Les autorités souhaitent également renforcer la formation des chasseurs. Et «pour un meilleur partage de la nature», une application numérique à destination des promeneurs sera mise en place à l'automne pour mieux informer sur les zones et horaires de chasse.
Ces décisions ont été présentées lundi par la secrétaire d'Etat à l'Ecologie Bérangère Couillard à l'issue d'une rencontre avec les agents de l'Office français de la biodiversité (OFB), qui délivre les permis en France et participe à la police de la chasse. L'objectif était clair: mieux sécuriser la pratique pour «tendre vers le zéro accident».
Nonante accidents en un an, 8 mortels
Selon l'OFB, le nombre d'accidents de chasse a reculé depuis 20 ans. Lors de la saison 2021/2022, l'Office a toutefois recensé 90 accidents (blessures corporelles liées à l'utilisation d'une arme de chasse), contre 80 la saison précédente. Parmi eux, huit ont été mortels, dont deux avec des victimes qui n'étaient pas des chasseurs.
Fin octobre, la secrétaire d'État avait évoqué l'idée d'une demi-journée sans chasse. Mais cette piste, dont les fédérations de chasse ne voulaient pas entendre parler, a finalement été écartée.
71% des accidents en fin de semaine
«Sur les 20 dernières années, rien ne me dit que le dimanche est plus accidentogène que les autres jours de la semaine. (...) La mesure a été testée le mercredi entre 2000 et 2003» et «l'accidentologie a augmenté sur ces trois années», a justifié Bérangère Couillard. Un rapport sénatorial remis en septembre au gouvernement montrait toutefois que sur la période 2003-2022, 71% des accidents avaient eu lieu le week-end.
Si la secrétaire d'État a estimé avoir répondu «à l'ensemble des demandes» des associations, «mis à part cette interdiction, une journée par semaine», la décision du gouvernement a tout de même fait réagir. «C'est un mépris inacceptable à l'égard des 80% de Français qui attendent un cessez-le-feu», a fustigé Allain Bougrain-Dubourg, président de la Ligue pour la protection des oiseaux (LPO).
Selon un sondage Ifop mi-décembre auprès de 1000 personnes pour des associations de protection de l'environnement, 78% des Français étaient favorables à un «dimanche non chassé» (2,5 points de marge d'erreur). Willy Schraen, le grand patron des chasseurs, qui estimait qu'un dimanche sans chasse mettrait la ruralité «à feu et à sang», a lui déclaré «prendre acte» des «mesures de bon sens» du gouvernement, saluant «le pragmatisme» de la secrétaire d'État. Il attend toutefois «d'en voir les modalités pratiques».
Délit d'alcoolémie
Parmi les pistes retenues, le gouvernement va créer un délit d'alcoolémie pour les chasseurs, à l'instar de ce qui existe pour les automobilistes, soit un seuil maximal fixé à 0,5 g d'alcool par litre de sang. Une contravention de 135 euros doit être instaurée «tout de suite», selon la secrétaire d'État. Elle explique «devoir passer par la loi pour créer un délit équivalent» à celui de la conduite. Un projet de loi sera déposé «très rapidement».
Les sanctions en cas d'accident grave seront également renforcées avec la possibilité d'un retrait du permis de chasse pendant une période déterminée avec interdiction de le repasser. Parmi les 14 mesures du plan, qualifié de «ni pro chasseur, ni pro ONG» par Bérangère Couillard, figure également la généralisation de la formation à la manipulation des armes: «Un chasseur sur deux devra être formé d'ici à 2025 et tous les chasseurs devront l'être d'ici à 2029.»
Application pour promeneurs
Pour mieux informer les promeneurs, une application pour smartphones sera déployée à l'automne afin d'identifier les zones et horaires non chassés. «Le but est d'avoir une information claire et que tous les usagers de la nature soient informés des zones de chasse et aussi des zones non chassées, pour que tout un chacun puisse se promener en toute sécurité, en tout cas, avec l'assurance de ne pas croiser des chasseurs sur son chemin, a insisté Bérangère Couillard. Il y aura toutes les informations dont nous disposons» mais seulement «pour les forêts publiques».
Elle reconnait cependant une difficulté pour étendre l'obligation de déclaration aux forêts privées, soit les trois quarts des forêts françaises. «Je me tournerai vers mes collègues députés», en vue d'un changement de la loi, a-t-elle promis. «Plutôt que de limiter la chasse, le gouvernement préfère limiter la liberté des autres», a réagi l'Association de protection des animaux sauvages (ASPAS), dénonçant une «appli-gadget (...) aussi inutile que dangereuse».
(ATS)