La plus grande erreur d'une vie peut s’avérer être la meilleure décision que l’on ait jamais prise. Dadvan Yousuf, 21 ans, en sait quelque chose, lui qui est le plus jeune self-made-milliardaire de Suisse. «Forbes», la «NZZ» et d’autres médias le qualifient de «crypto-miracle». Blick a rencontré le jeune homme pour un entretien à l’hôtel de luxe Dolder de Zurich, où il a ses habitudes.
Yousuf est assis dans un fauteuil en cuir du luxueux bar de l'hôtel et regarde son smartphone: son outil de travail, son quotidien. Au poignet, il porte une montre Richard Mille d’une valeur de deux millions de francs. Un luxe qu'il assure ne pas prendre pour acquis: kurde irakien, Yousuf est arrivé en Suisse en 2003 en tant qu’enfant réfugié. «Aujourd’hui encore, j’ai mal au ventre quand je franchis une frontière», nous explique-t-il.
Jouets vendus dans la rue
Yousuf a grandi dans un appartement social à Ipsach, dans le Canton de Berne. Sa famille n’a presque pas d’argent et ne peut pas soutenir la grand-mère qui doit se faire opérer en Irak. Yousuf veut sortir de cette situation. Il se tourne vers l'Internet, en quête de solutions. Il tape sur Google «Qu'est-ce qui est mieux qu'une banque pour un placement?», ou alors «Se faire de l'argent». C’est ainsi qu’il tombe par hasard sur un forum consacré aux bitcoins. A ce stade, il comprend seulement qu’ils permettent d’envoyer rapidement de l’argent et qu’il a besoin d’une carte de crédit pour le faire.
L’enfant de onze ans à l'époque, décide alors de vendre tous ses jouets dans les rues de son quartier. «Parfois, les gens m’offraient simplement un billet de 50 francs». Il donne l’argent liquide ainsi gagné à son père et obtient en échange sa carte de crédit, après quelques discussions.
En 2011, Yousuf achète des bitcoins pour une valeur de 300 francs. La question qu'il se pose est: comment envoyer l’argent en Irak? Après des recherches intensives et infructueuses, il finit par renoncer à contrecœur. Il regrette alors, se voulant d’avoir gaspillé de l'argent dans des bitcoins: «je pensais que c’était la plus grosse erreur de ma vie», raconte le jeune Bernois.
Ce n’est qu’un an plus tard qu'il atterrit à nouveau sur la même plateforme et qu'il constate avec étonnement que ses 300 francs se sont transformés en 11’000 francs. C'est une révélation: il comprend le potentiel des bitcoins.
Succès grâce à un algorithme
En secret, l’adolescent construit petit à petit son empire cryptographique en parallèle à son apprentissage d’employé de commerce. Il s'y met en autodidacte. «J'ai percé lorsque j’ai programmé un algorithme qui m’a facilité la tâche», explique Yousuf.
En 2016, le jeune homme investit 150'000 francs dans la cryptomonnaie Ethereum. Tout arrêter et attendre que l'argent tombe sur un compte n'est pas une option: «Au début, ce n’était pas possible parce que je ne pouvais pas ouvrir de compte bancaire avec le statut de réfugié. Ensuite, malgré mon permis B, ce n’était pas possible non plus, car je craignais que la police ne se présente immédiatement à ma porte avec de telles sommes d’argent», raconte Yousuf. Aujourd’hui, il n’a toujours pas de passeport suisse. Mais plusieurs cantons le lui délivreraient sans hésiter s’il devenait contribuable chez eux, précise le jeune homme.
Tout change réellement pour Dadvan Yousuf en décembre 2020. Il révèle à sa famille qu’il a plusieurs millions de côté. Sans plus attendre, il rembourse au canton de Berne l’aide sociale touchée par sa famille sur les 20 dernières années et loue pour ses parents une maison avec piscine ainsi qu'une nouvelle voiture. «J’avais atteint l’objectif de faire sortir ma famille de la pauvreté», s'exclame-t-il avec fierté.
«Apparemment, je suis déjà milliardaire»
De son côté, il fait ses valises et s’installe pendant près d’un an dans l’hôtel de luxe Dolder à Zurich, car il peut y payer en bitcoins. Ce luxe lui coûte des millions. A-t-il ainsi dépensé toute sa fortune en bitcoins? Non, loin de là.
Lors de notre entretien, il nous souffle: «je suis si près de mon premier milliard...» Puis le Bernois sort son téléphone portable. «Ah! Apparemment, je suis déjà milliardaire!» Il rit brièvement à gorge déployée et range son smartphone comme si de rien n'était.
Une telle histoire de conte de fée n'est-elle pas trop belle pour être vraie? Blick a pu consulter en exclusivité sa déclaration d’impôts de l’année 2020. On y trouve la liste de sa fortune imposable en crypto-monnaies: 189 millions de francs suisses. Et sa fortune totale: 270 millions de francs suisses. Le document montre également dans quelles crypto-monnaies Yousuf a investi et pour combien. «Je possède au total 416’000 coins de la cryptomonnaie Ethereum». Multiplié par la valeur actuelle du cours qui est de 3090 francs, il arrive à un total de 1,26 milliard de francs.
«Les NFTs seront très en vue sur le marché».
Avec cette richesse fraîchement acquise, le crypto-investisseur veut désormais changer le monde. «Mon objectif est de lutter contre la pauvreté mondiale». Pour cela, Yousuf a créé une fondation et lancé ainsi la première plateforme de crypto-éducation au monde. «Je veux permettre à tous d’apprendre de manière ludique comment investir dans les cryptomonnaies», explique celui qui a également créé sa propre devise numérique.
Pour lui, tout ce qui est numérique est synonyme d'avenir. C’est pourquoi il a déjà investi en 2018 dans ce que l’on appelle les Non-Fungible Tokens (NFTs): «Je suis persuadé qu’à long terme, ils seront très en vue sur le marché», prédit le milliardaire. Les NFTs offrent la possibilité de protéger les produits numériques par des droits d’auteur. «Il est ainsi possible de vendre une œuvre d’art numérique comme une pièce unique», explique Yousuf.
Le plus jeune self-made-milliardaire de Suisse a encore de beaux jours devant lui. Il le dit lui-même: «J’ai 21 ans et je suis milliardaire. Un jour, je serai peut-être le Suisse le plus riche». Le parcours de Dadvan Yousuf l’a fait passer du statut d’enfant réfugié à celui de milliardaire. Il le doit à ce qu’il a considéré sur le moment comme la plus grande erreur de sa vie.
(Adaptation par Thibault Gilgen)