S'il a refusé de s'exprimer sur les faits, assurant qu'il le fera «le moment venu», l'accusé a accepté d'éclaircir certains éléments de sa personnalité en se définissant notamment comme «très rigoriste mais pas radicalisé».
«La radicalisation, ça a commencé» en fréquentant des mosquées en Belgique en mai 2014, un an avant son bref séjour en Syrie dans les rangs de l'organisation État islamique (EI), a-t-il expliqué.
Ayoub El Khazzani a assuré avoir pris ses distances avec l'idéologie islamiste après les attentats du 13 novembre 2015 et celui de Nice le 14 juillet 2016. «Pourtant, des rapports de détention parlent d'une attitude jubilatoire après les attentats du 13 novembre», fait remarquer le président David Hill.
«Non, c'est faux», se défend l'accusé.
«Quel était votre sentiment par rapport à ces attentats ?», insiste le magistrat.
«J'étais curieux, répond l'accusé. Cela m'a fait penser aux massacres en Syrie. On ne touche pas les civils.»
Le témoignage des «héros» également attendu
Pourtant, si Ayoub El Khazzani, 33 ans, est de nouveau devant une cour d'assises c'est bien pour avoir voulu commettre un massacre de civils dans le train Thalys Amsterdam-Paris.
Le 21 août 2015, il était monté à Bruxelles dans ce train armé d'une kalachnikov, d'un pistolet semi-automatique, d'un cutter et de près de 300 munitions.
Il n'avait été empêché de commettre un massacre que par l'intervention «héroïque», selon la cour d'assises qui l'a jugé en première instance, de plusieurs passagers, dont trois soldats américains en civil alors en vacances.
Ces trois Américains, Anthony Sadler, Alek Skarlatos et Spencer Stone, décorés de la Légion d'honneur et qui ont reçu en février 2019 la nationalité française pour avoir «risqué leur vie pour les valeurs de la République», devraient témoigner le 29 novembre.
Venger les victimes de Bachar al-Assad
Conformément aux réquisitions du ministère public, la cour avait condamné Ayoub El Khazzani à la réclusion criminelle à perpétuité pour «tentatives d'assassinats terroristes». Sa peine avait été assortie d'une période de sûreté de vingt-deux ans et d'une interdiction définitive du territoire français après sa peine.
Incarcéré depuis août 2015, il est à l'isolement depuis cette date. «Je ne me plains pas mais c'est dur, c'est une torture blanche, c'est une vraie galère, un cauchemar… Mais j'accepte, je sais ce que j'ai fait», a-t-il dit.
Lors du premier procès, Ayoub El Khazzani avait expliqué qu'il souhaitait «venger» les victimes civiles des bombardements du président syrien Bachar al-Assad et de la coalition internationale.
C'est lors d'un court séjour en Syrie, en mai 2015, qu'il avait été formé par Abdelhamid Abaaoud, le futur coordinateur des attentats du 13 novembre, qui lui avait indiqué comment assouvir son désir de vengeance.
Une explication jugée «fantaisiste»
«Abaaoud sait comment manipuler, jeter de l'huile sur le feu», avait expliqué l'accusé.
C'est en compagnie du même Abdelhamid Abaaoud qu'Ayoub El Khazzani avait rejoint l'Europe en août 2015 en empruntant «la route des Balkans» via la Turquie, la Grèce et la Hongrie.
Lors du premier procès, Ayoub El Khazzani avait également soutenu avoir reçu pour seule mission de son commanditaire de tuer des soldats américains et des membres de la Commission européenne présents à bord du train.
Cette explication avait été jugée «fantaisiste» par la cour.
«Campagne d'attentats de masse»
Le but d'Ayoub El Khazzani, qui s'était présenté comme «un noble combattant de l'EI», était bien de tuer «aveuglément et indifféremment» les quelque 200 passagers du train, avait souligné la cour.
Selon les juges, l'attaque ratée du Thalys s'était inscrite «dans une véritable campagne d'attentats de masse qui trouve son apogée» dans les attentats du 13 novembre à Paris et en mars 2016 à Bruxelles.
Le procès en appel est prévu jusqu'au 9 décembre.
(ATS)