Violences conjugales
Moscou doit modifier son cadre légal (CEDH)

La Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) a enjoint mardi à Moscou de modifier «de toute urgence» son cadre juridique. Ce dernier ne contient en effet «aucune définition» des violences conjugales, un fléau en Russie qui lui vaut une nouvelle condamnation mardi.
Publié: 15.12.2021 à 11:00 heures
La CEDH a déjà pointé dans le passé l'absence en Russie de cadre juridique reconnaissant ces violences, comme dans un arrêt de juillet 2019 déplorant "les modifications législatives de 2017 qui dépénalisent les agressions perpétrées sur des proches".
Photo: MAURIZIO GAMBARINI

«Le système juridique russe ne renferme aucune définition de la notion de 'violences domestiques', ni aucune disposition matérielle ou procédurale adéquate» permettant «d'ouvrir des poursuites contre des faits de cette nature ou d'ordonner des mesures d'éloignement ou de protection», s'agace la CEDH dans un arrêt qui donne raison à quatre femmes victimes de la violence de leurs anciens partenaires.

L'une d'elles, à qui la Russie devra verser plus de 330'000 euros au titre notamment de ses frais médicaux, avait eu les mains tranchées par son époux. Sa main gauche avait pu être regreffée, sans redevenir «complètement fonctionnelle», explique la Cour.

La CEDH a déjà pointé dans le passé l'absence en Russie de cadre juridique reconnaissant ces violences, comme dans un arrêt de juillet 2019 déplorant «les modifications législatives de 2017 qui dépénalisent les agressions perpétrées sur des proches».

«Un constat de violation de la Convention» européenne des droits de l'homme, ratifiée par Moscou, «entraîne pour l'Etat défendeur l'obligation juridique» d'adapter son droit pour «mettre fin» à cette violation, rappelle mardi la Cour, qui «invite le gouvernement (russe) à procéder sans plus tarder à des modifications législatives» et à «élaborer une réponse globale et ciblée aux violences faites aux femmes».

La Russie doit intégrer «dans son droit interne une définition de la notion de violences domestiques» couvrant «divers types de violence» (physique, sexuelle, psychologique, économique) et ériger «les actes de violences domestiques en infraction» réprimées par des «peines appropriées», insiste la CEDH. Celle-ci invoque l'article 46 de la Convention, texte qui définit le caractère contraignant de ses arrêts.

Elle demande également un «plan d'action pour changer le regard du public à l'égard des violences sexistes» faites aux femmes. «Tant que les mesures susmentionnées n'auront pas été mises en oeuvre, la Cour continuera à traiter les affaires similaires dans le cadre de la procédure simplifiée et accélérée», prévient la CEDH.

«C'est un arrêt qui fait jurisprudence», décrypte une source au sein de la CEDH. «La Cour demande à la Russie un certain nombre de choses et lui fait remarquer que si elle ne fait rien, les affaires (similaires) qui viendront devant elle seront jugées à l'aune de ce qui a été demandé dans cet arrêt», souligne-t-on de même source.

(ATS)

Vous avez trouvé une erreur? Signalez-la