Le président français Emmanuel Macron a annoncé mardi à Marseille le lancement d'une «opération sans précédent» destinée à «porter un coup d'arrêt aux trafics de drogue» qui ont ensanglanté la deuxième ville du pays. «A Marseille et dans d'autres villes de France, c'est une opération sans précédent que nous avons lancée pour porter un coup d'arrêt aux trafics de drogues, assurer l'ordre républicain, faire 'place nette'», a-t-il écrit sur le réseau X.
S'exprimant devant la presse après plus de deux heures de déambulation dans la cité de la Castellane, dans le nord de la ville, il a indiqué qu'il s'agissait de «la première d'une série d'une dizaine d'opérations 'Place nette' dites 'XXL'» qui doivent s'étendre sur plusieurs semaines. Sa visite surprise intervient deux semaines après le cri d'alarme de magistrats marseillais demandant un «plan Marshall» pour sauver la cité phocéenne du narcotrafic qui la gangrène.
La guerre de territoires pour le contrôle des juteux points de deal a ensanglanté la cité phocéenne comme jamais en 2023, avec 49 personnes tuées, dont quatre victimes collatérales, et 123 personnes blessées. Si depuis le début de l'année, une certaine accalmie semble se dessiner, après de nombreuses interpellations, «ça pourrait reprendre, on a des petits prémices», a alerté mardi le procureur de la République de Marseille Nicolas Bessone.
Assainir la situation
«Le narcotrafic est un fléau qui est croissant» et «la situation est très difficile», «à Marseille» comme dans «de plus en plus de villes, y compris des villes moyennes», a reconnu Emmanuel Macron. «Oui, la drogue est notre ennemi», a-t-il poursuivi en promettant de mettre en place de nouveaux dispositifs pour «rendre la vie impossible aux consommateurs, rendre la vie impossible aux familles des plus jeunes qui servent de guetteurs».
«L'idée c'est d'avoir une situation qui soit clairement assainie et d'avoir un impact très fort les prochaines semaines», a déclaré, aux côtés du chef de l'Etat, le nouveau préfet de police des Bouches-du-Rhône, Pierre-Edouard Colliex. «Ma feuille de route aujourd'hui, elle est claire : les stups, les stups, encore les stups», avait-il annoncé lors de sa prise de fonction début mars.
Lors de cette première journée d'opération, 80 interpellations ont eu lieu et 140'000 euros saisis, selon une source officielle. De source proche du dossier, 4000 policiers et gendarmes vont être mobilisés par semaine à Marseille et dans les communes alentour, pour trois semaines au total.
«Avant, la police, ils venaient une, deux fois par jour, maintenant ils sont là tout le temps, pour le 'shit' ils ont fait du bon travail. Comme commerçant, c'est une bonne nouvelle, il y a des gens qui n'osaient pas venir dans le quartier», a estimé Youssouf Issilamou, 32 ans, un Comorien employé d'une boucherie halal de la cité, où il réside.
Gangrène qui abîme Marseille
Selon le président français, les opérations «Place nette» sont «inédites». Il a détaillé le déroulement des coups de filet: «En s'appuyant sur le travail de fond qui est mené depuis des années, on a identifié les cas qui étaient connus, les gens (...) dont on sait qu'ils rendent la vie impossible justement à un quartier, des têtes de réseaux à leurs relais les plus locaux».
Cette «pré-judiciarisation» des dossiers a ensuite permis de viser ces «criminels très dangereux» en mobilisant «près de 900 forces de police, de gendarmerie et de douaniers» depuis lundi sur Marseille pour «pilonner le territoire, pour lutter contre ces dealers, ces trafiquants, ces réseaux de criminalité, ces tueurs, ces trafiquants de voitures» pendant plusieurs semaines, a-t-il ajouté.
«Le narcobanditisme agit à Marseille comme une sorte de gangrène qui abîme le tissu social», avait déclaré Olivier Leurent, le président du tribunal judiciaire de la cité début mars, jugeant que l'Etat semblait mener une «guerre asymétrique contre le narcobanditisme».
La visite d'Emmanuel Macron intervient alors que plusieurs coups de filet ont eu lieu récemment au sein des deux principaux gangs, DZ Mafia et Yoda, qui se disputent le contrôle du trafic de stupéfiants dans la deuxième ville de France. Félix Bingui, 33 ans, alias «le chat», le chef présumé du clan «Yoda», a ainsi été interpellé au Maroc début mars.
(ATS)