Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu est arrivé jeudi soir à Paris. Les tensions croissantes autour de l'Iran et les violences israélo-palestiniennes devaient animer une rencontre entre le président français Emmanuel Macron et ce dernier.
Benjamin Netanyahu devait discuter «de l'effort international pour arrêter le programme nucléaire iranien et des moyens de renforcer et d'étendre les accords d'Abraham» normalisant les relations entre Israël et certains pays arabes, selon l'ambassade israélienne à Paris.
Le président français a accueilli le Premier ministre au palais de l'Elysée où un dîner a été organisé, ont constaté des journalistes de l'AFP. Mais aucun point de presse n'était prévu dans la soirée.
Sur Israël
Solidarité face au terrorisme
Selon l'Elysée, le président Emmanuel Macron «exprimera une nouvelle fois la solidarité de la France avec Israël face au terrorisme», «rappellera la nécessité pour tous d'éviter des mesures susceptibles d'alimenter l'engrenage de la violence et exprimera sa disponibilité à contribuer à la reprise du dialogue entre les Palestiniens et les Israéliens».
Depuis plusieurs jours, des violences entre Israéliens et Palestiniens ont fait des dizaines de victimes. Dix personnes, des combattants et des civils, ont péri le 26 janvier dans un raid israélien dans le camp de réfugiés de Jénine, le plus meurtrier depuis des années en Cisjordanie.
Sept civils sont morts le lendemain dans une attaque palestinienne à Jérusalem-Est, occupé et annexé par Israël. Et samedi un Palestinien a blessé deux Israéliens, un père et son fils, également à Jérusalem-Est, avant d'être blessé et arrêté. En Cisjordanie, des gardes israéliens ont tué dimanche un Palestinien et les forces israéliennes ont tué lundi un Palestinien.
Téhéran dans le viseur
La partie israélienne souhaite surtout axer cette visite sur l'Iran, espérant notamment que son implication croissante dans la guerre entre la Russie et l'Ukraine — le régime des mollahs est un important fournisseur d'équipements à la Russie — pousse les Occidentaux à accentuer la pression sur Téhéran, bête noire d'Israël.
L'Iran, qui appelle régulièrement à l'éradication de l'Etat hébreu, accuse son ennemi juré d'être derrière plusieurs attaques sur son propre sol contre son programme nucléaire - ce qu'Israël n'a jamais reconnu - ou en Syrie voisine, alliée de Téhéran, où Israël conduit régulièrement des frappes aériennes contre des intérêts iraniens.
Paris estime nécessaire une politique de «très grande fermeté» à l'égard de l'Iran, selon une source diplomatique, car «le programme nucléaire continue à un point qui est dangereux» et l'Iran s'implique dans la guerre d'Ukraine en Europe.
Cette implication de Téhéran dans une guerre en Europe permet à Benjamin Netanyahu d'espérer «consolider un front anti-iranien», explique David Khalfa, co-directeur de l'Observatoire de l'Afrique du Nord et du Moyen-Orient de la Fondation Jean Jaurès. Il vise notamment un «accroissement des sanctions contre Téhéran et la mise à l'index complète des Gardiens de la révolution», dans leur composante civile et militaire, une option pour l'instant refusée tant par Paris que par Berlin, explique-t-il.
L'Iran fournit la Russie
Depuis plusieurs mois, l'Iran est devenu un acteur de plus en plus important dans la guerre en Ukraine, en fournissant de nombreux drones à Moscou, alors même que les négociations sur le nucléaire sont au point mort, et que l'Iran détient plusieurs étrangers considérés comme des otages par les capitales occidentales.
Benjamin Netanyahu «est en train d'abattre la carte ukrainienne» de son jeu, explique David Khalfa, négociant ainsi un changement de posture israélienne sur l'Ukraine en échange d'un soutien européen sur l'Iran. Le Premier ministre a annoncé mercredi ce qui semble être un important changement de stratégie, en se disant désormais prêt à envisager de fournir des armes à l'Ukraine.
Jusqu'ici, Israël avait pris soin de rester neutre, notamment à cause de la présence de l'armée russe déployée en Syrie, donnant un levier à Moscou. Israël doit notamment prendre en compte la présence dans ce pays voisin de systèmes anti-aérien russes, menaçant ses opérations militaires aériennes au-dessus de la Syrie.
En plus de ce volet diplomatique, Benjamin Netanyahu «rencontrera des hommes d'affaires de premier plan en France dans le domaine financier et tiendra une réunion avec les chefs de la communauté juive», selon l'ambassade. Il doit quitter la France samedi soir.
Arrivé au pouvoir en décembre à la tête d'une coalition alliant partis de droite, d'extrême droite et ultraorthodoxes juifs, dont les détracteurs craignent une dérive antidémocratique, le gouvernement de Benjamin Netanyahu fait face à la contestation de certains secteurs de la société israélienne, dont le secteur financier.
(ATS)