Pas question de perpétuer le «Quoi qu’il en coûte»: cette ouverture retentissante des vannes budgétaires durant la crise du Covid, qui a conduit l’Etat français à injecter des centaines de millions d’euros dans l’économie.
Pour son second quinquennat, officiellement entamé le 14 mai, Emmanuel Macron veut à la fois tenir ses promesses de la campagne présidentielle, et serrer les boulons des dépenses publiques – alors que l’inflation menace et que le coût des importations énergétiques explose.
C’est pour cette mission que la ministre sortante du travail, Elisabeth Borne, vient d’être désignée Premier ministre. «Elle sera la proviseure en chef du pays, s’amuse un ex-conseiller de l’ancien président François Hollande. Elle incarne le sérieux étatique. Avec elle, plus question de rigoler. Elle est là pour défendre Macron». Une cheffe du gouvernement qui prend des risques puisqu'elle se présente aux législatives les 12 et 19 juin dans le département du Calvados. Sa défaite signerait sans doute son départ illico de Matignon.
Les listes de ministres circulent
Les premières listes de ministres qui ont commencé à circuler confirment le pronostic de «sérieux étatique». L’annonce du nouveau gouvernement français doit intervenir dans les prochaines heures. Au menu? Des ministres experts dans leur domaine, comme l’eurodéputé Pascal Canfin, autrefois membre des Verts et spécialiste de l’implication financière de la lutte contre le réchauffement climatique: il serait nommé en charge de la planification énergétique.
Autre exemple pour le poste crucial du budget, qui serait confié à l’actuel secrétaire d’Etat chargé des Affaires européennes Clément Beaune, très proche du Chef de l’Etat. Le poste de ministre des Affaires étrangères pourrait revenir à la vice-gouverneure de la Banque de France Sylvie Goulard, qu’Emmanuel Macron avait proposée en vain en 2019 comme Commissaire européenne…
Un savant équilibre
Oubliée, la main tendue vers la province avec le pyrénéen Jean Castex, maire d’une petite ville des Pyrénées avant d’accéder à la tête du gouvernement, dont il a démissionné lundi. Oubliées, les personnalités «vedettes» comme le ministre sortant de la justice Éric Dupond-Moretti, ou la très médiatique ministre de la Culture Roselyne Bachelot? À priori, oui.
L’objectif de ce premier gouvernement de l’ère Macron II est, d’abord, de faire en sorte que toutes les facettes de la coalition présidentielle française «Ensemble» soient satisfaites. D’où un savant équilibre entre personnalités issues de la droite et de la gauche modérées.
L’entrée au gouvernement du gaulliste Renaud Muselier, président de la Région Provence-Alpes-Cote d’Azur, serait de ce point de vue symbolique car il a battu sur son territoire les forces d’extrême-droite. Une personnalité de la société civile pourrait en revanche faire son entrée: l’intellectuelle Rachel Kahn, autrice de «Racée», un essai qui s’attaque à la pensée décoloniale.
Le «bon soldat» Elisabeth Borne
Pour faire survivre les promesses de son premier mandat, Emmanuel Macron aurait insisté pour conserver un ministère dédié à la «transformation» du pays. Mais pour l’heure, place au réalisme: ce premier gouvernement ne compterait qu’une vingtaine de ministres, contre une quarantaine de sortants.
La réforme la plus symbolique du second quinquennat, celle du régime des retraites, serait directement prise en charge par Elisabeth Borne qui, en tant que ministre des transports puis du travail, a tenu bon face aux syndicats.
Le leader de la gauche, Jean-Luc Mélenchon, l’accuse déjà de préparer une «grande braderie sociale». Ceux qui la connaissent retiennent surtout son côté «bon soldat». Une femme de fer, en somme, au service… Du président.