Le décès le 16 septembre de Mahsa Amini, une Kurde iranienne de 22 ans, a déclenché la plus grande vague de manifestations et de violence que la République islamique ait connue depuis près de trois ans. La jeune femme avait été arrêtée trois jours auparavant par la police des mœurs à Téhéran pour avoir, selon celle-ci, enfreint le code vestimentaire strict de la République islamique pour les femmes, prévoyant notamment le port du voile.
Depuis, des jeunes femmes, étudiantes et écolières sont à l’avant-garde des manifestations au cours desquelles elles scandent des slogans anti-gouvernementaux, mettent le feu à leur foulard et affrontent les forces de sécurité dans les rues.
«Femme, vie, liberté» – slogan du mouvement de contestation – ont à nouveau été scandés dans la nuit de mercredi à jeudi à Boukan (nord-ouest), ville où des manifestants ont brûlé le drapeau iranien, selon une vidéo vérifiée par l’AFP.
Une politique de déstabilisation?
Une nouvelle fois jeudi, le régime iranien s’en est pris aux Etats-Unis, accusant son ennemi juré d’être responsable de la situation: «Washington et ses alliés ont recours à une politique de déstabilisation vouée à l’échec», a déclaré le président ultraconservateur, Ebrahim Raïssi.
La répression des manifestations a déjà fait au moins 108 morts, selon des ONG. Des coups de feu et des gaz lacrymogènes ont de nouveau été tirés contre des manifestants descendus dans la nuit dans tout le pays, notamment dans les villes d’Ispahan (sud), de Machhad (nord-est), de Rasht (nord), de Saghez (ville natale d’Amini) et de la capitale Téhéran.
Des vidéos en ligne montrent des manifestants qui affrontent les forces de sécurité cherchant à les arrêter, obligeant parfois des policiers à fuir. Sur une vidéo vérifiée par l’AFP, des femmes se font malmener par les forces de sécurité, notamment un homme qui semble être Armin Amoozad Haramzadeh, le gouverneur adjoint de Rasht, dans la province de Gilan.
Campagne d’arrestations massives
Selon l’ONG Iran Human Rights (IHR), basée à Oslo, des ouvriers du secteur énergétique se sont joints au mouvement de contestation cette semaine en se mettant en grève à l’usine pétrochimique d’Asalouyeh (sud-ouest), à Abadan (ouest) et Bushehr (sud).
Des affrontements meurtriers ont frappé en particulier Sanandaj, capitale de la province du Kurdistan d’où est originaire Mahsa Amini. La ville de Zahedan (sud-est) a également été touchée par des violences déclenchées le 30 septembre lors de manifestations contre le viol présumé d’une jeune fille par un policier, qui ont fait au moins 93 morts, selon l’IHR. Pour faire face à la contestation, les autorités iraniennes ont bloqué l’accès aux réseaux sociaux, notamment aux applications Instagram et WhatsApp, et lancé une campagne d’arrestations massives, alors que la répression s’accroît.
Et les juges en Iran ont reçu pour consigne de ne pas prononcer des peines «faibles» contre les «principaux éléments des émeutes», a rapporté jeudi le site d’information du pouvoir judiciaire en référence aux manifestations.
(ATS)