Black Lives Matter
Une plaque rappellera le passé esclavagiste de David de Pury

La Ville de Neuchâtel trouve une porte de sortie concernant le maintien ou non de la statue de David de Pury, contestée en été 2020 dans le sillage du mouvement «Black Lives Matter». Elle déposera notamment une plaque explicative aux abords du monument érigé en 1855.
Publié: 25.08.2021 à 11:59 heures
La statue de David de Pury avait été maculée de peinture rouge en juillet 2020, marquant une nouvelle étape pour la Ville de Neuchâtel dans sa politique de traitement des marques mémorielles (archives).
Photo: LAURENT GILLIERON
ATS

«La Ville de Neuchâtel veut faire toute la lumière sur son passé, y compris les zones d’ombre», a indiqué mercredi à Neuchâtel sa présidente Violaine Blétry-de Montmollin. Après avoir reçu deux pétitions concernant le sort de la statue, elle répond ainsi à leurs auteurs, à leur grande satisfaction, par un rapport d’information.

Porté par l'exécutif et le législatif, ce dernier prévoit un programme d’action à court, moyen et long terme en réponse aux événements internationaux survenus il y a un peu plus d'un an. Il vise à mieux faire connaître les marques mémorielles présentes dans les rues, tout en luttant activement contre les discriminations.

Assumer les héritages historiques difficiles

«La volonté de trouver une position commune et concertée illustre le sérieux avec lequel nous considérons ces problématiques», a insisté Violaine Blétry-de Montmollin. «La démarche apporte des réponses nuancées et équilibrées», a complété son collègue au Conseil communal Thomas Facchinetti, en charge du dossier.

Le rapport sera présenté le 6 septembre au Conseil général. Il est le fruit d'intenses réflexions. Un groupe de travail a planché sur le dossier pendant un an, à l’écoute des pétitionnaires, des communautés afro-descendantes et autres acteurs concernés, pour mieux comprendre leurs motivations et trouver des réponses adéquates.

«Il s’agit d’assumer les héritages historiques, y compris les aspérités et les facettes sombres ou contestables des marques mémorielles présentes dans l’espace public, tout en rendant largement accessibles les nouvelles connaissances historiques», a résumé Mireille Tissot-Daguette, présidente de la commission ad hoc.

Une plaque sera donc installée l'an prochain devant la statue. Le texte a été travaillé et remanié à plusieurs reprises par le comité de pilotage «Mémoire et espace public», avec la volonté d'allier précision et concision. La version finale, qui se déploie en quatre paragraphes, a été agréée par toutes les parties.

Dans la rédaction, l’équilibre a été recherché pour rendre à la fois une humanité aux personnes réduites en esclavage, de ne pas accuser David de Pury de faits historiquement non avérés et de remettre les éléments dans un contexte économique plus large. Le texte sera traduit en anglais et allemand sur la place Pury.

Le futur de la place Pury s'ancre dans le passé

A proximité du monument, plusieurs installations visuelles ou sonores sont prévues. Un code QR renverra à des informations plus détaillées et à la recherche. Des plaques figureront ultérieurement sur des bâtiments de la ville, dont les anciens propriétaires sont liés au commerce triangulaire, à l’esclavage ou à l’abolitionnisme.

A moyen et long terme, Neuchâtel entend aussi soutenir et valoriser la recherche historique. Elle mettra notamment sur pied un parcours pédagogique multimédia intitulé «Neuchâtel, passé colonial». Dans dix ans, la place Pury pourrait être réaménagée pour redevenir une «vraie belle place publique» reliée au lac par voie piétonnière.

Dans la nuit du 12 au 13 juillet 2020, la statue de bronze de David de Pury, installé sur la place éponyme, avait été maculée de peinture rouge, dans le sillage du mouvement «Black Lives Matter». Une première pétition exigeait son démontage, alors qu'une seconde demandait a contrario son maintien, assorti d’une plaque explicative.

Pour mémoire, David de Pury (1709-1786) était un négociant neuchâtelois établi à Lisbonne. A sa mort, l'homme, qui doit en partie sa fortune à l’exploitation d’esclaves, lègue à sa ville natale une fortune considérable qui a permis la construction de plusieurs bâtiments emblématiques du chef-lieu cantonal.

Dans un registre similaire, le Conseil communal avait décidé en 2018 de reconsidérer, parmi les nombreux hommages rendus en ville de Neuchâtel à Louis Agassiz, scientifique de renom, le nom d’une place qui lui était dédiée, en le cédant à Tilo Frey. Cette dernière a été en 1971 la première femme du canton élue au parlement fédéral.

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