Une initiative promise par Emmanuel Macron avant la pause estivale vise à bâtir «ensemble» des textes législatifs et ouvrir la voie, «le cas échéant», à des référendums, selon une lettre d'invitation présidentielle.
Tous les chefs des partis représentés au Parlement ont accepté l'invitation, mais avec méfiance du côté de l'opposition qui soupçonne Emmanuel Macron de surtout chercher à relancer un quinquennat à la peine, faute de majorité absolue à l'Assemblée nationale.
«Les petites combinaisons ou les plans de com' ne seraient pas à la hauteur de la situation», a ainsi prévenu le patron de LR Eric Ciotti dans ses propos liminaires, dont l'AFP a eu copie.
«Les Français veulent plus de sécurité, moins d'impôts et moins d'immigration», a-t-il ajouté, en assurant que sa «famille politique» était «toujours disposée à débattre pour rechercher et défendre l'intérêt supérieur du pays».
En arrivant autour de 15h00 à ces «Rencontres de Saint-Denis», le président du Rassemblement national Jordan Bardella y voyait «l'occasion d'avoir une discussion franche» avec le chef de l'Etat. Tout en soulignant que cette «initiative politique d'ampleur» s'ajoutait à plusieurs «gadgets» voulus par Emmanuel Macron par le passé, comme le «grand débat» lors de la crise des «gilets jaunes».
Il a assuré qu'il ne servirait pas «de béquille au chef de l'Etat», mais qu'il se ferait «l'écho de millions de Français qui souhaitent qu'une autre politique soit menée», notamment sur la sécurité et le pouvoir d'achat.
«Nous ne sommes pas dupes de l'opération de communication que le président de la République met en place», a dénoncé pour sa part le patron du Parti socialiste Olivier Faure en arrivant groupé avec ses homologues de la Nupes.
De son côté, l'alliance de gauche va présenter une quinzaine de propositions communes, «sans illusion mais avec détermination», a dit pour sa part le coordinateur de La France insoumise Manuel Bompard.
Une réunion à huis clos pour parler de réformes institutionnelles
Un séminaire gouvernemental se tiendra dans une semaine, le 6 septembre, afin d'assurer un suivi. En attendant, mercredi, la réunion devait se tenir à huis clos, sans aucun collaborateur des invités, eux-mêmes appelés à laisser leur téléphone portable à l'entrée. La presse est cantonnée à l'extérieur.
La réunion a lieu à la maison d'éducation de la Légion d'honneur de Saint-Denis, une école emblématique de la «méritocratie» républicaine - elle est réservée aux descendantes de décorés d'ordres français -, dans une ville touchée par les émeutes du début de l'été.
Les participants sont invités à deux tables rondes sur la situation internationale et les réformes institutionnelles, suivies d'un «dîner de travail» autour de toutes les questions posées par les récentes violences urbaines, école, autorité, intégration, inégalités, selon l'Elysée.
«On a l'impression que son oreille gauche est en panne»
Les dirigeants de la Nupes avaient initialement décidé de boycotter le dîner, en dénonçant une «mise en scène médiatique», avant de se raviser, à condition que les agapes se résument à une réunion de travail.
«Qui mange avec quoi, quand, où, c'est pas le sujet, nous ce qui compte, c'est les propositions qu'on fera», a affirmé la dirigeante écologiste Marine Tondelier, tout en déplorant une fois de plus des conditions d'organisation floues et l'absence des thématiques environnementales.
Le chef de l'Etat a appelé Jordan Bardella ainsi que le patron des Républicains, Eric Ciotti, au téléphone ces derniers jours pour leur présenter les enjeux de son initiative.
«On a l'impression que son oreille droite fonctionne mais que son oreille gauche est en panne», a ironisé Olivier Faure. Mais Manuel Bompard et le numéro Un communiste Fabien Roussel ont reconnu qu'Emmanuel Macron avait bien tenté de les joindre aussi, en vain.
Le président de la République assure vouloir une «discussion franche, loyale, directe» pour «agir ensemble», dans «l'unité», au service des Français. Objectif: trouver des terrains d'entente sur des thèmes-clés - mais clivants - comme l'immigration, l'ordre ou le travail.
«Le président veut voir les désaccords et, s'ils sont insurmontables, voir sur quels sujets les Français peuvent trancher» par voie référendaire, explique un cadre du camp présidentiel.
Les partis d'opposition ont présenté des propositions de référendums sur leurs chevaux de bataille: l'immigration à droite et à l'extrême droite, la réforme des retraites côté Nupes.
Le parti présidentiel, Renaissance, pourrait plaider pour un référendum sur trois à cinq questions.
Mercredi matin, Olivier Véran est revenu sur la notion de «préférendum» qu'il avait évoquée en début de semaine. «La Constitution vous autorise à poser plusieurs questions le même jour, dans le cadre de scrutins indépendants», a-t-il assuré.
(ATS)