Vidéos sur les réseaux sociaux, déclarations de candidature: l'Allemagne est entrée en campagne électorale après la chute de la coalition d'Olaf Scholz, même si le chancelier résiste toujours aux appels à organiser de rapides élections anticipées. Selon un sondage publié vendredi, les deux tiers des Allemands aspirent à de nouvelles élections sans délai, confortant l'opposition qui multiplie les appels en ce sens.
Et 59% des personnes interrogées par le sondage de l'institut Infratest Dimap se déclarent satisfaites de l'implosion de la très impopulaire coalition entre les sociaux-démocrate du chancelier, les Verts et les libéraux du FDP, qui dirigeait le pays depuis fin 2021. «Chancelier, cédez la place!», écrit la rédactrice en chef de Bild, le journal le plus lu d'Allemagne.
En Une, elle s'adresse directement au dirigeant social-démocrate: «Je pense que vous pensez vraiment que vous êtes le seul à pouvoir diriger l'Allemagne. Vous avez peut-être même raison. Seulement, nous, les Allemands, ne le croyons plus depuis longtemps. Ce n'est pas Bild qui le dit, c'est chaque foutu sondage depuis avril 2022».
Olaf Scholz ne s'est pas exprimé sur le sujet depuis sa déclaration de mercredi soir annonçant d'une part le limogeage du ministre des Finances libéral Christian Lindner, en raison de profonds désaccords sur la politique économique du pays, et d'autre part son intention de poser la question de confiance à la mi-janvier, en vue d'élections anticipées en mars. Il a d'ailleurs soigneusement évité d'évoquer la crise lors d'une déclaration vendredi avant le sommet des dirigeants de l'Union européenne à Budapest.
Accélérer
Pendant ce temps-là, la marmite bout en Allemagne où les partis se positionnent en vue du scrutin à venir. En pointe, le chef des conservateurs de la CDU, Friedrich Merz, omniprésent dans les médias. «Que Scholz pose la question de confiance la semaine prochaine», a lancé le leader de 68 ans, qui aurait de bonnes chances de devenir chancelier en cas d'élections. Un discours d'Olaf Scholz prévu mercredi prochain devant les députés du Bundestag pourrait constituer une bonne occasion, a-t-il suggéré, ce que la porte-parole de Scholz Christiane Hoffmann a exclu vendredi.
«Les processus démocratiques sérieux prennent du temps. Une élection démocratique équitable a des règles et des délais que nous devons respecter», a argumenté de son côté le député SPD Dirk Wiese lors d'une séance au Bundestag. Les sondages créditent la CDU et son allié bavarois CSU de quelque 34% des suffrages, devant l'extrême droite de l'Alternative pour l'Allemagne (AfD). Si Olaf Scholz ne recueille pas la majorité des voix lors du vote de confiance, ce qui semble inéluctable, le président Frank-Walter Steinmeier aura 21 jours pour dissoudre le Bundestag et de nouvelles élections devront avoir lieu au plus tard 60 jours après.
«Peu responsable»
Christian Lindner dont le FDP a désormais rejoint le camp de l'opposition, continue lui de régler ses comptes avec le chancelier, jugeant «peu responsable» sa volonté d'attendre janvier. Alors que son parti flirte avec les 5% dans les sondages, il a dit vouloir «reprendre (son) travail de ministre fédéral des Finances après les prochaines élections fédérales». Du côté des Verts, seul allié restant de Scholz, les préparatifs vont aussi bon train. Le vice-chancelier et ministre de l'Economie Robert Habeck a annoncé indirectement son entrée en lice via une vidéo postée sur son compte X, réactivé pour l'occasion après environ cinq ans d'absence.
On le voit en train de lire un document. A son poignet un bracelet où est inscrit «Kanzler Era» ("l'ère du chancelier"). «Une autoproclamation en tant que candidat à la chancellerie avec 9% d'intentions de vote ne manque pas d'humour», a ironisé Friedrich Merz à l'adresse du leader écologiste.
Mais le chef des conservateurs doit aussi s'attendre en cas de victoire aux élections à une formation de coalition très compliquée, car il rejette toute alliance avec l'AfD (autour de 17-18%). Resteront comme alliés éventuels le SPD (16%), les Verts, et éventuellement le FDP. Même Elon Musk, le controversé patron de la plateforme X, proche de Donald Trump, s'est immiscé dans le débat politique national, qualifiant Olaf Scholz de «fou» dans un message en allemand sur son réseau social.