Une tragédie annoncée
En mars, un rapport prédisait déjà un «bilan catastrophique» à Mayotte

Un rapport parlementaire publié en mars dernier avait prédit un lourd bilan humain en cas de catastrophe naturelle à Mayotte. Les députés avaient tiré la sonnette d'alarme, pointant le manque de moyens déployés par Paris et la précarité des habitations.
Publié: 05:58 heures
Le cyclone Chido a dévasté l'ile de Mayotte samedi 14 décembre.
Photo: IMAGO/ABACAPRESS
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Solène MonneyJournaliste Blick

Des débris jonchent le sol, des champs de ruines s’étendent à perte de vue, et un bidonville entier a été réduit en poussière. Avec des rafales atteignant 226km/h, Mayotte, le Département français le plus pauvre, a été dévasté par le cyclone Chido, samedi 14 décembre. Les autorités craignent un bilan humain dramatique, évoquant «plusieurs centaines» de morts, voire «quelques milliers». Pourtant, en mars dernier, un rapport parlementaire avait tiré la sonnette d’alarme, décrivant avec une précision glaçante les risques auxquels l’île serait exposée en cas de cyclone, révèle le HuffPost lundi 16 décembre.

«Compte tenu de l’étendue de l’habitat informel sur l’île, le bilan victimaire d’un cyclone serait catastrophique», avertissait Olivier Brahic, directeur général de l’Agence Régionale de Santé (ARS) de Mayotte. Il ajoutait lors de son audition que «le système de santé, déjà très déficitaire, aurait le plus grand mal à faire face à un événement majeur, surtout dans un contexte de crise persistante».

Concentration de fragilités

Au-delà des facteurs géographiques et géologiques, le rapport pointait une série de fragilités: pauvreté structurelle, densité de population parmi les plus élevées de France, habitations précaires, infrastructures défaillantes, et manque criant de prévention et de moyens mobilisés par l’Etat. Un cocktail explosif. 

Olivier Brahic expliquait également que, bien que les cyclones provoquent habituellement peu de blessés graves, la situation à Mayotte est différente: «Le bilan victimaire pourrait être très lourd dans ce qu’on appelle les bangas, dans les bidonvilles, où les tôles qui s’envolent pourraient causer de très gros dégâts.» Et ce sont justement ces quartiers précaires qui ont été les plus sévèrement touchés par le cyclone. 

Un manque de moyens

Le manque de financement était également dénoncé par Gaëlle Nebard, directrice outre-mer de la Croix-Rouge française. Elle illustrait cette insuffisance avec l’exemple d’un dispositif de prévention qui sensibilisait les écoliers aux risques climatiques et qui a été contraint de cesser ses activités il y a deux ans, faute de ressources.

Autre point critique: les capacités d’évacuation. « Les centres de vie identifiés dans chaque commune pourraient accueillir 30'000 personnes, alors que la population de Mayotte est estimée entre 300'000 et 400'000 habitants », ajoutait Olivier Brahic.

Avec l'arrivée du cyclone Chido à Mayotte, ces avertissements prennent une dimension tragique. La menace d'un bilan humain lourd était connue. Il semblerait que l'Etat n'ait pas pris conscience de l'urgence de la situation. Mais maintenant, il fait face à un autre défi: venir en aide aux sinistrés. 

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