L'essor de l'intelligence artificielle (IA) générative s'accompagne d'une inquiétude croissante sur son empreinte environnementale, qui sera l'un des thèmes majeurs du sommet international pour l'action sur l'IA à Paris les 10 et 11 février. Tour d'horizon en cinq chiffres clés:
10x plus qu'une recherche Google
Chaque requête sur ChatGPT, le robot conversationnel d'OpenAI capable de générer toutes sortes de contenus sur simple demande en langage courant, consomme 2,9 Wh d'électricité. C'est dix fois plus qu'une recherche sur Google, d'après l'Agence internationale de l'énergie (AIE). Or OpenAI revendique désormais 300 millions d'utilisateurs hebdomadaires, avec environ 1 milliard de requêtes envoyées chaque jour.
Au-delà de ChatGPT, qui a popularisé l'IA générative à son lancement en 2022, il existe des myriades de robots conversationnels et, rien qu'en France, près de 70% des 18-24 ans déclarent utiliser l'IA générative, selon une enquête Ifop.
1,4% de la consommation mondiale
Les data centers, qui stockent les données et fournissent les énormes capacités de calcul requises par l'intelligence artificielle, sont le socle de cette technologie. En 2023, ces infrastructures du numérique ont représenté près d'1,4% de la consommation électrique mondiale, selon une étude de Deloitte.
Avec la croissance rapide des usages liés à l'IA générative, ce chiffre devrait presque tripler d'ici 2030, pour atteindre 3% de la consommation électrique mondiale, soit 1000 TWh. Cela correspond à la consommation électrique annuelle combinée de la France et l'Allemagne, d'après le cabinet britannique.
De son côté, l'AIE table sur une hausse de plus de 75% des besoins en électricité des centres de données, poussés par l'IA et les cryptomonnaies, en 2026 par rapport à 2022 (un peu plus de 800 TWh contre 460 TWh). A ce rythme, 40% des data centers dédiés à l'intelligence artificielle seront confrontés à un approvisionnement en électricité insuffisant d'ici 2027, selon une étude du cabinet américain Gartner.
300 tonnes de CO2
L'entraînement d'un grand modèle de langage, capable de produire du texte, génère près de 300 tonnes de CO2, soit l'équivalent de 125 allers-retours entre New York et Pékin, ont estimé des chercheurs de l'université américaine Massachusetts Amherst en 2019.
Des chercheurs d'Oxford sont arrivés à peu près à la même conclusion en 2021, estimant qu'une seule session d'entraînement de GPT-3, le modèle d'OpenAI qui a sous-tendu ChatGPT, produisait 224 tonnes de CO2. Or les entreprises doivent entraîner des milliers de modèles pour parvenir à des avancées.
Il est néanmoins compliqué d'évaluer avec précision l'émission de gaz à effet de serre de l'IA générative, de nombreux chercheurs et institutions internationales pointant un manque d'information sur les conditions de fabrication des modèles, les centres de données et l'absence de normes mondiales de mesure.
6,6 milliards de m3 d'eau
GPT-3 consomme à peu près un demi-litre d'eau pour générer 10 à 50 réponses, selon une estimation plutôt prudente de chercheurs américains de l'université de Californie à Riverside et de l'université du Texas à Arlington. Les centres de données nécessitent par ailleurs des systèmes de refroidissement qui consomment de grandes quantités d'eau.
En tout, la demande accrue pour l'intelligence artificielle à travers le monde devrait représenter entre 4,2 et 6,6 milliards de mètres cubes d'eau en 2027, ce qui correspond à quatre à six fois la consommation annuelle du Danemark, souligne l'étude publiée en 2023.
Cartes graphiques, serveurs, cartes mémoire: l'intelligence artificielle générative a généré 2.600 tonnes de déchets électroniques en 2023, selon une étude parue dans la revue scientifique Nature Computational Science.
2,5 millions de tonnes de pollution en 2030
Avec le boom de l'IA et sans aucune mesure prise pour limiter cette pollution, ce chiffre pourrait atteindre 2,5 millions de tonnes en 2030, selon les chercheurs, soit l'équivalent de 13,3 milliards de smartphones jetés.
Par ailleurs, les serveurs informatiques et les puces nécessaires à l'IA impliquent l'utilisation de métaux rares, dont l'extraction intensive, notamment en Afrique, repose sur des procédés polluants, comme l'a noté l'Agence de la transition écologique (Ademe) en France.