«Avant, sur une journée normale de travail, je voyais environ 25 patientes. Aujourd'hui, j'en vois 45. Il y a énormément de demande», raconte cette médecin, qui a préféré rester anonyme, par peur de recevoir des menaces de militants anti-avortement.
Même si le délai pour pouvoir avorter a été réduit de 24 à 15 semaines de grossesse en juillet en Floride, cet Etat reste l'un des endroits les plus tolérants dans le sud-est des Etats-Unis en matière de droit à l'avortement.
Autour, d'autres États conservateurs comme la Louisiane, le Mississippi, l'Alabama ou la Géorgie ont presque complètement interdit cette pratique ou réduit son délai à six semaines, après la décision de la Cour suprême de revenir sur le droit constitutionnel à avorter en juin dernier.
«Une urgence de santé publique»
De nombreuses femmes n'ont ainsi pas d'autre recours que de voyager jusqu'à des cliniques comme celle-ci, gérée par l'organisation de planning familial Planned Parenthood.
«Nous sommes dans une situation désespérée, j'appellerais cela une urgence de santé publique», dit Laura Goodhue, responsable locale pour l'organisation. Elle aimerait pouvoir faire venir en Floride, quelques jours par semaine, des médecins ne pouvant plus exercer dans leurs Etats.
Car ici, les horaires de travail ont dû être allongés, jusqu'à 12 heures par jour dans certaines cliniques, dont les portes sont dorénavant également ouvertes le week-end pour faire face à l'afflux de femmes venues notamment du Texas, de Géorgie et d'Alabama.
Dans la cuisine de la clinique de Jacksonville, la Dre D. se repose entre deux patientes. Avec son travail, elle s'est retrouvée en première ligne pour observer les conséquences des restrictions récentes à l'avortement: «C'est très décourageant.»
Plusieurs jours de congé à poser... pour avorter
Pour venir jusqu'à elle, les femmes doivent poser plusieurs jours de congé, car la Floride réclame désormais qu'elles assistent en personne à deux rendez-vous, à au moins 24 heures d'intervalle l'un de l'autre, avant de subir un avortement, explique-t-elle.
Elles doivent aussi trouver un moyen de transport, se loger sur place et faire garder leurs enfants si elles en ont. Des obstacles qui s'ajoutent à la réduction du délai légal pour avorter en Floride.
«Malheureusement, si quand elles arrivent ici et que l'on fait l'échographie, on se rend compte qu'elles sont à plus de 15 semaines, alors on ne peut pas les aider», explique Mme D. Dans ce cas, «on leur fournit les informations pour se rendre dans d'autres Etats. Et cela ne fait que prolonger leur périple pour accéder à ce service de santé essentiel», dit-elle.
(ATS)