valeurs R sont comparables à celles estimées avec les données cliniques – à condition d’analyser les eaux usées au moins trois fois par semaine. D’après les scientifiques, ce rythme représente un optimum en termes de précision et de coûts.

Le fait que le virus Sars-Cov-2 soit surveillé dans les eaux usées n’est pas nouveau. Mais grâce à la méthode développée par les scientifiques, il est désormais possible de traduire rapidement et à moindre coût ces mesures en une valeur directement utile pour les épidémiologistes.

«Et ce, indépendamment des données cliniques», précise Jana Huisman. Cet aspect est important. En effet, les données cliniques peuvent présenter des biais. Par exemple, les critères pour se faire tester peuvent changer, ce qui fait faussement varier le nombre de cas positifs décelés. De même, les critères d’hospitalisation ou la définition des décès liés au Covid-19 peuvent aussi changer.

Autre avantage: ce procédé permettra de continuer à surveiller le coronavirus lorsque les tests sur la population seront moins fréquents et livreront moins d’informations. Il pourrait également être utilisé pour la surveillance de pathogènes pour lesquels on ne dispose pas de données cliniques, par exemple d’autres coronavirus humains, d’entérovirus, de norovirus, de rotavirus ou même de la grippe, conclut le FNS.

(ATS)

Vous avez trouvé une erreur? Signalez-la