Vintage mais pas écolo du tout
Le retour des vinyles met la planète à rude épreuve

Une entreprise suisse a recommencé à fabriquer des vinyles. Mais le retour de ces disques en plastique est un poison pour l'environnement. Certains experts de l'industrie proposent déjà des alternatives plus écologiques et responsables. Explications.
Publié: 15.06.2022 à 06:09 heures
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Baptême de disque à l'usine: à Neuenhof (AG), on presse à nouveau des disques depuis cette semaine. Le chef d'Adon Andreas Krüsi (à gauche) avec le musicien suisse Philipp Fankhauser.
Photo: zvg
Peter Aeschlimann

Délicieusement vintage, les disques en vinyle connaissent un regain de popularité auprès des mélomanes. À Neuenof, en Argovie, après 20 ans d’arrêt, on fabrique à nouveau des vinyles en Suisse. «La presse tourne jour et nuit», se réjouit Andreas Krüsi, le patron de l’entreprise Adon.

Le bluesman Philipp Fankhauser a ouvert le bal mardi dernier, et les artistes font désormais la queue devant l’usine depuis la reprise de l’activité. Andreas Krüsi affirme avoir reçu plus de 100 commandes: «Nous sommes complets pour les prochains mois.»

Le vinyle fait son grand retour

Alors que des groupes des années 1990 signent leur retour sur les scènes de concert et dans les hit-parades, le vinyle fait son come-back dans le monde entier. En Suisse également, les ventes sont à la hausse.

En 2021, le chiffre d’affaires des disques longs a atteint 4,8 millions de francs dans notre pays, soit une augmentation de 18%. Des performances qui n’avaient plus été atteintes depuis 1991. Sans les problèmes d'approvisionnement et le blocage de la production dans les usines de pressage, il aurait même été possible de doubler ce chiffre, estime Ivo Sacchi, le président de l’association professionnelle.

Un désastre pour l’environnement

Mais le renouveau du vinyle est loin de réjouir tout le monde. Les écologistes tirent la sonnette d’alarme: la production d’un disque vinyle nécessite beaucoup d’énergie et la matière de fabrication première est le PVC. Ce dernier est un dérivé du pétrole qui fait tourner des usines très polluantes. Le pressage se fait sur les mêmes machines qu’il y a 50 ans, or ces dernières n’ont pas été optimisées selon les normes énergétiques actuelles.

De nombreux musiciens sont conscients de cette contradiction entre écologie et production de leurs titres sur vinyle. La chanteuse zurichoise Evelinn Trouble est empruntée: «Cela n’a peut-être aucun sens sur le plan écologique, mais pour moi, en tant qu’artiste indépendante, le vinyle est une source de revenus importante, notamment lors des concerts.» Son dernier EP («Live at Moods») n’est malgré tout pas sorti en format disque fin mai. Même si l’artiste devait ainsi décevoir son public, elle pourrait s’imaginer renoncer totalement au vinyle à l’avenir. «À moins qu’il n’y ait une alternative écologique», nuance-t-elle.

Le PET pour remplacer les vinyles

En Angleterre, Marc Carey, de la société Evolution Music, travaille sur une matière première en bioplastique qui devrait bientôt remplacer le PVC dans la production de disques en vinyle. «Nous devons créer un nouveau système, car l’ancien est nocif pour l’homme et la planète», martèle Marc Carey.

Son bioplastique est entièrement organique et compostable. Et il peut être transformé en LP avec les machines existantes. On entend encore de légers bruits parasites lors des tests de pressage, mais il s’agit du dernier défaut de cette alternative. Les premiers disques «verts» devraient être commercialisés dès septembre.

Le Néerlandais Harm Theunisse, de Green Vinyl Records, a lui aussi fait un premier pas vers une production plus durable. Il fabrique dans son usine des disques en PET. Le procédé nécessite 90% d’électricité en moins, l’empreinte carbone des disques éco-vinyles est deux fois moins importante que celle d’un disque des Beatles des années 1960. Harm Theunisse est convaincu que le vinyle vert sera la nouvelle norme: «Il a le toucher d’un disque, l’apparence d’un disque et le son d’un disque.»

En Suisse, l’éco-vinyle semble également avoir un avenir prometteur. Chez Adon, en Argovie, on attend avec impatience la nouvelle technologie. «Le bioplastique est absolument à l’ordre du jour, déclare le CEO, Andreas Krüsi. Si cela convient au niveau du son, nous suivrons le mouvement.»


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