Soutenir leurs proches et reconstruire
Ces Ukrainiens qui préfèrent la guerre à la Suisse

Un réfugié ukrainien sur dix a déjà quitté la Suisse, comme Olga. La situation dans son pays est toujours dangereuse pour sa vie. Mais elle «préfère être utile qu'en sécurité».
Publié: 23.02.2023 à 15:35 heures
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Dernière mise à jour: 24.02.2023 à 08:01 heures
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Olga, 50 ans, a fui en Suisse au printemps dernier. Elle fait partie des centaines de milliers de réfugiés qui, malgré le grand danger, sont déjà de retour en Ukraine.
Photo: Samuel Schumacher
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Samuel Schumacher

Sans pilules calmantes, Olga, 50 ans, n’aurait même pas osé venir ici, dans ce café de la périphérie de Kiev. La mort violente de son gendre, les alertes incessantes, sa fille veuve seule avec ses deux jeunes enfants, son mari quelque part dans le territoire russe occupé: «Je pourrais crier! Pourquoi tout cela nous arrive-t-il?», demande-t-elle, le regard vide et le sourire tourmenté.

La quinquagénaire est l’une des centaines de milliers de réfugiés ukrainiens qui, après avoir fui à l’étranger, sont déjà rentrés dans leur dangereuse patrie. Plus de 8 millions de personnes ont dû fuir le pays depuis le 24 février 2022: le plus grand exode depuis la Seconde Guerre mondiale.

À pied avec les sacs de courses jusqu’au 23e étage

Ce n’est qu’en mars 2022 qu’Olga a fui avec son fils l’est du pays, région où les combats font rage depuis le début du conflit. Elle espère de tout cœur ne pas lire le nom de sa ville ou, pire, son nom de famille dans les journaux: «Mon mari est toujours dans notre patrie occupée. Je ne veux pas le mettre en danger.» Elle a alors quitté l’Ukraine toute seule, pour la toute première fois de sa vie, et a atterri à Bâle après un long voyage à travers la Pologne et l’Allemagne.

«Au début, je n’ai pas du tout compris que c’était déjà la Suisse», raconte Olga. Le café devient soudain sombre et silencieux: panne de courant. Dehors, les sirènes retentissent. La cinquantenaire se contente de hausser légèrement des épaules sous son pull tricoté maison. «Ça fait partie du jeu.» Après deux ou trois heures, le courant revient. «Seul l’ascenseur de notre bloc ne fonctionne plus du tout», explique-t-elle. Depuis des mois, elle descend à pied, marche après marche, les 23 étages pour se rendre au café, avant de les gravir plus tard, parfois avec de lourds récipients d’eau et des sacs de nourriture.

En Suisse, Olga a atterri dans une famille de Dietikon (ZH). «Des gens merveilleux», s’exclame l’Ukrainienne. Elle a essayé d’apprendre l’allemand et de trouver un emploi. Son premier défi a été difficile, le second n’a pas fonctionné. Et lorsque son gendre Alexej est mort sur le front près de Severodonetsk, le désespoir l’a saisie. «Son petit garçon, il n’a pu le prendre qu’une seule fois dans ses bras avant de tomber. Les ennemis tuent nos meilleurs éléments tous les jours», dit Olga avec son habituel sourire triste.

«Revenez, nous avons besoin de vous!»

Olga n’en pouvait plus de vivre dans cette belle Suisse, avec tous ces gens serviables et toutes ces belles fleurs. «Je préfère être utile que d’être en sécurité», s’est-elle alors dit, avant de repartir chez sa fille désormais veuve. «Je suis beaucoup plus calme intérieurement ici, même si c’est beaucoup plus dangereux, raconte-t-elle. Je suis ukrainienne. Ma place est là, pour mes enfants.»

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Attachée à la terre de ses ancêtres, elle n’est pas la seule à avoir cette réflexion. Un bon dixième des réfugiés ukrainiens en Suisse ont déjà quitté le pays. Actuellement, environ 77’000 personnes vivent toujours sur notre territoire. Ils sont plus de 9000 à avoir déjà pris le chemin du retour.

Selon une enquête de l’ONU, huit exilés ukrainiens sur dix souhaitent un jour retourner dans leur pays. Mais cela ne suffit pas, selon Olga: «Nous avons besoin de chacun et de chacune ici pour entamer la reconstruction.» Elle lance un message à ses concitoyens: «Après la guerre, vous devez tous rentrer chez vous! Sans vous, nous n’y arriverons pas.»


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