Exode, krach économique...
Un document du Kremlin révèle l'ampleur de la crise en Russie

Un document secret du Kremlin, rendu public, prévoit un recul économique massif de la Russie. Entre l'exode de la population, le krach économique et le recul technologique, les pronostics ne sont pas bons pour le pays.
Publié: 09.09.2022 à 16:45 heures
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La guerre de Vladimir Poutine entraîne son pays dans une crise économique. C'est ce que suggère un document officiel du Kremlin, qui a fuité.
Photo: IMAGO
Fabian Babic

La situation économique de la Russie serait alarmante. C’est ce que suggère un document secret du Kremlin, récemment rendu public, fruit de plusieurs mois de travail de la part de fonctionnaires et d’experts. Leur sujet d’étude: les conséquences de l’isolement économique de la Russie à cause de la guerre en Ukraine.

L’agence de presse Bloomberg a pu consulter ce rapport, dont l’authenticité a été confirmée, écrit «Die Welt».

Pessimisme au Kremlin

En ce qui concerne le produit intérieur brut, le rapport du Kremlin est plus pessimiste que le Fonds monétaire international (FMI). Ce dernier prévoit un recul de 6% cette année et de 3% supplémentaires l’année prochaine. Le rapport, lui, propose trois scénarios. Deux d’entre eux prévoient que la contraction s’accélérera encore l’année prochaine et que l’économie ne retrouvera son niveau d’avant-guerre qu’à la fin de la décennie, voire plus tard.

Tous les scénarios partent du principe que la pression des sanctions va augmenter et que d’autres pays vont les appliquer. Outre les sanctions, le Kremlin craint un «blocus» qui toucherait «pratiquement toutes les voies de transport» et couperait l’économie du pays de l’étranger.

Une perte de 400 milliards de roubles

L’interruption des livraisons de gaz vers l’Europe, et ses conséquences, figure également dans le document. Elle coûterait à l’Etat russe jusqu’à 400 milliards de roubles par an, soit environ 6,5 milliards de francs. Même avec de nouveaux clients, il ne sera pas possible à moyen terme de compenser entièrement les recettes perdues.

D’autres restrictions technologiques et financières devraient encore accentuer la pression économique sur la Russie. Le rapport estime par exemple que jusqu’à 200’000 spécialistes en informatique pourraient quitter le pays d’ici 2025.

La population russe diminue

La vague d’émigration redoutée a toutefois déjà commencé. C’est ce que montre une publication des autorités statistiques russes: ces dernières ont annoncé mardi que 419’000 personnes avaient quitté la Russie au cours du premier semestre de cette année. C’est deux fois plus d’émigrants que l’année dernière sur la même période.

La baisse de la démographie n’est pas le seul problème auquel doit faire face le pays: le nombre d’immigrés a également massivement diminué. La Russie est considérée traditionnellement comme un pays d’immigration. Depuis l’an 2000, plus de cinq millions de personnes sont arrivées en Russie. La majorité d’entre elles sont originaires d’anciennes républiques soviétiques, principalement des Russes qui y vivaient. En outre, certaines sont venues des pays d’Asie centrale les plus pauvres pour trouver un emploi dans les métropoles russes. Mais aujourd'hui, le total de nouveaux arrivants est en baisse par rapport à la même période des années précédentes.

Impact du Covid sur la population

Outre l’immigration et l’émigration, la pandémie de Covid-19 a également eu un impact sur la population russe ces dernières années. Selon les données officielles des autorités, environ 377’000 personnes sont mortes jusqu’à présent à cause du virus.

Mais il y a des raisons de penser que le nombre de victimes du Covid est bien plus élevé. Selon les chiffres officiels de mortalité, près d’un million de personnes de plus sont décédées rien qu’en 2020 et 2021 par rapport à la moyenne des dix années précédentes. L’espérance de vie officielle est passée de 78,2 à 74,5 ans. Le Covid a sans doute été un facteur déterminant dans cette baisse.

Pour finir, le rapport du Kremlin esquisse un avenir peu glorieux pour le développement de la Russie. C’est justement l’accès limité à la technologie occidentale qui pourrait conduire la Russie à rester une ou deux générations en retard sur les normes actuelles. Le pays serait alors contraint de recourir à des alternatives moins développées en provenance de Chine et d’Asie du Sud-Est.

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