Taylor Swift n'a pas apporté son soutien à Donald Trump, Lady Gaga et Morgan Freeman non plus, et Bruce Springsteen n'a pas été photographié avec un tee-shirt «Gardons l'Amérique sans Trump». Pourtant, ces fausses informations ont été partagées sur les réseaux sociaux et polluent la campagne électorale.
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Ces soi-disant messages d'acteurs, chanteurs et athlètes américains dévoilant leurs opinions politiques et avis sur Kamala Harris ou Donald Trump, souvent générés par l'intelligence artificielle (IA), se multiplient, selon des chercheurs. Les réseaux sociaux - à l'image d'un X détenu par Elon Musk qui fait tomber des garde-fous contre la désinformation - permettent à ces messages de se diffuser, et leur potentielle influence sur les électeurs inquiète, à quelques semaines l'élection.
Le mois dernier, Donald Trump a partagé des images manipulées montrant la chanteuse Taylor Swift, ultra-populaire aux Etats-Unis, donner son soutien au républicain. Certaines de ces images portent les caractéristiques des images modifiées par l'IA, selon le spécialiste Hany Farid, alliant vraies et fausses images, ce qui rend le montage «particulièrement sournois», selon l'expert.
«Les plateformes ont rendu cela possible»
Taylor Swift, qui compte des centaines de millions d'abonnés sur les réseaux sociaux, a en réalité soutenu la démocrate Kamala Harris la semaine dernière. Après l'annonce, Donald Trump a lâché sur son réseau Truth Social: «Je déteste Taylor Swift!» Une base de données de News Literacy Project, une ONG américaine qui travaille sur la désinformation, a jusqu'ici répertorié 70 faux messages de personnalités apportant leur soutien ou leur rejet à un candidat - et la liste s'allonge de jour en jour.
«En cette période de polarisation, les faux soutiens de célébrités peuvent attirer l'attention des électeurs, influencer leurs visions, confirmer leurs préjugés et semer la confusion et le chaos», alerte Peter Adams, l'un des responsables de l'ONG. Dans sa liste, une image manipulée de Lady Gaga avec une pancarte «Trump 2024».
D'autres affirment que l'acteur Morgan Freeman, critique des républicains, a dit qu'un second mandat Trump serait «bon pour le pays», ou montrent le chanteur de rock Bruce Springsteen avec un tee-shirt floqué «Gardons l'Amérique sans Trump». «Les plateformes ont rendu cela possible», selon Peter Adams. «En faisant marche arrière sur la modération et en hésitant à retirer les fausses informations, elles sont devenues un moyen significatif pour les trolls, opportunistes et propagandistes d'atteindre un public de masse.»
La technologie se développe à une vitesse folle
Surtout X (ex-Twitter), après avoir revu à la baisse sa politique de modération des contenus et rétabli des comptes diffusant de la désinformation. Son propriétaire, Elon Musk, qui a soutenu Donald Trump pour l'élection présidentielle, est régulièrement accusé de partager des mensonges électoraux.
Après avoir diffusé de fausses informations, des responsables américains chargés de superviser les élections ont demandé à Musk de corriger le chatbot de X appelé Grok, qui permet aux utilisateurs de générer non seulement du texte, mais aussi des images. Lucas Hansen, co-fondateur de CivAI, qui lutte contre les dangers de l'IA, a montré à l'AFP la facilité avec laquelle Grok peut générer un faux message. Il suffit par exemple d'écrire comme consigne «image d'un rassemblement extérieur de femmes portant des tee-shirts "Swifties pour Trump"» pour créer une fausse photo de fans de Taylor Swift soutenant l'ancien président.
«Si vous souhaitez une situation plutôt banale où les personnes sur l'image sont soit célèbres soit fictives, Grok est un grand facilitateur» pour créer une manipulation visuelle, selon Lucas Hansen. «Je m'attends à ce qu'il soit une source importante de fausses images de soutien de célébrités.»
Et, au fur et à mesure que la technologie se développe, ce sera «de plus en plus difficile d'identifier les faux», relève Jess Terry, qui travaille comme analyste chez Blackbird.AI. «Le risque existe très probablement que des générations plus âgées ou d'autres groupes de personnes moins familières avec le développement de la technologie basée sur l'IA croient ce qu'ils voient», estime Jess Terry.