L'influenceur algérien «Doualemn», au cœur d'un bras de fer entre Alger et Paris, a obtenu gain de cause jeudi auprès de la justice française, qui a annulé l'obligation de quitter le territoire français (OQTF) sans délai dont il faisait l'objet.
Cet Algérien de 59 ans, aux 168'000 abonnés sur TikTok, avait été interpellé le 5 janvier à Montpellier, dans le sud de la France, et placé en rétention.
Appel au meurtre
Dans une vidéo sur TikTok, il avait tenu des propos, au sujet d'un opposant au régime algérien, qui avaient fait l'objet de traductions fluctuantes, initialement présentées par les autorités françaises comme un appel au meurtre. Celle retenue par la justice relevait une incitation à «attraper» un homme et lui infliger une «correction sévère».
Saisi en urgence, le tribunal administratif de Melun, près de Paris, a tenu audience jeudi et «décidé d'annuler les décisions prises par le préfet de l'Hérault», dans le sud de la France. Il «enjoint à l'autorité préfectorale de réexaminer la situation de l'intéressé dans un délai de trois mois et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour durant le temps de ce réexamen».
«Procédure d'expulsion»
Le ministère de l'Intérieur français va «faire appel et continuer la procédure d'expulsion», a aussitôt indiqué à l'AFP l'entourage du ministre Bruno Retailleau. «Il y a des points sur lesquels on doit changer la loi», a ajouté Bruno Retailleau, interrogé sur la chaîne LCI plus tard dans la soirée. «Aujourd'hui, on a quantité de règles juridiques qui ne protègent pas la société française», a-t-il encore dit.
«S'il faut modifier la loi une nouvelle fois pour que les choses soient extrêmement claires et que la République et l'État ne fassent pas preuve d'impuissance mais expulsent du territoire national toute personne étrangère irrégulière. Alors il faudra modifier la loi», a de son côté déclaré le ministre de la Justice Gérald Darmanin à l'Assemblée nationale.
Le préfet de l'Hérault avait estimé que les propos de l'influenceur sur TikTok justifiaient le retrait de son titre de séjour et son expulsion. Transféré vers Paris, il avait été mis dans un avion vers l'Algérie. Puis son renvoi en France par les autorités algériennes à son arrivée sur leur sol, le 9 janvier, avait provoqué une crise diplomatique entre la France et l'Algérie.
«Acharnement féroce»
Depuis, les expulsions d'«influenceurs» algériens se sont multipliées, dans un contexte diplomatique toujours plus tendu. Depuis son retour en France, Doualemn était retenu au centre de rétention administrative du Mesnil-Amelot, près de Paris.
«Doualem sort de rétention», se sont félicitées ses avocates, Marie David-Bellouard et Julie Gonidec, voyant dans les décisions prises à son encontre «un acharnement féroce et aveugle, aujourd'hui sanctionné». «Le ministère a joué son va-tout et a perdu. Nous dénonçons une rétention illégale depuis le 29 janvier et saluons une décision logique qui y met un terme», ont-elles écrit.
Le 29 janvier, le tribunal administratif de Paris avait suspendu en référé l'expulsion de «Doualemn» vers l'Algérie, au motif que la procédure d'urgence utilisée par le ministre de l'Intérieur n'était selon lui pas justifiée.