Un débat très controversé
Les députés britanniques sont favorables à l'expulsion de migrants rwandais

Les députés britanniques ont voté mardi soir en faveur du projet de loi controversé sur l'expulsion de migrants vers le Rwanda, à l'issue d'un vote à haut risque pour le premier ministre Rishi Sunak.
Publié: 12.12.2023 à 22:37 heures
Le vote de la Chambre était à haut risque pour le premier ministre Rishi Sunak.
Photo: UK Parliament

Lors d'un premier vote à la Chambre des Communes, 313 députés se sont prononcés en faveur d'un projet de loi controversé sur l'expulsion de migrants vers le Rwanda. 269 ont voté contre, laissant pour l'heure au chef du gouvernement un répit pour les fêtes de fin d'année.

Mais le chemin parlementaire est encore long pour ce texte controversé, et Rishi Sunak est loin d'avoir partie gagnée.

Avant ce vote, les Brexiters durs de l'influent European researsh group (ERG), par la voix du député Mark François, ont fait savoir qu'ils ne soutiendraient pas à ce stade le texte qu'ils jugent trop modéré. Ils ont fait savoir qu'ils chercheraient à l'amender, donnant rendez-vous en janvier pour la suite de cette saga.

Quatre ans après le triomphe des conservateurs sous Boris Johnson, Rishi Sunak se trouve à la tête d'une majorité divisée, mis en difficulté par l'aile droite de son parti.

Signe que l'immigration domine les débats dans de nombreux pays européens, ce vote à Londres est intervenu au lendemain d'une lourde défaite politique du gouvernement français sur ce sujet, l'Assemblée nationale ayant rejeté un projet de loi visant à contrôler les flux et améliorer l'intégration.

Le texte britannique vise à répondre aux objections de la Cour suprême britannique, qui a bloqué le mois dernier une précédente version du projet.

Nouvelle «donne»

L'expulsion de migrants – d'où qu'ils viennent – vers le Rwanda a été annoncée en avril 2022 mais jamais mise en oeuvre.

«Le nouveau traité que j'ai signé avec le Rwanda et le projet de loi qui l'accompagne changent la donne», a déclaré à l'ouverture des débats le ministre de l'Intérieur James Cleverly, assurant que le texte est «conforme aux termes de la Convention sur les réfugiés».

Rishi Sunak a érigé en priorité la lutte contre l'immigration illégale et il a présenté le texte comme «la loi la plus dure jamais adoptée contre l'immigration illégale», sur X (ex-Twitter).

Le nouveau texte définit le Rwanda comme un pays tiers sûr et empêche le renvoi des migrants vers leur pays d'origine.

Il propose également de ne pas appliquer aux expulsions certaines dispositions de la loi britannique sur les droits humains, pour limiter les recours en justice.

Mais ce texte n'est pas suffisant pour l'aile droite du parti conservateur. Certains estiment que Londres devrait se retirer de la Convention européenne des droits de l'Homme et autres conventions internationales sur les droits humains, pour empêcher tous les recours légaux d'aboutir.

Lors du débat mardi, le député d'opposition Chris Bryant (travailliste) a jugé que «l'idée que quelqu'un qui n'est pas dissuadé par une dangereuse traversée sur un canot dans l'une des voies maritimes les plus fréquentées du monde le soit par cette absurdité fragile est simplement risible».

Et «on ne peut pas rendre le Rwanda sûr juste en le disant», a-t-il ajouté.

«Cirque à Westminster»

La semaine dernière, le ministre délégué à l'Immigration Robert Jenrick a démissionné, refusant de soutenir un texte qui ne va pas «assez loin» selon lui. La pression est telle que le secrétaire d'Etat au Climat Graham Stuart est revenu à Londres depuis la COP28 à Dubaï pour participer au vote, sous les critiques cinglantes d'ONG.

Rishi Sunak s'expose à une défaite cuisante si l'aile droite rejette le texte, examiné alors qu'un demandeur d'asile est mort de manière «soudaine» selon la police à bord d'une barge hébergeant des migrants, autre mesure controversée du gouvernement.

En cas de défaite, selon le chef des travaillistes Keir Starmer, «il devra bien sûr convoquer des élections». Mais le chef de l'opposition a cependant confié ne «pas avoir de doute» sur le fait que le texte, qu'il a qualifié de «gadget coûteux» qui ne marchera «jamais», soit voté.

Après près de 14 ans au pouvoir, les conservateurs sont largement devancés dans les sondages par les travaillistes.

En juin 2022, un premier vol qui devait emmener une poignée de migrants à Kigali avait été annulé in extremis après une injonction de la Cour européenne des droits de l'Homme.

Quelque 29'700 personnes sont arrivées au Royaume-Uni cette année à bord de petits bateaux, contre 45'700 en 2022.

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