Réforme des retraites en France
François Bayrou fixe à «fin mai» l'objectif d'un accord

Le nouveau Premier ministre français entame des discussions sur les retraites, malgré des désaccords persistants. Les syndicats exigent l'abrogation de l'âge de départ à 64 ans, alors que Bayrou cherche un compromis d'ici fin mai.
Publié: 15:31 heures
Post carré.png
AFP Agence France-Presse

Le nouveau Premier ministre François Bayrou a lancé vendredi la concertation promise sur la réforme des retraites en France, dont les modalités sont déjà disputées, et qui ne démarrera qu'à l'issue d'une mission de chiffrage délicat sur leur financement.

La toute première réunion entre gouvernement et partenaires sociaux pour lancer cette difficile remise en chantier de la réforme des retraites adoptée en 2023 a été «l'occasion de constater l'ampleur des désaccords», a réagi vendredi à la sortie la secrétaire générale du syndicat CGT, Sophie Binet. Les syndicats de salariés ont redit la nécessité d'abroger le report de l'âge légal de départ à la retraite de 62 à 64 ans.

Mais pour François Bayrou – qui se fixe comme objectif un accord «fin mai» – il est «inimaginable que ce problème si important pour la société française se résolve uniquement par l'épreuve de force». «Cette idée qu'ils vont partager des mois et des mois de travail, pour moi, c'est une idée fructueuse», s'est-il réjoui, déplorant l'état de «blocage général» dans lequel se trouve la France. «On est un pays qui n'a pas de budget, on est un pays qui n'a pas de majorité, on est un pays dans lequel les uns ne cessent de s'affronter aux autres (...) et on peut pas en rester là parce que pendant ce temps, le monde nous assiège», a-t-il commenté.

Rapport chiffré le 19 février

La Cour des comptes chargée d'établir «un constat» sur le financement des retraites rendra ses conclusions le 19 février, a annoncé le chef du gouvernement français, selon des propos rapportés par son entourage.

François Bayrou, qui considère que le poids des retraites dans le déficit public est bien plus lourd que celui calculé par le Conseil d'orientation des retraites, rattaché à ses services, a chargé la Cour des comptes d'établir «un constat» fondé sur «des chiffres indiscutables».

La révision de la réforme de 2023 devra tenir compte d'une exigence: ne pas «dégrader l'équilibre financier» du système, selon le chef du gouvernement. A l'issue de la réunion de vendredi, la dirigeante du syndicat CFDT, Marylise Léon, a jugé qu'il fallait bouger «sur l'âge légal» de départ à la retraite. «On a toujours été extrêmement clairs. 64 ans, c'est non», a déclaré Mme Léon, qui a également mis en avant la question de la pénibilité du travail et de l'égalité hommes/femmes. «Moi, je suis optimiste», a ajouté la secrétaire générale du premier syndicat français.

Cette concertation phare sur les retraites du nouveau Premier ministre français lui a permis d'échapper jeudi à la censure des socialistes. Sur le format des concertations, le président du Medef (patronat français) Patrick Martin refuse de discuter des retraites du secteur public et déplore «des interférences politiques».

Une «opportunité inédite»

Il explique ne pas vouloir «recréer des tuyauteries entre les régimes privés (...) remarquablement bien gérées par les partenaires sociaux, et des régimes qui sont chroniquement déficitaires», comme c'est le cas du public.

Sur le fond des débats, les différends sont nombreux entre les syndicats et le patronat, qui ne veut pas modifier l'âge de départ porté progressivement par la dernière réforme à 64 ans et souhaite mettre en place un régime par capitalisation. Réunis en intersyndicale jeudi après-midi, toutes les organisations syndicales représentatives ont rappelé «unanimement leur refus du report de l'âge de départ à 64 ans», selon Julie Ferrua, co-déléguée générale du syndicat Solidaires.

Toutefois, des divergences existent aussi chez les centrales syndicales. «On n'a pas les mêmes solutions pour trouver les sources de financement», concède Solidaires. «On a fait une intersyndicale parce qu'on a mené un combat contre la retraite à 64 ans, mais il n'y aura pas d'intersyndicale pour mener un projet», prophétise un leader syndical, «nous ne sommes pas du tout d'accord sur le fond». C'est la première fois que les partenaires sociaux français ont la main sur cette réforme, adoptée au forceps en mars 2023, en dépit de 14 journées de mobilisations qui ont rassemblé de 1,28 à 3 millions de manifestants, selon les sources.

C'est une «opportunité inédite» qu'il faut «saisir», a salué la patronne de la CFDT dans le journal Libération, convaincue que «c'est la reconnaissance que cette réforme est injuste socialement». «Les partenaires sociaux pourraient être au rendez-vous de l'Histoire», veut croire François Asselin pour la Confédération des petites et moyennes entreprises.

Vous avez trouvé une erreur? Signalez-la