L’avenir des retraites s’assombrit. Les pensions sont versées plus longtemps, mais avec de moins en moins d’actifs pour les financer. Une pression croissante qui alimente l’incertitude, surtout chez les jeunes générations. Alors une question revient de plus en plus souvent: travailler sans relâche jusqu’à la retraite, est-ce encore un pari qui en vaut la peine ?
Le phénomène de la «micro-retraite» se dessine principalement au sein de la génération Z (née entre 1997 et 2012). Le concept: des pauses professionnelles plus longues, destinées au développement personnel. Blick s’est entretenu avec un spécialiste des générations.
La santé mentale au cœur des préoccupations
Lorsque l’équilibre entre vie professionnelle et vie privée vacille, nombreux sont ceux qui aspirent à davantage de temps pour eux. Pour préserver leur santé mentale, une solution gagne du terrain: faire une longue pause. «Les jeunes d’aujourd’hui ressentent bien plus de stress que ceux d’il y a quelques années, et plus que toutes les autres générations», observe Rüdiger Maas, psychologue et expert des générations à l’Institut de recherche sur les générations d’Augsbourg, en Allemagne.
Selon l'expert, cela peut s'expliquer par la perception subjective du stress dans la vie quotidienne et au travail. Les jeunes ont tendance à se laisser envahir par une vision négative: «Je dois encore faire cela, où est-ce que je trouve du temps pour moi?» Les générations plus âgées acceptaient le stress comme «faisant partie intégrante de la vie», explique Rüdiger Maas. A cela s’ajoute la consommation d’informations sur les réseaux sociaux, qui est également un facteur de stress important.
Epanouissement personnel
Une «micro-retraite» peut offrir plus de temps pour se consacrer aux rêves et objectifs personnels qui passeraient à la trappe dans la routine quotidienne du travail. Elle offre également du temps pour l'introspection – qu'est-ce qui est important pour moi, qu'est-ce que je veux accomplir? Cela permet également de se réorienter.
Ne pas perdre de vue la sécurité financière
Une pause nécessite une planification rigoureuse: il faut anticiper ses finances, épargner, voire trouver des revenus complémentaires, comme un emploi à temps partiel. Il est aussi essentiel de savoir expliquer cette parenthèse lors d’un entretien d’embauche. Et attention à la prévoyance vieillesse: pendant une pause, les cotisations diminuent.
Selon le psychologue Rüdiger Maas, ce désir croissant d’épanouissement personnel trouve sa source dans une éducation marquée par la surprotection, tant de la part des parents que des institutions. Résultat: un sentiment d’impuissance apprise, une responsabilité souvent projetée à l’extérieur… et des réseaux sociaux qui amplifient encore ce phénomène.
Se perdre dans l’abondance des choix
Le spécialiste des générations souligne que la société moderne, qui offre d'innombrables options, peut parfois désorienter: «Nous appelons cela la FOBO (Fear of Better Options, la peur de meilleures options), ce qui mène finalement à un manque d’opportunités.» Etant donné la grande variété de choix dans de nombreux domaines, de plus en plus de jeunes ont le sentiment de ne plus pouvoir faire de choix pertinents. Ils ont constamment peur d'avoir pris la mauvaise décision.
Pour Rüdiger Maas, il y a une différence générationnelle: «Les personnes plus âgées n'avaient pas ces nombreux choix dans leur parcours professionnel, elles avaient beaucoup plus de concurrence sur le marché du travail (en raison du nombre de naissances).» C'est pourquoi elles étaient beaucoup plus fières d'obtenir un poste difficile à décrocher, raison pour laquelle elles restaient plus longtemps dans le même emploi. Aujourd'hui, c'est différent: «Si cinq entreprises me contactent, je suis un client et non plus un candidat. Le sentiment de fierté d'avoir obtenu le poste est donc minime.»
Un changement de mentalité dans le monde du travail
Six mois sac au dos, de l’Asie du Sud-Est à l’Amérique du Sud en passant par l’Australie: un parcours jalonné de défis, de découvertes et de croissance personnelle. Que l’on s’engage dans un projet solidaire ou que l’on parte à la rencontre du monde, l’expérience forge des compétences, élargit les horizons et permet, parfois, de faire bouger les lignes.
Pour Rüdiger Maas, il est nécessaire de repenser le monde du travail: «Nous devons redonner aux jeunes le sentiment d'être fiers de ce qu'ils accomplissent. Et ce n'est pas en les félicitant constamment pour tout et n'importe quoi, mais en créant à nouveau des défis auxquels ils peuvent se mesurer.» Les entreprises devraient donc se concentrer davantage sur les qualités lors des recrutements, même si cela signifie recevoir moins de candidatures: «Les objectifs devraient être plus exigeant pour offrir aux nouveaux talents la chance d’être vraiment fiers d’avoir été sélectionnés.»