Un dirigeant au sang froid
Zelensky, de la télévision à l'Ukraine en guerre

Longtemps, Volodymyr Zelensky n'a été vu que comme un ex-comique devenu président par accident. La crise puis la guerre avec Moscou l'ont fait émerger sous un jour nouveau, faisant apparaître notamment son sang-froid.
Publié: 24.02.2022 à 11:10 heures
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Dernière mise à jour: 24.02.2022 à 12:22 heures
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La crise, puis la guerre avec Moscou, ont montré un nouveau visage de Volodymyr Zelensky.
Photo: STR

À l'heure des comptes, alors que la Russie a lancé l'invasion de son pays, il sera peut-être dit que Volodymyr Zelensky avait raison depuis le début.

Jeudi matin, c'est dans un message vidéo sur Facebook qu'il a appelé ses concitoyens à ne pas paniquer et instauré la loi martiale, alors que la Russie avait effectué des frappes contre des infrastructures militaires et des garde-frontières. «Pas de panique, nous sommes prêts pour tout, nous allons vaincre», a-t-il dit.

L'ancienne star de la télé de 44 ans, novice en politique jusqu'à son élection comme président de l'Ukraine en 2019, n'a jamais cillé ces derniers mois, même quand Washington avertissait, d'un ton de plus en plus pressant, qu'une guerre «imminente» pouvait commencer «sans préavis».

«Rester calme»

«Que devons-nous faire? Une seule chose: rester calmes», répétait-il encore en janvier dans une déclaration à ses 40 millions de concitoyens. «Nous célébrerons Pâques en avril. Et puis en mai, comme d'habitude - le soleil, les vacances, les barbecues», a-t-il ajouté.

Bis repetita mi-février. Les Américains alertent que le 16 février risque d'être le jour de l'offensive russe? Volodymyr Zelensky déclare une «journée d'unité nationale» avec drapeaux aux fenêtres et rubans bleus et jaunes, les couleurs de l'Ukraine.

Presque comme une farce

L'aventure politique de Volodymyr Zelensky a commencé presque comme une farce le soir du 31 décembre 2018, avec l'annonce télévisée de sa candidature à l'élection présidentielle.

L'Ukraine était déjà à couteaux tirés avec la Russie, aux prises avec une crise depuis 2014 et l'éclatement d'une guerre dans l'est séparatiste du pays. Son dirigeant, Petro Porochenko, souffrait d'une popularité en berne.

Volodymyr Zelensky, lui, était un président de fiction dans une série à succès, «Serviteur du Peuple». Son personnage de professeur d'histoire honnête mais naïf, arrivé au pouvoir par hasard, avait su capter l'air du temps.

L'heure en Ukraine n'était plus aux élites. Une campagne éclair, menée d'abord sur les réseaux sociaux, fit triompher la star de télé: plus de 70% au second tour. Mais entre faire des plaisanteries parfois vulgaires à la télévision et diriger un pays, il y a un fossé. Certains Ukrainiens craignaient le pire.

Pour ses critiques, le natif de Kryvy Rig, ville industrielle et russophone du centre de l'Ukraine, n'est qu'une personnalité médiatique comparable à Donald Trump ou Silvio Berlusconi. D'autant que ses premiers pas de président furent hésitants. Face aux autres dirigeants, Volodymyr Zelensky a d'abord paru emprunté.

«Vraiment du mal avec lui»

«Je pense que nos partenaires internationaux ont vraiment du mal avec lui», juge l'analyste politique ukrainien Mykola Davyduk: «Ils jouent un jeu de très haut niveau qu'il ne peut pas atteindre - et pas comprendre».

En privé, certains observateurs se disent pourtant impressionnés par la manière dont l'ex-comédien gère les relations avec Moscou.

«Honnêtement, il ne s'en sort pas trop mal», affirme une source diplomatique: «Il fait preuve de sang-froid. Il a un boulot impossible, il est coincé entre les pressions des uns et des autres, des Russes et des Américains».

Plus grave crise russo-occidentale

L'affrontement actuel avec Moscou, plaçant l'Ukraine au centre de la plus grave crise russo-occidentale depuis la fin de la Guerre froide, est un tournant de la présidence Zelensky.

En 2019, il avait été élu en promettant de mettre fin au conflit dans l'est ukrainien quitte à discuter avec Vladimir Poutine, la Russie étant considérée comme le parrain politique et militaire des séparatistes.

Un sommet à Paris avait acté leurs divergences. «Mes homologues ont dit que c'est un très bon résultat pour une première rencontre. Pour moi, je le dis honnêtement, c'est très peu», commentait-il.

Depuis, les relations russo-ukrainiennes n'ont cessé d'empirer. Le Kremlin accuse sans relâche Kiev de discriminer les russophones et de renier ses promesses de trouver une issue au conflit.

Et le «rêve» - mot lâché le 14 février par Volodymyr Zelensky - ukrainien de rejoindre un jour l'Otan semble devoir rester à l'état d'ébauche.

Mais pour certains analystes, Volodymyr Zelensky s'est imposé dans la crise.

«Il n'a pas reculé, et le soutien militaire de l'Otan a augmenté», observait mi-février Rob Lee, du Foreign Policy Research Institute aux Etats-Unis.

(AFP)

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